Tableau Inédit signé MIRO et daté du
3 mai 1935 ( huile et gouache)
J’ai fait une étude sur un tableau que j’ai acheté il y a juste 20 ans comme tableau anonyme et inédit
Cette étude que j’ai commencé il y a 7 ans arrive à son terme .Je pense avoir suffisament d’éléments aujourd’hui pour démontrer que cette œuvre sur papier est de Joan MIRO et qu’elle a été crée le 3 mai 1935
Comme avant- propos, veuillez trouver un résumé de l’étude qui sera suivie de l’étude détaillée. J’espère que ce résumé qui présente un tableau d’une richesse incroyable vous donnera l’envie de lire l’étude complète . Comme "l'autoportrait" de 1960 (1937+1960) et " l'hirondelle éblouie par l'éclat de la prunelle rouge " 1925 et 1960 , ces tableaux ont la particularité d'être deux tableaux en un
Pour comprendre ce tableau il faut dans un premier temps, le regarder d’un œil neuf et faire abstraction des œuvres les plus connues, et comme dit Michel LEIRIS
« .. le conseil pratique sur la meilleure façon d’aborder une œuvre de MIRO :faire le vide en soi, la regarder sans arrière pensée et s’y baigner les yeux comme dans une eau ou ils pourront se laver de la poussière accumulée autour de tant de chefs-d’œuvre. ; Grâce à cette candeur retrouvée s’ouvriront toutes grandes en nous, les portes de la poésie »
Et alors l’art de MIRO va se révéler de manière tellement évidente quand tous les fragments de ce tableau vont se reconstituer à la manière d’un poème de René CHAR de RIMBAUD des écrits de HERACLITE ou d’un recueil de poèmes de LEIRIS comme « FISSURES » accompagné de 13 gravures de MIRO qui se présente d’emblée comme une séquence , un ensemble de poèmes et non un seul texte organique .
« Ce mode de composition fragmentaire, cette écriture décomposée en poèmes numérotés de I à XIV semble obéir à un impératif double :d’une part de simplifier l’approche par un isolement des figures associées du tableau. Il répond ainsi à l’isolement caractéristique des figures de MIRO au texte. Chaque poème se compose autour d’une figure unique et d’autre part le fractionnement permet d’indiquer la prolifération des approches de la peinture, la variété des angles choisis »Cela répond tout a fait à la composition de la peinture FYI nous le verrons par la suite par la fragmentation entre le volet 1 ( bovin art préhistorique) et le volet 2 ( ETNA-la légende d’EMPEDOCLE) entre les différents éléments des 2 volets qui peuvent être isolées de l’ensemble pour mieux s’assembler ensuite quand on a compris le sens du tableau mais il ne faut pas perdre de vue que chez MIRO si on peut isoler les différents éléments d’un tableau , il suffit de soustraire, d’éliminer un des éléments pour que le tableau n’est plus de sens . c’est ce qui se passe dans FYI et nous le verrons dans l’étude détaillée ci jointe
C’est un tableau sur carton de petite taille 15cm x 10,5cm qui est signé de plusieurs manières. 1 signature classique de MIRO en bas à droite très discrète comme MIRO avait l’habitude de le faire( à peine visible sur une photographie) il était hostile aux peintures signées mais se rangeait à l’avis de ses marchands et collectionneurs qui lui imposaient de signer ses tableaux . Miro était opposé à l’aspect commercial des œuvres ( il vénérait les peintures préhistoriques et murales anonymes)
Il y a aussi dans ce tableau, une signature sous forme de calligramme dans une calligraphie propre à MIRO c’est-à-dire intégré à un image à la manière de calligrammes D’APOLLINAIRE. Dans ce cas précis ,elle est intégré à une image d’oiseau en haut au centre de l’image avec très distinctement le M de Miro et le reste des lettres de MIRO intégrés dans la figure de l’oiseau
Sous la signature il y a une date, Le 3 mai 1935 qui correspond au début de la période« sauvage » de MIRO qui a commencé en octobre 1934 et qui se termine en 1938 . et qui suit la période appelé « assassinat de la peinture »( 1928-1931) par son biographe DUPIN et période plus courte de ( 1932-1934)consacré à la « concentration plastique » dont des collages.
Ce tableau est nommé FYI (Acronyme de For Your Information ) Ces trois lettres se trouvent dans le tableau en bas à gauche et fait suite à un signe calligraphique ou idéogramme ( à la manière chinoise) qui sera étudié dans l’étude détaillée
.Il aurait tout aussi bien pu s’appeler , caverne rupestre, tête de bovin personnage dans le paysage, l’oiseau dans le volcan, termes et mots qui sont souvent employés pour désigner des titres de tableaux de MIRO. Il aurait pu s’appeler également « vers un monde meilleur » aujourd’hui clairement de circonstance qui pourrait apporter des réponses imaginées pour un monde meilleur et c’est par le biais allégorique qu’il veut nous faire passer son message.
Ce tableau a été acheté à l’ISLES SUR SORGES en 2010 à l’occasion de la foire annuelle des arts et des livres du mois de juillet. Il a été acheté comme peinture anonyme , le vendeur n’ayant aucune idée de sa paternité. C’est au bout de quelques années que j’ai commencé à m’intéresser véritablement à ce tableau en en cherchant l’origine et c’est en m’intéressant à MIRO qu’il m’a paru évident que l’esprit , les techniques de peinture et le vocabulaire Mironien étaient présents dans ce tableau. J’étais persuadé que la qualité de la peinture, l’imagination du peintre dans ce tableau ne pouvaient être que le résultat d’un artiste majeur.
Hormis le style qui sera détaillée dans l’étude complète ,d’autres aspects très significatifs font penser à MIRO, parmi ceux- là : le dos du tableau ,qui présente d’une part des traces de peinture qui laisse à penser que le peintre s’est servi de ce carton pour nettoyer ses pinceaux , ce qui était très fréquent chez MIRO, d’autre part ,j’ai été intrigué par le chiffre 362 indiqué au dos du tableau. Après de longues recherches pour trouver l’explication ,j’ai trouvé qu’ il s’agit d’un numéro de stock correspondant à son marchand PIERRE MATISSE , qui depuis Avril 1934 avait l’exclusivité des ventes de MIRO qu’il partageait avec Pierre LOEB ; Pierre MATISSE pour les Etats Unis et Pierre LOEB pour la France et l’Europe
.Il existe un autre tableau - intitulé « personnage devant la nature »dans le stock de MATISSE en 1935 et donc ce numéro 362 correspond bien à la période indiquée sous la signature 3 mai 1935, mais ce n’est pas ce tableau 362 FYI . L’explication de ce double numéro 362 en est certainement que MATISSE a noté 2 tableaux portant le numéro 362 mais celui-ci FYI, n’aurait pas été mis dans le stock physique car il n’a pas été vendu mais offert ,. Ce tableau n’avait donc pas de valeur marchande pour MATISSE et donc n’apparait pas dans le STOCK physique et ce numéro 362 a donc été repris dans le stock et a été remplacé par le tableau commercial 362 mis en vente et acheté par le marchand HOWARD PUTZEL en Juin 1935. Vous trouverez également dans mon étude des explications détaillées de cet état de fait.
Mais tout d’abord je ne peux m’empêcher de vous signaler qu’en terminant les derniers détails de l’étude de ce tableau il est étonnant de considérer que ce tableau fait en 1935 est aujourd’hui d’une actualité brulante, et si MIRO vivait encore aujourd’hui il aurait pu faire le même tableau dans le même état d’esprit en raison des inquiétudes actuelles (COVID 19, Guerres proches dans continent Européen , incertitudes climatiques etc ). En 1935 il n’est plus possible pour MIRO d’ignorer le fatal engrenage dans lequel le monde s’était engagé, la crise de 1929 avait encore des conséquences humaines et économiques désastreuses en Europe et MIRO ressentait avant tout le monde les tragédies qui se pointaient à l’horizon, guerre d’Espagne avec en 1934 les premiers soubresauts de la guerre civile et les grandes grèves espagnoles réprimées dans le sang .
Miro traduit dans ses tableaux à partir de1935 ces tragédies à venir sous des formes brutales, des agressions et des déformations des figures humaines . Tragédies pointées d’ironie, d’humour comme toujours et espoir d’un nouveau monde qu’il imagine dans ses tableaux dans une sorte de folie bienheureuse.
MIRO veut nous dire dans ce tableau FYI mieux qu’il pourrait le faire par des mots ou quiconque d’autres par des poèmes ou des écrits, qu’il rêve d’un monde qui reviendrait à son état originel avec une humanité purifiée dans l’âme et l’esprit .Cette œuvre n’exprime rien d’autre que son délire exacerbé pour les bienfaits de l’humanité.
Ce tableau minuscule ( à la manière Persanes) a la gageure de représenter deux tableaux en un seul en superposant un deuxième tableau dans le premier , sans supprimer aucun élément du premier et en résumant toute l’histoire de l’humanité jusqu’à aujourd’hui dans ce petit tableau mais ce cas n’est pas unique chez MIRO, dans" AUTOPORTRAIT" il existe un dessin de 1960 qui a été rajouté à une copie de dessin de 1937 , il existe d’autres cas qui sont repris dans l’étude jointe.
Il est tout de même étonnant qu’un si petit tableau puisse nous entrainer de la préhistoire ,aux philosophes présocratiques en passant par les chinois du confucianisme et taoisme , pour finir par notre civilisation contemporaine avec un minimum de moyens pour entrainer notre imagination vers l’infini ,vers le mystique et nous pose la question du devenir de l’humanité.
En effet, transmettre autant d’informations dans une seule peinture si petite sans confusions ni surcharges relève de l’exploit, cela n’a pu être réalisé qu’à force de retenue avec une maitrise absolue que seul un peintre comme MIRO était capable de réussir. Comme dit YOYO MAEGHT ( éditrice, galériste, petite fille de Aimé MAEGHT) dans son livre la Saga MAEGHT : « La force d’une œuvre tient à sa dimension spirituelle . Là, dans une boite à cigare, je peux transporter une exposition de chefs- d’œuvre…..de MIRO »
Dans ce tableau fait à la manière des peintures de l’art préhistorique sur les murs des grottes il est comme un palimpseste qui aux peintures originales des grottes se rajoutaient d’autres peintures des générations suivantes d’artistes qui peignaient par-dessus le travail de leurs prédécesseurs sans effacer les peintures précédentes brouillant leur lisibilité au fil du temps mais dans ce tableau malgré les deux volets superposés tout est clair !
A l’origine de ce tableau à la création sans limites spatiales et temporelles le peintre serait partie de plusieurs taches huileuses présentes sur une feuille cartonnée couleur ocre terre et vierge ( taches toujours visibles malgré des rajouts de peintures par-dessus) Cette feuille cartonnée lui aurait fait penser aux murs de la grotte ALTAMIRA dont il possédait sans doute des cartes postales ou des reproductions photographiques découpées dans des magazines. C’est sans doute en pensant à la caverne d’ALTAMIRA que cette masse sombre s’est transformé en bovin des cavernes .Avec le fond du tableau couleur du carton sali ocre , cela fait penser au plafond de la grotte d’ALTAMIRA.
Pour peindre cette œuvre, il s’est mis dans la tête d’un homme des cavernes qui peignait sans références artistiques .Il s’en suit sur cette peinture cette masse centrale à la forme d’un bovin semblable à ceux visibles de la grotte d’ALTAMIRA et devant une autre masse qui représente l’entrée de la grotte, tout cela sans perspectives. Cette vision, c’est celle la plus immédiate du tableau que j’appellerais, la vision 1
Dès ses premiers tableaux ,des bovins, vaches , taureaux font leur apparition dans les tableaux de MIRO à l’exemple de "Terre labourée "de 1923-1924 et plus tard dans "course de taureaux". Les bovins, vaches, taureaux faisaient partie du paysage de l’enfance de MIRO à MONTROIG et contrairement aux taureaux de PICASSO , les bovins de MIRO sont souriants et bienveillants
Dans le tableau de MIRO » Terre labourée » de 1924, un taureau est a la porte d’une caverne rupestre et on peut faire l’analogie avec le bovin de tableau F Y I .
On connait donc l’intérêt de MIRO pour l’art pariétal.
Deux points noirs forment les yeux, des lignes sinueuses blanches forment les naseaux et la bouche et au dessus de la tête les deux oreilles pointent
Les contours restent très vagues. La peinture de fond du bovin ressemble étrangement à la peinture des "constellations" de 1941 notamment le tableau « réveil au petit matin » peinture à l’huile et essence
La tête du bovin étant constituée ,ce qui intrigue alors ce sont ces deux yeux au-dessus de la tête dont un œil rond surdimensionné inquiétant entre les deux oreilles et à sa gauche un autre œil indépendant en forme d’amande .Entre ces deux yeux , ce qui était vu pour une oreille peut alors être considéré comme le bec d’un oiseau qui ressemble aussi a un sexe féminin. La tête reconstituée peut être vu aussi comme un sexe masculin Ces éléments indépendants si on les raccorde en rajoutant l’oreille droite du bovin comme oreille surdimensionnée forment un oiseau de mauvais augure.
L’oreille surdimensionnée, comme le sexe féminin font partie des signes ,symboles courants qui reviennent souvent dans les tableaux de MIRO, les exemples sont légions et font partie des symboles de base MIRONIENS. On trouve chez MIRO, des oreilles géantes dans des arbres, des sexes féminins pris indépendamment placés à n’importe quel endroit des tableaux
Et donc au dessus de la tête du bovin ,l’ensemble qui constitue des éléments indépendants sans liens et réunis ( yeux, bec, oreille) fait donc penser aux têtes d’oiseaux écrasés de MIRO comme le HIBOU tout en largeur a la forme d’un diabolo mais aussi à un sexe masculin . Le peintre semble donc vouloir nous dire que l’être à tête d’oiseau symbolise à la fois l’homme et la femme
Cette tête semble avoir été constituée et superposée dans un deuxième temps à la tête du bovin .C’est visible au niveau de la peinture qui est sans rapport avec la texture du bovin . La tête d’oiseau est constitué de peinture à l’huile épaisse, la tête du bovin étant constitué de peinture à l’huile diluée avec de l’essence ,plus ou moins fluide.
C’est alors qu’une métamorphose peut s’opérer et l’image prend alors une toute autre représentation.
On bascule dans une deuxième vision du tableau qui n’a plus rien à voir avec cette vision pariétale de caverne rupestre, c’est le volet2
Le bovin aux contours et formes approximatives se transforme alors en une montagne volcanique et ce qui a été vu comme le plafond d’une caverne rupestre est remplacé par un ciel poussiéreux , fuligineux, ,un ciel de montagne volcanique en activité . En considérant le mur délavé du premier plan ( entrée de caverne dans vision 1) et la montagne volcanique ,le peintre a voulu alors évoquer le volcan ETNA et ce mur en ruines serait alors ce qu’on appelle « la tour du philosophe « qui se situait au pied du volcan ETNA jusqu‘en 2002, aujourd’hui disparu suite à une coulée de laves qui a emporté les derniers vestiges de cette tour
Un chose intéressante également en regardant une photographie de l’ETNA sur un certain coté et un certain angle on remarque des rochers crées par les laves qui donnent l’aspect d’un serpent la gueule ouverte , ce même serpent représenté par le peintre de FYI au pied du volcan du tableau .
C’est peut- être à la vue d’une photographie vu sous ce versant et cet angle que MIRO a eu l’idée d’ inclure le serpent dans son tableau FYI
Du bovin préhistorique souriant et paisible semble sortir de son crâne un être hybride monstrueux à tête d’oiseau aux yeux énormes globuleux, a 1’oreille tout aussi énorme et au bec en forme de sexe féminin mais on peut y voir aussi à la place de l’oiseau un sexe masculin.
A partir de là on passe à un autre tableau dans le tableau sans retirer quoi que ce soit à la vision 1 du tableau précédent mais une autre interprétation, une autre époque, une autre civilisation sont alors remplacés au regard .On a fait un bon de plusieurs siècles, on passe de l’art pariétal préhistorique à la Grèce antique avec la légende d’EMPEDOCLE que MIRO utilise pour nous présenter son message philosophique qui sera expliqué en détail dans l’étude complète qui suit ce résumé
Malgré tout il existe un rapport entre les 2 volets du tableau
Le Bovin qui représente la pureté originelle de l’art pariétal de la préhistoire engendre en métamorphose un oiseau de mauvais augure à la manière des aliens dans les films de monstres de science - fiction. Sous la tête du bovin au pied du mur sort de sa vie souterraine comme de l’enfer un serpent qui est en position d’attaque de vouloir dévorer ce qui se présente à lui. Les monstres de MIRO représentent la partie sombre de l’âme humaine
A partir de là, une toute autre image peut surgir pour construire un nouveau tableau ou l’on passe de la préhistoire à la philosophie présocratique de EMPEDOCLE et HERACLITE et c’est bien dans la façon de travailler de MIRO . Il travaille parfois très longtemps sur ses toiles mais il ne les retouche jamais après coup. Quand il revient sur 1 travail antérieur, il l’utilise de manière quasi impersonnelle comme point de départ d’une nouvelle idée.
Ici dans FYI nous en avons un remarquable cas . Nous avons dans 1 seule œuvre cette démarche de MIRO de reprise d’un autre tableau dans l’œuvre d’origine dans son travail. Ce tableau qui est d’abord parti de l’image du plafond d’une grotte avec peinture de bovin a donné au peintre une autre idée en cours d’exécution sur l’image du volcan l’ETNA et son imagination l’a porté sur la légende d’EMPEDOCLE . Sans rien supprimer du tableau initial il a construit un deuxième tableau superposé au premier et n’ayant dans l’immédiat aucun rapport entre eux mais il en fait par magie sa philosophie de vie et dès lors un lien se crée entre les deux volets nous le verrons dans l’étude détaillée
MIRO s’intéressait à la préhistoire mais aussi à la civilisation Grecque antique dont il avait été initié par le peintre André MASSON qui avait été son voisin lorsque MIRO habitait rue BLOMET à PARIS au début des années 20 . Leur intérêt réciproque se portait sur les présocratiques notamment HERACLITE et EMPEDOCLE dont nous le verrons l’esprit des deux philosophes sont clairement visibles dans ce tableau.
En ce qui concerne EMPEDOCLE, cette tour du philosophe évoquée ci-dessus a été érigée en l’honneur justement de EMPEDOCLE. Empédocle à la fois philosophe présocratique grec du Vème siècle av jc , poète , hygiéniste, urbaniste, savant, thaumaturge a été le premier à donner comme principe physique de toutes choses les 4 éléments l’eau, le feu la terre et l’air, ces éléments se rapprochent grâce à l’amour et s’éloignent avec la haine. Pour lui, la vie, la mort ne sont qu’un agencement de ces 4 éléments, Les combinaisons de ces 4 éléments forment tous les êtres de l’univers et que rien ne finit, les éléments sont toujours les mêmes
EMPEDOCLE disait que au début quand ces éléments commencent à se mélanger naquirent beaucoup de têtes sans cou, des yeux vagabondaient dépourvus de front, des membres solitaires cherchaient à s’unir, des faces et des poitrines regardaient dans des directions opposées et des bovins à tête d’homme cotoyaient des hommes à tête de bovins.
C’est exactement ce qui est illustré dans ce tableau qui explique clairement de manière imagée la théorie des 4 éléments par ce mélange en directions opposées( membres humains démembrés symbolisés par traits concaves, convexes noir au centre du volcan) et en haut du tableau des yeux, une oreille un sexe féminin indépendants et désorganisés
A la fin de sa vie EMPEDOCLE déclara qu’il avait atteint l’état suprême et étant à la fois médecin , philosophe, faiseur de miracles et qu’il n’était plus mortel mais un Dieu immortel.
Selon des textes apocryphes et, ou ce qui semble peut être une légende pour prouver sa théorie , EMPEDOCLE se serait jeté dans le foyer du cratère ETNA pour la purification de son âme et son esprit . Au pied de L’ETNA avant de disparaitre, il laissa ses sandales et c’est à cet endroit qu’on fit construire la tour du philosophe en sa mémoire . Les vestiges de cette tour semblent être le mur du tableau. D’autre part comme écrit ci-dessus sur un des versants de l’ETNA, la lave durcit donne l’aspect d’un serpent la gueule ouverte, c’est ce qu’on retrouve également dans le tableau sous cette masse montagneuse et MIRO s’en est servi pour donner une signification particulière à son tableau.
MIRO n’avait pas vu l’ETNA lors d’un déplacement mais probablement dans un magazine
En ce qui concerne HERACLITE, son esprit est également présent dans le tableau à l’image de la fragmentation de ses écrits. D’autres poètes se sont inspirés de la fragmentation des écrits comme le poète RIMBAUD et l’ami de MIRO, le poète René CHAR. Dans ce tableau aux multiples fragments disséminés ,le bon agencement forme une entité cohérente.
Ainsi à la légende de EMPEDOCLE se jetant dans le cratère, ici l’image de l’oiseau et des sexes sont la métaphore de l’être humain purifié par le feu du volcan . Cet oiseau s’enfonce dans le cratère et ensuite purifié se dirigera vers le ciel symbolisant la félicité ( voir détail dans l’étude jointe)
A la félicité du ciel s’oppose dans ce tableau au bas de celui-ci ,les malheurs, les méfaits, le bassesses, la cruauté de la terre symbolisés par le serpent venant des ténèbres, se montrant agressif et prèt à attaquer . Il est prêt à attaquer un personnage qui est ce paysan catalan symbolisé par son bonnet catalan ( Barretina) dont on ne voit que le visage comme une ombre et qui se situe dans le coté en bas à droite du tableau . Ce paysan semble résigné, tête baissée, à être dominé par le serpent et ne pouvant s’échapper de cette terre hostile. Le serpent et la figure du paysan sont en transparence dans la peinture du bas du tableau pour ainsi dire prisonnier de la terre dont ils ne peuvent s’extraire.
Pour résumer ce tableau je le définis comme une peinture qui représente le cycle éternel et infini de l’humanité selon le peintre MIRO .
Miro ne se cache pas qu’il n’aime pas la société contemporaine et il rêve d’un retour à l’homme originel dégagé de tous les apports et les déviances de la modernité qui n’a fait que le dépraver, ici l’ homme originel est représenté par l’homme des cavernes rupestres avec son art pariétal, c’est le volet 1 du tableau du bovin préhistorique présenté ci-dessus, puis les siècles se passant , on arrive dans le volet 2 avec EMPEDOCLE ,
MIRO lance la parabole, l’allégorie de l’homme contemporain qui est arrivé dans une impasse, le serpent est le symbole des ténèbres souterrains et selon MIRO l’homme a besoin de retrouver sa pureté originelle . Cette pureté selon EMPEDOCLE il la retrouvera dans la purification par le feu , représenté ici par le feu de L’ETNA et ainsi l’homme se retrouvera dans le même esprit que l’homme préhistorique dans sa virginité originelle
Ce tableau est donc un le cycle éternel de l’humanité qui ne s’arrêtera jamais, Homme originel- homme contemporain- retour à l’homme originel.
Quand on regarde les tableaux des années 30 et 40 ,nombreuses sont les figures mythologiques .Ces figures mythologiques MIRO a voulu les créer pour lui-même et pour sa génération. Dès les premières années parisiennes et par la suite, cette tonalité de son inspiration n’a pas varié. Comme dans FYI , sa volonté était de créer des êtres humains nouveaux et de leur donner vie et de créer un monde pour eux ainsi dans FYI, ce qui est considéré comme une figure mythologique , demiurge , l’ETNA va détruire par le feu des êtres pour les recréer purifiés dans un monde idéal , êtres symbolisés par l’oiseau qui représentent , la femme, l’homme, MIRO , l’humanité . Ce tableau est tout à fait dans cette l’optique des tableaux aux figures mythologiques. Rappelons que pour MIRO, ce n’est pas seulement une civilisation antique, un caractère sacré qui est mythologique, pour MIRO un arbre , une volcan par exemple sont mythologique
Ces figures mythologiques peuvent avoir la forme d’un TOTEM avec un caractère sacré ainsi plus tard « la fourche » sculpture de MIRO à Saint -Paul- de Vence peut aussi être comparée à la figure mythologique de FYI ainsi cette sculpture dont le corps en forme d’entonnoir renversé avec au -dessus une structure en forme de triangle et un trou central qui pourrait être un cratère , au- dessus de cette structure une fourche tournée vers le ciel , certains y voient l’oiseau qui prend son envol. On retrouve ici le même esprit que FYI .
Autre particularité intéressante entre les deux œuvres , le mur ! .Dans les deux cas on trouve un mur ancien , celui de « la fourche » fait avec les vieilles pierres du pays autour de Saint -Paul de Vence et dans l’autre le mur en ruine de la tour du philosophe
Voici ce que j’ai découvert de ce tableau FYIqui est 2 tableaux en 1 , mais chacun peut y trouver d’autres formes d’autres images et qui ont un rapport certain à MIRO . En effet chez MIRO la suggestion et le mouvement sont les priorités absolues, même ce qui semble immobile est mouvement à l’exemple du volcan qui libère de l’énergie des étincelles
Par exemple pourquoi pas y voir aussi dans ce tableau la représentation d’un anthropoide à la place du bovin avec le corps en forme de cône renversé bien ancré dans le sol et une tête d’oiseau comme on en rencontre de nombreuses formes identiques dans de nombreux tableaux de MIRO quelque- soit les époques du peintre . On peut y voir aussi une sorte de totem comme la sculpture qui a été produite à Saint-Paul de VENCE « la Fourche » avec cône renversé sur lequel repose une sorte de tête
Ainsi la création de ce tableau est conforme à cette phrase de MIRO : « ce qui commande chez moi c’est le fait plastique et poétique, ce sont les associations de formes et d’idées, une idée, une autre forme et le tout aboutit à des personnages , à des animaux à je ne sais quoi que je n’ai pas prévu ».
Dans les œuvres de MIRO, c’est au spectateur de découvrir suivant les pistes laissées dans l’œuvre ce qu’à voulu dire l’artiste et parfois ce qu’il n’a pas voulu dire mais que nous découvrons nous même comme une piste possible , Miro n’explique rien c’est au spectateur de découvrir et pour MIRO toutes les explications des spectateurs sont valables à la condition tout de même de suivre les indices laissés par le peintre car si les éléments d’un tableau de MIRO semblent autonomes, ils ont entre eux des rapports rigoureux. Les tableaux de MIRO n’ont plus de sens si on n’enlève ne serait -ce qu’un seul élément, L’équilibre est alors rompu. D’ailleurs dans le tableau FYI les éléments, les objets sont imbriqués les uns dans les autres et en nul endroit de la composition les éléments ne se détachent du support matériel. Le serpent et le mur sont imbriqués l’un dans l’autre ,Le mur et le volcan sont soudés par les traces de doigts de MIRO La tête de l’oiseau dans son ensemble semble aussi attaché au volcan et la tête du personnage en transparence ne peut être détachée sans être désagrégé il est aussi imbriqué à la fois dans l’image du volcan et la terre du 1er plan mais cela n’empêche pas que tous les éléments sont indépendants et forment une entité propre , ne sont pas fondus dans l’image
Donc dans ce tableau sont liés le mur et le serpent (trait commun avec contour du serpent),l’oiseau et le volcan, le volcan et le mur, la couleur de fond du volcan ( bovin) et la couleur du fond du mur . Si on enlève le mur du tableau il n’y a plus d’équilibre le tableau n’a plus de sens.
Il en est de même des couleurs du tableau qui s’étendent sur plusieurs objets. Ainsi la terre ,le serpent, le personnage ,le mur sont fondus en un seul bloc de couleurs diffuses identiques et ainsi c’est la couleur qui domine les objets qui n’ont pas de contours très marqués et précis . Si on s’éloigne du tableau ces objets disparaissent fondus dans la couleur dominante qui est le fond brut ocre du support papier cartonné sali .
Enfin quelques mots de calligraphies qui seront largement développées dans l’étude complète jointe. Dans le tableau en bas à gauche on remarque se détachant en couleur blanche un signe graphique calligraphique sorte d’idéogramme et 3 lettres alignées ,séparées par un barre blanche qui semblent mystérieux
Après de longues recherches et à partir des signes et vocabulaire MIRONIEN , le signe calligraphique à gauche de la barre blanche est constituées par 3 traits des bases du vocabulaire MIRONIEN qui placées comme ils le sont forment une calligraphie de l’alphabet phénicien ou grec ancien qui signifie « Le taureau », ce n’est donc pas un hasard ! ou si s’en est un, Miro aurait été très inspiré Ce même signe graphique , calligraphique, on le retrouve repris comme sigle commercial de la Fondation MIRO de BARCELONE ) mais toujours avec quelques variantes car MIRO ne fait jamais deux fois à l’identique. Ce signe graphique est représenté dans de multiples tableaux tout au long de sa vie .
Ainsi ces trois traits de base du tableau on les retrouve dans un ordre différent dans un tableau tardif de 1976 sans titre, huile et gouache sur papier ( figure 76) . Dans ce même tableau on retrouve simplifié à l’extrème toute la structure du tableau FYI : l’oiseau avec œil rond et en amande avec oreille sur une forme triangulaire comme la montagne triangulaire de l’ETNA de FYI, A gauche une masse sombre géométrique comme le mur d’entrée de la caverne rupestre ou le mur de la tour du philosophe ainsi que les courbes convexes, concaves et traits droits que l’on retrouve aussi dans FYI
La diagonale se trouve aussi dans le vocabulaire de base MIRONIEN , ensuite les trois lettres pourraient être un acronyme anglais : FYI : For your information
Ci-dessus j’avais indiqué que le tableau avait rejoint son marchand Pierre MATISSE de New-york en1935
En ce qui concerne la manière de peindre, cela sera détaillée dans l’étude jointe car il y a beaucoup à dire sur ce sujet . Le support est ici le carton, la peinture est à la fois spontanée et méditée, les dessins , les pigments utilisées, les couleurs vertes, bleues, noires , blanches ocres, les fonds non peints les traits noirs curvilignes, , concaves ,les traits blanc fins, épais, tremblotants , la présence de peinture faite au doigt comme on peut le remarquer dans ce tableau , entre le mur versant supérieur et la montagne ou l’on remarque deux empreintes de doigts, tout cela montre la présence de MIRO .
Présence aussi de MIRO détaillée dans l’étude jointe par les formes ,les signes, les symboles, les calligraphies, le vocabulaire propre à Miro appelé vocabulaire MIRONIEN comme les oiseaux, le taureau, les montagnes ,les murs, le paysan catalan, le bonnet catalan,l e serpent , les sexes masculins et féminins, les yeux , les oreilles , les contours vagues des formes, les formes transparentes, la peinture sans perspective, le grattage de la peinture, dont tout cela est présent dans le tableau malgré sa toute petite taille .
Les grandes structures des tableaux de MIRO avec paysages sont souvent la même .Alexandre CIRICI qui a bien étudié la syntaxe qui régit l’utilisation des éléments dans le cadre des ensembles que sont les oeuvres écrit ;
« A partir de 1932 les tableaux de MIRO jouent sur deux ou 3 registres fondamentaux, ciel inaccessible, organismes plus ou moins anthropomorphes, terre sustentatrice et source d’énergie. La terre est présentée sous des formes diverses , aride, rocheux , quadrillage ou damier de couleur .Son rôle est de servir de support et d’insuffler de l’énergie aux groupes de caractère biologique montés sur elle .Les véritables protagonistes des tableaux sont des êtres biologiques en général anthropoides … Ces personnages occupent la partie centrale de l’ensemble et sont souvent d’un format tel que se trouve presque complètement supprimé l’espace qu’on pourrait considérer comme un fond . Ces personnages sont en général larges à leur base et très étroits vers le haut ,ce qui leur donne la forme extérieure d’un entonnoir renversé. Compte tenu du rôle de source d’énergie dévolu à la terre, il faut comprendre que cet entonnoir , comme tous les entonnoirs, recueille quelque chose dans sa partie évasée et le transmet à sa partie étroite. . Leur morphologie et leur rapport avec le support terrestre porte à penser et font sentir directement que tous ces personnages sont visités, parcourus et enflammés par un courant ascendant qui va de la terre vers le ciel »
Comme vous pouvez le constater , Cirici résume parfaitement le tableau FYI dans son volet 2. La terre présente au pied du Volcan ETNA qui est animé par MIRO comme un être anthropoide ( être vivant demiurge qui détruit et donne la vie) correspond à une forme de cône renversé qui prend son énergie de la terre au pied du volcan qui remonte dans le tube de feu jusqu’au sommet pour créer un être nouveau ( légende d’EMPEDOCLE) . l’ETNA cet anthropoide prend les ¾ de l’espace du tableau et ne laisse qu’entrevoir un fond , c’est un ciel poussiéreux terne , fuligineux et d’aube
Ce qui est important chez MIRO c’est le point de départ d’un tableau Dans le tableau FYI on remarque une demi-douzaines de taches rondes qui restent visibles en transparence par leur contour à la base de la masse du bovin et qui semble de l’essence grasse, le tout sur une feuille de carton Sali ( étude , figure 5 page 13) C’est peut- être ce qui a justifié de faire une peinture à base d’essence ,du tableau qui a fait naitre le bovin dans un environnement préhistorique qui se marie bien avec les murs millénaires des cavernes rupestres. Puis ce monde des cavernes s’est transformé en monde volcanique et l’imagination de MIRO a fait le reste par association de formes et d’idées.
Miro disait lui-même dans un entretien : « Une forme donne une idée, cette idée une autre forme et le tout aboutit à des personnages, à des animaux, à je ne sais quoi que je n’ai pas prévu »
Miro a fait un grand nombre d’œuvres majeures qui font la gloire des musées qui en possèdent , des collections et des marchands du peintre , il a fait aussi énormément d’œuvres sur des supports non conventionnels et qui peuvent paraitre secondaires mais qui aux yeux de MIRO ne sont pas moins essentielles pour le message qu’elles portent ,c’est ce qui est important pour MIRO et comme il dit : « ne pas mépriser les réalisations secondaires de mon œuvre sur papier trouvé, carton, toiles sur lesquelles je mettais mes pinceaux, c’est quelque chose que Dieu met sur la route de ma vie et sert à enrichir mon œuvre »
Voici un petit aperçu de ce qui est développé dans mon étude sur ce tableau. J’espère avoir suscité votre intérêt dans ce résumé , j’espère aussi que vous ne limiterez pas votre lecture à ce résumé et que vous aurez le temps de lire l’étude complète qui devrait vous surprendre et vous intéresser sur cette œuvre papier qui est à la fois en rapport avec ce qu’il a déjà fait depuis 1935 ( exemple La FORNARINA de 1929, paysage au serpent de 1927 , ou personnage devant la nature de 1934-1935, naissance du monde de 1927) et qui présage la suite de son œuvre après 1934 ( exemple autoportrait de 1937 et 1960, la fourche de 1963 et bien d’autres ).
FYI qui malgré sa taille et son support papier cartonné sali qui a sans doute servi au nettoyage de pinceaux pourrait malgré tout avoir une place importante dans l’œuvre de MIRO et se trouve à l’origine de tableaux importants.
En effet, l’œil explosif qui fait jaillir des étincelles de FYI dans le volet 1( œil du bovin) et volet 2 ( feu intérieur) on le retrouve dans l’œil de l’autoportrait de 1937 ou le fond de la masse centrale complexe faite de peinture à l’huile et d’essence à l’aspect fluide et dégradé on le retrouve dans certaines constellation de 1940-1941,la forme de la montagne ETNA en cône renversé avec au -dessus une tête et un mur au devant on le retrouve dans le totem, une sculpture « la fourche » qui se trouve à Saint Paul de Vence ou encore ,les cavernes rupestre qui font partie d’une série réalisée en 1973 mais aussi les calligrammes avec le nom MIRO qui forme l’image de l’oiseau de FYI que l’on retrouve dans d’autres tableaux ; Pour l’essentiel chez MIRO ce n’est pas tant l’œuvre qui compte mais la trajectoire de l’esprit , ce que cela laisse entrevoir.
Il dit : « Ce qui m’intéresse ce n’est pas le tableau mais son rayonnement, son message, ce qu’il va faire pour transformer un peu l’esprit des gens. « Le tableau en tant qu’objet ne m’intéresse pas ». Le message du tableau FYI comme vous pourrez le constater est immense et utopique ,« Purifier les âmes pour créer des hommes nouveaux pour un monde nouveau » . L’homme nouveau dans ce tableau FYI c’est le retour à l’homme originel de l’art pariétal.
Il dit aussi que son œuvre n’est pas faite pour l’immédiat mais pour les générations futures : " Plus que le tableau lui-même ce qui compte c’est ce qu’il jette en l’air, ce qu’il répand. Peu importe que le tableau soit détruit, l’art peut mourir, ce qui compte, c’est qu’il ait répondu des germes sur la terre… Il faut qu’elle laisse des germes, qu’elle répande des semences d’où naissent d’autres choses "
En conclusion de ce résumé, Ce tableau FYI de MIRO représente sa vision intérieure du futur de l’univers ou il propose un nouveau monde en naissance purifié. Il se réfère pour cela à la naissance de l’humanité de la préhistoire du temps de l’art pariétal, d’ou les deux tableaux superposés sur la préhistoire et sur le nouvel homme en cours de purification qui sort du feu de l’ETNA
Peut être que vous- même, allez vous découvrir dans ce tableau d’autres choses qui ont rapport à sa vie, sa peinture, ses préoccupations, ses passions, ses pensées ou des choses plus subjectives .
DUPIN ,qui a fait des recherches sur MIRO tout au long de sa vie disait : « Les recherches sur MIRO ne se terminent jamais car on trouve toujours quelque chose de nouveau »
Quelques paroles de MIRO me semblent importantes quand il parle de tableaux ainsi disait t’il :
« Dans un tableau on doit découvrir de nouvelles choses à chaque fois qu’on le voit- on peut regarder un tableau pendant une semaine et ne jamais plus y penser ou regarder un tableau 1 seconde et y penser toute sa vie. Pour moi un tableau doit être comme une étincelle, il faut qu’il éblouisse comme la beauté d’une femme ou d’un poème. Il faut qu’il ait un rayonnement, plus que le tableau lui-même, ce qui compte c’est ce qu’il repend…. Le tableau doit être fécond, il doit faire naître un monde …. Quelque chose de vivant. J’éprouve le moyen d’atteindre le maximum d’intensité avec le minimum de moyens, c’est ce qui a donné à la peinture un caractère de plus en plus dépouillé »
Il disait aussi « Toutes les formes ont en elles des rapports aussi rigoureux que les rapports qui lient les éléments au corps, il suffit qu’il manque un tout petit morceau à un doigt pour que ça brise toute la main…..Comme l’ensemble du corps est de même nature que le bras, qu’une main, qu’un pieds, tout doit être homogène dans un tableau. Dans les miens il y a une sorte de circulation sanguine, qu’une forme soit déplacée et cette circulation s’arrête »
Nous verrons que ces deux paroles de MIRO s’appliquent parfaitement au tableau à étudier.
L’une des réactions les plus fréquentes aux images de MIRO est de se demander leur signification. Parfois la présence d’éléments figuratifs , de tout signe reconnaissable comme dans FYI , l’œil, la tête de personnage, le mur permet de suggérer avec plus ou moins de perplexité, des réponses et la signification des images mais en général nous avons recours a des indices qui ont peu ou rien à voir avec la représentation du visible empirique.
En conséquence une des particularités des peintures de MIRO et de FYI est qu’ils provoquent une grande variété d’explications ou d’interprétations ,explications de toutes sortes dans lesquelles les rêves sont entrecoupés de fantaisies, de recours au subconscient, à la spontanéité, aux réflexions poétiques, car MIRO suggère et ne donne pas d’explications claires , seulement des indices. L’abondance d’explications révèle qu’aucune d’entre elles n’est satisfaisante et que les images sont réticentes à s’expliquer . Dupin disait justement « Les recherches sur MIRO ne se terminent jamais car on trouve toujours quelque chose de nouveau »
Pour MIRO toutes les interprétions se valent du moment que le tableau sème des germes et propose un monde meilleur. Par exemple ,Pierre LOEB ( marchand de MIRO ) relatait une discussion sur un tableau
Le regardeur : C’est un cheval n’est- ce pas ?
MIRO : oui-oui
Le regardeur : mais non c’est un oiseau !
MIRO : oui-oui
Ainsi répond MIRO toujours poli quand on lui demande une explication.
« Oui-oui, c’est libre à vous , ce peut être un chien, une femme- je ne sais pas quoi , cela ne m’intéresse pas du tout. Au moment ou je travaille , bien sûr c’est une femme ou un oiseau dans ma tête- très concrètement une femme ou un oiseau mais après c’est libre à vous »
On peut donner une interprétation au tableau FYI , comme le démontre mon étude, on peut donner une interprétation au serpent, au portrait du personnage, à l’oiseau, aux lignes discontinues , à L’ETNA; Il y a un sens dans mon interprétation mais est ce bien celui de MIRO ou n’y avait t’il pas de sens dans la peinture au moment ou il peignait le tableau ?
Ce qui compte pour MIRO il le dit dans son carnet catalan « DAPHNIS et CHLOE » en 1940 , « Ce qui compte ce n’est pas une œuvre, c’est la trajectoire de l’esprit durant la totalité de la vie, non pas ce que l’on a fait au cours de celle-ci mais ce qu’elle laisse entrevoir et ce qu’elle permettra aux autres de faire à une date plus ou moins lointaine »
Pour moi cette démarche était facile car j’ai commencé à étudier ce tableau alors que je ne connaissais rien de MIRO, Je n'avais donc pas d'images préconçues en tête des tableaux les plus populaires qui auraient pu servir de repères, alors que celui-ci est atypique. et c’est petit à petit que le puzzle s’est constitué pour me rendre compte que la présence de MIRO me paraissait évidente dans ce tableau mais cela m’a pris plusieurs années,
INDEX TABLEAU MIRO FYI du 1.02.2021
RESUME…
Etude complète tableau FYI ( Bestiaire/Etna) ........................PA 1
A‐ ETUDE HISTORIQUE FYI…........................................... PAGE 17
A1‐ Année 1934.................................................................... PAGE 17
A2‐ Marchand Pierre MATISSE....................................... PAGE 19
A3‐ Georges DUTHUIT ................................................ .......PAGE 22
A3‐1 Georges Duthuit et FYI .....................
A4‐ Henri MC BRIDE...................................................... PAGE 23
A5‐ Accueil de MIRO aux ETATS UNIS......................... .... PAGE 25
B‐ FYI‐VOLET1‐BESTIAIRE............................................... PAGE 26
B1‐ ALTAMIRA, Les cavernes rupestres ............................ ...PAGE 28
Ba‐ La masse centrale FYI............................................. PAGE 41
Bb‐ Le mur d’ALTAMIRA… .......................................... .PAGE 41
Bc‐Le Bovin‐Bovidé....................................................... PAGE 41
Bd‐ L’oiseau du volet1‐Bestiaire .................................. .PAGE 43
Be‐ Le cruel et le comique........................................... . PAGE 45
C‐ FYI‐ VOLET 2‐ ETNA…................................................. PAGE 45
C1‐ Montagne............................................................... PAGE 46
C2‐ Pourquoi l’ETNA ?................................................... PAGE 48
C3‐ EMPEDOCLE.... .................................................... PAGE 50
C4‐ HERACLITE.............................................................… PAGE 53
C5‐ RENE CHAR.............................................................. PAGE 53
C6‐ MIRO et la poésie, fragmentation, calligraphie......... PAGE 58
C7‐ ETNA, ce qui ne se voit pas !....... ............................ PAGE 67
C8‐ Destruction, Reconstruction..................................... PAGE 67
C9‐Le forgeron et le volcan ETNA................................... PAGE 70
C10‐Violence , Sacrifice et Purification ................................ PAGE 71
C10‐1 – logique du sacrifice pour arriver à l’â PAGE 72
C11‐ Le feu intérieur et extérieur du PAGE 74
C12‐ Le mur, l’Echelle................................................... PAGE 72
C13‐L’oiseau, La femme, Phenix, L’oeil......................... PAGE 76
C14‐ FYI, Art avant‐garde ,Post moderne…..................... PAGE 82 Page 1
C15‐ Les animaux chez MIRO et FYI…............................. PAGE83
C16‐ Le serpent ..................................................................... .PAGE 83
C17‐Le Paysan Catalan.................................................. PAGE 84
C18‐Les 3 parties du Tableau , Volet1 et Volet 2............ PAGE 86
D‐ETUDES DE FYI.......................................................... PAGE 87
D1‐ L’Art de MIRO dans FYI et La Morale........................ PAGE 87
D2‐ Interférence des corps et des choses....................... PAGE 87
D3‐ Le Ciel et la Terre .......................... PAGE 88
D3‐1‐ Le ciel…............................................................... PAGE 88
D3‐2‐ La terre et les formes organiques ………………… PAGE 88
D4‐Le Réel, , l’IRREL, L’AME........................................... PAGE 89
D5‐ LE Cosmos, Le ciel , La nuit et l’aube......................... PAGE 89
D6‐ Ambivance et Alternance, Optimisme, Pessimisme .... PAGE 91
D7‐ Formes et Peintures du Volet2‐ETNA....................... PAGE 92
D7‐1‐ Formes................................................................. PAGE 92
D7‐2‐ Peintures du volet2............................................. PAGE 94
D8‐ Procédés pour commencer une peinture................. PAGE 94
D9‐ Inachèvement........................................................ PAGE 100
D10‐Les doigts de l’artiste.............................................. PAGE 101
D11‐ La Main, les Doigts dans tableau FYI PAGE 101
D12‐ Lecture et Compréhension FYI, Universalité…................. PAGE 101
D13‐ Les images............................................................. , PAGE 103 PAGE 3
D14‐ FYI, Entre Fascination et Dénonciation de l’image PAGE 103
D15‐Les Figures dans FYI............................................... PAGE 103
D16‐ FYI à travers un Voile............................................ PAGE 105
D17‐ Les mouvements, Les trajectoires .............................. ....PAGE 105
D18‐ Enfance et Miro.................................................... PAGE 105
D19‐ Tableaux Médités, Spontanés, Style….................... PAGE 106
D20‐ Méditation, Réflexion........................................... PAGE 109
D21‐ FYI, le Vocabulaire, le Langage des signes.................., PAGE 109
Les Symboles MIRONIENS, les Calligramme ................ PAGE 109
D22‐Signatures , Date FYI et Contradictions................... PAGE 121
D23‐ Titres…................................................................. PAGE 124
D24‐ Langage Pictural PAGE 125
D25‐Signes interchangeable Volet1‐Volet2 ................... PAGE127
Significations différentes
D26‐ Supports .......................................................... .... PAGE 127
D27‐ Couleurs, Traits............................................. .......... PAGE 125
D27‐1 Fond.................................................. ................. PAGE 128
D27‐2 plan intermédiaire....................................... ....... PAGE 129
D27‐3 Premier plan...................................................... . PAGE 130
D28‐ Lignes, Traits...................................................... … PAGE 131
D29‐ Grattage............................................................ ... PAGE 135
D30‐ MIRO et L’Asie…........................................ ............. PAGE 138
D31‐ MIRO et la Culture Hindoue, Le Chamanisme....... .. PAGE 139 Page 4
D32‐ Les vides et les Plein............................................. PAGE 139
D33‐ FYI et la religion................................................... . PAGE 139
D34‐ MIRO, Démiurge, Divinité, Religion................... .... PAGE 140
D35‐ FYI, Peinture Thaumaturge.............................. ...... PAGE 141
D36‐Sexualité dans FYI .............................................. . .......... PAGE 142
D37‐Alternance de Pessimisme et Optimisme.......... ..... PAGE 143
D38‐FYL, La Méditerranée, La Catalogne................... ...... PAGE 144
D39‐ Sources d’Interprétation, Imagination.................. n . PAGE 144
D40‐Alternances, Allégories…................................ ....... PAGE 146
D41‐ L’œil et le Doigt… .......................................... ......... .PAGE 146
D42‐ Associer, L’Inassociable….................................. .... PAGE 149
D43‐Perspectives, Microcosme, Macrocosme… ................... . .PAGE 150
D44‐ Le Point Rouge…............................................. ...... PAGE 151
D45‐ Intemporalité…..................................... ................ PAGE 151
D46‐Mythologie.................................................. .......... PAGE 153
D47‐ Suggestion et Mouvement….............................. ..... PAGE 155
D48‐ Valeur et Valorisation de l’art…......................... .... PAGE 156
D49‐Les Œuvres et FYI................................................. .., PAGE 157
D50‐Simplicité............................................................... PAGE 159
D51‐ Le Passé, le Futur, Le Temps et FYI......................... PAGE 160
D52‐ ParadIgme, MIRO et FYI......................................... PAGE 161
D52‐ Humilité et Orgueil....................……………………… .PAGE 162
CONCLUSION…............................................................. PAGE 162
E‐Tableaux et Sculpture , Comparatifs avec FYI ............... . .PAGE 157 PAGE 5
E1‐« Il était une fois une petite PIE »….......................... PAGE 165
E2‐« Paysage au serpent 1927 »…................................... PAGE 166
E3‐ « Personnage devant la nature »…............................ PAGE 167
E5 –« LA FORNARINA….................................................. PAGE 169
E4‐« La Fourche »........................................................… PAGE 168
E6‐ « Autoportrait 1937‐1960 »….................................... PAGE170
E7‐« L »hirondelle éblouie par l’éclat de la prunelle rouge » 1925‐ 1960 Page 170
Sources livres et articles.................. . PAGE 171
SOURCES LIVRES ET ARTICLES… ............................. ..PAGE 163 PAGE 6
ETUDE COMPLETE TABLEAU BESTIAIRE/ETNA
Je fais suite au résumé du mail qui je l’espère a suscité votre intérêt pour ce tableau atypique ,
En effet, ce tableau ( FIGURE 1 page 2)ne semble pas avoir été fait pour le grand public, pas populaire sauf peut‐ être l’aspect extérieur de ce que j’ai appelé vous le verrez le volet 1 qui semble construit de manière spontanée et simplifié alors qu’au contraire c’est un tableau d’une grande complexité et la gageure c’est qu’un si petit tableau puisse contenir autant d’informations et pose un grand nombre de questions sur notre monde , son passé et son avenir ? . C’est probablement un tableau qui s’adresse à des poètes, écrivains, philosophes, ethnologues, préhistoriens, peintres d’avant‐gardes qui connaissent bien l’œuvre de MIRO et sa façon de peindre . Ce tableau ce n’est pas non plus quelque‐chose à orner sur un mur, c’est plutôt lui le mur qu’on orne, qu’on transforme en quelque chose de vivant, coté art rupestre de la peinture de MIRO.
MIRO n’est ni un peintre abstrait, ni surréaliste au sens strict mais le créateur de son propre univers aux formes et aux significations très reconnaissables , très enraciné dans la culture méditerranéenne et tournée aussi vers l’Asie. FYI ait référence à l’art Pariétal de la grotte ALTAMIRA ( Espagne) et à la civilisation grecque antique ( présocratiques) et Taoïste ( chine).
Une fois qu’on s’est familiarisé avec son vocabulaire pictural assez simple, on reconnait facilement une femme, un oiseau , une étoile, un personnage, une calligraphie , un symbole avec toutes les combinaisons qui se déclinent
DUPIN a justement noté que MIRO était dans beaucoup de ses tableaux, « un peintre pour peintre » et MIRO lui avait répondu « Oui sans me ressembler , certains peintres , je les reconnais dans le même état d’esprit , je vois que j’ai ouvert des portes » Des peintres tels que ANTONI TAPIES, et la nouvelle peinture américaines des années 30 à 50 tels que Robert MOTHERWELL, Jackson POLLOCK ont tous reconnus leurs dettes envers lui.
Pour comprendre ce tableau me semble t’il, il faut tenir compte aussi de l’imagination de MIRO, de se mettre dans la tête du peintre à travers son œuvre, sa façon de peindre et faire marcher notre propre imagination pour trouver des réponses à ce tableau car MIRO communique peu sur sa peinture, il a horreur des discussions et des longues explications verbales sur la peinture et sur son art en général. Il dit sur ce sujet : « Il m’est difficile de parler de ma peinture car elle est toujours née dans un état d’hallucination provoqué par un choc quelconque ou subjectif dans lequel, je suis irresponsable , quand à mes moyens d’expression je m’efforce d’atteindre de plus en plus le maximum de clarté , de puissance et d’agressivité plastique, c’est à dire d’abord une sensation physique pour arriver ensuite à l’âme. »
Ce tableau est un univers ou plusieurs mondes , civilisations ,se côtoient sans temporalité et sans espace ( préhistoire, civilisation grecque ancienne, époque contemporaine) . Plusieurs personnages , créatures, natures coexistent dans le même tableau ( caverne préhistorique, Montagne ETNA, mur, serpent, paysan catalan, monstres). Leur rencontre n’est possible que face au tableau. Dans ce tableau on démarre des origines de l’humanité ( art pariétal des cavernes préhistorique jusqu’à la période contemporaine en passant par la civilisation grecque ancienne et chinoise ,Cette civilisation contemporaine de MIRO de 1935 qui semble bien mal en point ( guerre civile espagnole et prémisse d’une guerre généralisée déjà pressentie par MIRO). Dans ce tableau MIRO se pose en DIEU avec le seul moyen dont il dispose , la peinture, pour détruire le monde actuel et de le reconstruire à ses origines pour prendre un chemin différent afin de ne pas se retrouver de nouveau dans une impasse Pour cela il faut reconstituer l’homme nouveau auquel il aspire
Dans ce tableau il y a une inscription en bas à gauche avec 3 lettres « FYI ». En langue anglaise cela signifie
« FOR YOUR INFORMATION » ( figure 2 page 7)
PAGE 7
Fondation MIRO BARCELONE LOGO
FIGURE 2
Cela donne déjà un indice qui semble dire que ce tableau était destiné à un américain ( nous verrons par la suite qu’il aurait pu être offert à Howard PUTZEL, à Marcel DUCHAMP, Georges DUTHUIT ou quelqu’un féru d’art pariétal , d’art grec ou de philosophie pré socratique) . Ensuite il y a un deuxième indice à gauche de l’inscription FYI qui est une composition du vocabulaire de base de MIRO formé de 3 bases géométriques élémentaires que l’on retrouve dans un grand nombre de tableaux de MIRO parfois dans des dispositions différentes ( le sigle commercial de la fondation MIRO est à l’identique, figure ) . Ce signe n’est pas anodin, c’est certainement un indice mis là par MIRO pour nous orienter dans la compréhension du tableau , pour découvrir la signification du tableau sans que MIRO ait besoin de de décrire verbalement. Nous verrons dans la suite que ce tableau a 2 volets et chapeaute toute l’histoire de l’humanité depuis l’époque de l’art pariétal jusqu’à l’époque contemporaine de MIRO qui annonce un grand changement avec entre deux, l’art phénicien, l’art chinois ancien et la période présocratique avec des références à EMPEDOCLE et HERACLITE, vaste programme pour un si petit tableau !
MIRO a fondé son œuvre sur l’inspiration mais l’a construite de l’intérieur en se basant sur son expérience personnelle et sociale. Il a peint son monde intérieur bien qu’il l’ait généralement fait après avoir reçu son inspiration sensible de l’extérieur qui peut être l’art Européen des grands Maîtres comme BRUEGLE, BOSCH, STEEN, RAPHAEL ( Intérieurs hollandais) .
« En comparant ses tableaux avec leurs prototypes dans l’art Européen, on identifie aisément leurs Composantes conceptuelle qui est pour MIRO une méthode de traduction de la réalité dans son langage formel et une façon d’assembler ses éléments dans des compositions denses et stables.
De la même manière son œuvre révèle des liens directs avec des mouvements de l’art préhistorique et antique qu’il a étudié en profondeur et qu’il cherche à interpréter. »
Ces phrases de DIMITRI OZEKOV ci‐dessus, reprises dans le catalogue d’exposition sur MIRO « L’essence des choses passées et présentes » ci‐dessus s’adaptent parfaitement au tableau inédit FYI que je vous soumets. Le volet 1 ( bestiaire) de FYI nous met en relation avec la GROTTE ALTAMIRA dont il nous donne une Interprétation et nous rappelle ce qu’il avait dit « La peinture est en décadence depuis l’âge des cavernes » Quand au volet 2 ( ETNA) c’est son interprétation à travers la Montagne ETNA de la philosophie Présocratique d'EMPEDOCLE et HERACLITE qu’il reprend dans la légende ou non d’EMPEDOCLE pour détruire ce monde en perdition selon MIRO dans lequel nous vivons pour revenir aux origines de l’homme de l’art pariétal avec sa pureté afin de prendre une nouvelle direction et ne pas aboutir de nouveau au monde d’aujourd’hui
Toujours de DIMITRI AZEKOV dans le même catalogue d’exposition , ce qu’il nous dit s’adapte aussi parfaitement à la gouache FYI. Que dire de mieux pour expliquer ce tableau inédit FYI ?
« Sur le plan technique, les œuvres de MIRO sont parfaitement abouties ; sur le plan sémantique, elles sont parfaitement sérieuses (même si elles sont utopiques et une vue de l’esprit ). Lorsqu’une peinture ou une sculpture acquiert ses contours physiques et son caractère individuel , elle devient animée , faisant surgir un nouveau monde. La naissance de chaque nouvelle vie secrète et autonome a pour MIRO une importance infinie. Il en parle dans une interview en 1959 , « le tableau doit être fécond, il doit faire naître un monde » , « plus que le tableau lui-même , ce qui compte , c’est ce qu’il jette en l’air, ce qu’il répand » « je m’efforce de plus en plus d’atteindre le maximum de clarté , de puissance et d’agressivité plastique, c’est-à-dire de provoquer d’abord une sensation physique pour arriver ensuite à l’âme »
Dans FYI, Ses couleurs, ses signes et ses symboles reflètent des images très anciennes. Dans FYI volet 1, Il se met dans les conditions de l’homme des cavernes et tend ainsi à se considérer comme un créateur au même titre que les maîtres inconnus du temps de l’art pariétal et de la naissance de l’art et perçoit l’art de l’antiquité sur le même pied que le sien . Il utilise librement les techniques des peintures rupestres ( voir études ci‐dessous), il est touché par ces formes d’art très peu étudiées, qui sont nés naturellement et qui s’ouvrent naïvement au monde ( le monde animal et végétal)
.Dans ce tableau FYI Comme pour ses amis poètes René CHAR et APOLLINAIRE, MIRO n’a pas accepté de réduire son niveau d’exigence pour favoriser la compréhension alors que paradoxalement au premier abord visuellement ce tableau à un aspect spontané et fait à la manière d’un enfant , La masse centrale grossière fait penser à un bovin caché partiellement par un mur mais en grattant un peu ce premier regard qu’on peut avoir , ce tableau présente une force incroyable etOn a jamais fini de pouvoir l’interpréter et d’en faire le tour et comme avait dit DUPIN « Les recherches sur MIRO ne se terminent jamais car on trouve toujours quelque chose de nouveau »et aussi « Dans un tableau on doit découvrir de nouvelles choses à chaque fois qu’on le voit »
Comme ses tableaux BLEU 1‐2‐3 de 1961 , dans FYI, MIRO ne livre qu’une partie du tableau du regard , c’est la tête du bovin et le mur qui sont la vision la plus immédiate du tableau. C’est dans un deuxième temps qu’on sépare une tête d’oiseau du bovin puis qu’on découvre la terre et la montagne et tout ce qu’à voulu dire MIRO dans son for intérieur pour donner un deuxième sens au tableau qui semble totalement différent du premier sens, nous le verrons dans le déroulement de l’étudeAinsi en est‐il dans ce tableau FYI. Les deux supports qui structurent cette œuvre FYI a partir desquels il a crée son monde à lui sont :
PAGE 8
PAGE 9- Dans volet 1 : le plafond de la grotte ALTAMIRA ( FIGURE 2 Page 10)
‐ Dans volet 2 ;Le VOLCAN ETNA vu du versant du côté du mur de la « tour du philosophe » EMPEDOCLE.( FIGURE 2 et 3 page 10-11)
Deux structures et aussi deux niveaux de compréhensions sont présents
‐ Dans volet 1 : niveau facilement compréhensible extérieurement avec Tête de BOVIN
‐ Dans volet 2 ; niveau plus difficilement compréhensible car s’adressant plus particulièrement a des personnes connaissant la philosophie présocratique, chinoise et les religions
Plafond de la grotte ALTAMIRA
FIGURE 4
La date indiquée sur la gouache FYI est 3 mai 1935. En 1935 comme pendant toute la période dite sauvage de MIRO de Fin 34 à 38 , MIRO aimait à exalter les matériaux les plus ingrats et les plus divers comme le papier et carton usagé le cuivre, la masonite . C’est ce genre de matériau que le peintre prend comme support de cette œuvre FYI qui est un papier cartonné couleur ocre terreux
Pour démarrer ce tableau, le peintre est peut être parti de taches existantes sur ce support cartonnémaculé que MIRO a déjà utilisé pour nettoyer ses pinceaux ( figure 5 page 11) ( voir au verso du tableau, il a des traces de pinceaux à nettoyer ). Il aurait donc eu l’idée de prendre un morceau de papier cartonné sali qui avait la couleur ocre terre du carton qui correspondait bien à ce qu’il voulait en faire un plafond de caverne rupestre comme nous le verrons
PAGE 11
TACHES visibles en projetant un faisceau De lumière très concentré sur la peinture A l’emplacement des taches d’essence non visibles à la lumière du jour
Donc selon une idée non préconçue, Il serait parti de taches d’essence de térébenthine pures présentes sur le recto du tableau à créer, encore visibles sur celui‐ci même à travers la peinture qui a été apposée dessus par la suite ( Figure 5 page 11) . La peinture utilisée pour le tableau était sans doute mélangée à de l’essence de térébenthine qu’il a fixé sur les ¾ du carton. Il a créé une masse aux bords arrondis et à la forme sommaire d’une tête d’animal, un Bovin ,comme ceux qu’on trouve de manière plus détaillée et précise
sur le plafond de la grotte paléolithique d’ALTAMIRA en Espagne du nord, dont il aurait vu les reproductions dans des magazines, des cartes postales , des études ou des articles sur la préhistoire.
Le sujet des grottes était devenu très à la mode depuis les années 20 et 30 suite aux travaux de l’abbé BREUIL et FROBENIUS. Cette tête de Bovin était faite à la manière d’un enfant mais pas enfantin, c’est‐à‐ dire sans tenir compte de l’évolutionnisme de l’art de la peinture .Il s’est mis dans la tête d’un homme des cavernes rupestres comme s’il n’avait pas de référence antérieure mais pour MIRO la grotte n’est pas seulement le site de la peinture d’une pureté originelle mais le lien d’une activité continue, pratique , génératrice de formes au cours de laquelle l’artiste antique agit avec la nature afin d’atteindre une créativité libre qui frappe l’imagination et qui semble avoir été l’apanage des anciens. MIRO disait ;
« Dans mon cas il me faut cesser d’être MIRO , c’est-à-dire un peintre espagnol appartenant à une société limitée par des frontières, par des conventions sociales et bureaucratiques. En d’autres termes il faut aller vers l’anonymat »
Dans FYI, Arrivé aux oreilles de l’animal préhistorique, il les a métamorphosé de manière à réaliser une calligraphie en forme de M le M de Miro Dans le creux du M il a placé un œil rond immense qui épouse le creux , l’œil de MIRO ( Figure 6 page 12). Il y a rajouté un autre œil en forme d’amande sur la gauche.
L’ensemble indépendant des yeux et le M de Miro prend la forme d’une tête oiseau non soudé donnant l’image d’un oiseau inquiétant de mauvaise augure prenant l’aspect de la tête d’un hibou ou Chouette oiseau de nuit à tête aplatie ( FIGURE 6, page12). Dans le chapitre ci‐dessous se rapportant à la calligraphie, nous verrons que la tête de l’oiseau forme un calligramme des lettres MIRO(FIGURE 7 page 13)
De cette tête aplatie sans front ni crâne ainsi formée, on remarque un bec formé par le jambage du M calligraphié qui prend l’aspect d’un sexe féminin et à droite l’autre jambage forme l’oreille énorme de l’oiseau. Ces deux éléments sexe féminin et grande oreille sont présents très souvent dans les tableaux de MIRO. Ils font partis des signes de base de MIRO .
Miro place très souvent le sexe féminin dans ses toiles, symbole de la création et de l’enfantement et l’oreille énorme dans des endroits dont on ne penserait jamais comme dans le tableau « terre labourée » au sommet d’un arbre. L’oiseau ainsi formé a aussi la forme d’un sexe masculin
Oiseau au sommet du crâne du bovin
FIGURE 6
PAGE 12
calligraphie sous forme de calligramme « MIRO »
FIGURE 7
page 13
Devant cette masse de Tête de Bovin, le peintre place un mur sans doute dans un premier temps pour équilibrer la masse centrale du Bovin à la manière du tableau « peinture de 1927 ( figure 8, PAGE 14 ) mais qui trouve sa place aussi comme mur d’entrée de la caverne rupestre d’ALTAMIRA.( figure 4 Page 11).Ceci étant, le mur posé, le bovin aux grandes oreilles , aux petits yeux noirs , aux naseaux et à la bouche visibles par des lignes blanches ondulées , le sommet du crâne du bovin subi une transformation .Un oiseau de nuit ( chouette à la tête plate ) semble se placer au sommet du crâne du bovin, le tableau subi alors une transmutation radicale .
Peinture1927 (renversé à 9O°) FYI
Masse centrale et masse sur coté pour équilibrer le tableau
FIGURE 8
L’ensemble de la tête de l’oiseau qui se fond dans la masse centrale du bovin est pourtant fait de peinture différente, peintures pures de bleu de vert sans être mélangé à de l’essence comme le reste de la peinture ce qui donne un aspect plus épais que le reste du tableau. Cette différence avec le reste du tableau signifie que l’on passe à un autre tableau
Cela aurait pu en rester là , tableau représentant le plafond de la grotte d’ALTAMIRA mais ce n’est pas du gout de MIRO de faire un tableau qui soit vide de sens sinon de représenter une figure d’un animal préhistorique où à la manière d’un allien ,sort de son crane un être ( oiseau) à la fois monstrueux et humoristique .
Il faut savoir qu’une fois un tableau terminé, Miro ne le reprend jamais ultérieurement pour le compléter mais très souvent un tableau réalisé lui donne des idées comme point de départ d’un autre tableau Il n’y a jamais de reprise d’un tableau existant pour le compléter ,quitte à le laisser en l’état non terminé. Dans le cas de FYI , un autre tableau est superposé au précédent sans rien supprimer du 1er
La grande particularité de ce tableau que j’ai appelé FYI dont le sujet premier est le plafond de la grotte d’ALTAMIRA avec son dessin enfantin de BOVIN e t le mur de la grotte ,seront le point de départ d’un autre tableau dans le tableau FYI et donc un deuxième volet que j’ai appelé ETNA, le premier volet étant appelé BESTIAIRE
Ce point de départ pour le deuxième volet pourrait venir de l’oiseau si inquiétant à la forme d’une chouette qui apparait dans un premier volet au sommet du crâne du bovin .
C’est alors que le tableau semble subir une transmutation, le bovin se transforme en Montagne ( L’ETNA) Les paysages montagneux sont très souvent présents dans les tableaux de MIRO , points de repères des paysages de son enfance où il se ressourcera toute sa vie c’est‐à‐dire MONTROIG. Il n’est pas inutile de dire aussi que pratiquement toutes les peintures avec paysages de 1935 sont des paysages de montagne (Personnage devant la nature, homme et femme devant un tas d’excréments etc)
Il y a donc une métamorphose qui se produit,
la montagne volcanique de L’ETNA remplace le bovin, Ce qui était le mur de la
caverne se transforme en un mur au pied du volcan. il n’en faut pas plus pour
que son imagination active et débordante lui fasse penser a des lectures des
philosophes grecs présocratiques dont il avait été initié de leurs philosophie
par le peintre MASSON et ses amis écrivains qu’il fréquentait quelques années
plus tôt rue BLOMET à PARIS. A partir de là , on peut imaginer que le peintre
met en image la légende du philosophe présocratique EMPEDOCLE pour étayer ce
deuxième volet ETNA de FYI qui sera développé ci‐dessous
page 14
La grande singularité de ce tableau c’est qu’il a la particularité de représenter deux tableaux en un seul par simple superposition. Le peintre n’a rien enlevé pour faire le 2eme tableau il l’a juste superposé au premier. Ce n’est pas un cas unique chez MIRO , il y a beaucoup d’autres exemples comme
« l’autoportrait » de 1937 et celui de
1960 ( Figure 9 page 15)ou tableau «
l’hirondelle éblouie par l’éclat de la prunelle rouge » ( Figure 9 page 15) de 1925 et celui
transformé en 1960 ou encore « souvenir d’un poème »de 1940 ou les deux dessins
sont superposés l’un avec des lignes fines l’autre plus épaisses . Il est aussi
parti de reproductions de tableaux n’étant pas de lui, soit de peintres connus
comme COROT ou de peintres pompiers inconnus pour y rajouter au ‐dessus sa
peinture.
Autoportrait 1937+1960 HIRONDELLE EBLOUIE PAR L’ECLAT DE LA PRUNELLE ROUGE 1925‐1960
SOUVENIR D’UN POEME 1940‐1941
FIGURES 9
Ce tableau nous entraine donc de la préhistoire avec les cavernes rupestres à la période contemporaine de MIRO en passant par la Grèce antique de EMPEDOCLE et HERACLITE Tout cela dans un si petit tableau.
Dans ces peintures pariétales si chères à MIRO, il n’y a pas de limites spatiales temporelles et les artistes des générations suivantes peignaient souvent les images par‐dessus le travail de leurs prédécesseurs brouillant leurs visibilités au cours du temps ainsi ,de même dans FYI , le volet 1( bestiaire) et le volet 2 ( ETNA) se superposent et entre les deux images des siècles les séparent de la préhistoire à la civilisation grecque ancienne jusqu’à la période contemporaine et ici sans brouiller la visibilité , Chaque figure , chaque couleur de peinture , le support de la peinture ont tous leurs significations adaptées à leur époque ,il n’y a rien à soustraire, a rajouter et ont chacun leur sens propre, c’est le génie de MIRO.
Le mur de la caverne rupestre du volet 1 se transforme en mur de la tour du philosophe EMPEDOCLE du volet2, le Bovin du volet 1 est transformé en Montagne ETNA du volet 2, Le plafond de la caverne de L’ALTAMIRA du volet 1 est transformé en ciel fuligineux par les poussières du volcan . le signe en bas à gauche du volet 1 qui pourrait représenter un arc de chasse avec sa flèche droite ( figure10 page 16) à coté correspond à une calligraphie chinoise ou un signe du vocabulaire grec ancien qui signifie dans le vocabulaire phénicien « le taureau » ( Figure 11 page 16 )
page 15
FIGURE 11
Le tableau que j’ai appelé FYI en raison de ces 3 lettres indiquées en bas du tableau et qui demandent un paragraphe d’explication que vous trouverez ci‐dessous peut être divisé en 2 tableaux distincts dont chaque partie sera étudiée séparément
Pour le premier volet il sera dénommé BESTIAIRE Pour le deuxième volet il sera dénommé ETNA
Ce qui est extraordinaire dans ce tableau FYL très réduit que j’étudie depuis plusieurs années c’est que j’arrive encore aujourd’hui à découvrir de nouveaux aspects que je rajoute continuellement à mon étude et qui semble sans fin.
Même DUPIN , grand spécialiste et expert qui a fait des recherches sur MIRO jusqu’à la fin de sa vie disait :
» les recherches sur MIRO ne se terminent jamais car on trouve toujours quelque chose de nouveau.
Miro disait lui‐même : Dans un tableau on doit découvrir de nouvelles choses à chaque fois qu’on le voit, on peut regarder un tableau pendant une semaine et ne jamais plus y penser ou regarder un tableau 1 seconde et y penser toute sa vie, pour moi , un tableau doit être une étincelle, il faut qu’il éblouisse comme la beauté d’une femme ou d’un poème, ce qui compte c’est ce qu’il repend…. Le tableau doit être fécond, il doit faire naître un monde… quelque-chose de vivant. J’éprouve le besoin d’atteindre le maximum d’intensité avec le minimum de moyens, c’est ce qui a donné à la peinture un caractère de plus en plus dépouillé »
Ce tableau FYI : BESTIAIRE/ETNA va tout à fait dans ce sens exprimé par MIRO , toute cette étude le démontre Comme indiqué au bas du tableau à droite, 3 mai 1935 (Figure 123 page 16) il se situe juste dans sa période dite sauvage qui va de octobre 1934 à 1938 et ses marchands exclusifs sont Pierre LOEB et Pierre MATISSE à New YORK ( contrat signé avec PIERRE MATISSE en Avril 1934, pour les ETATS UNIS à raison des 2/3 de sa production totale).
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La nonchalance heureuse, les illusions des années 20 sont bien finies, il n’est plus possible d’ignorer le fatal engrenage dans lequel le monde s’est engagé. Son pays l’Espagne en proie à la brutalité s’engage vers une guerre civile dont MIRO ressent les soubresauts alors qu’on pouvait logiquement estimer que la route de MIRO était tracée et que son génie d’inventeur de formes et de coloriste allait pouvoir s’épanouir sur les assises des découvertes précédentes, un soudain changement qui prend l’allure d’un cataclysme vient bouleverser son art en 1935 , c’est une éruption volcanique.Miro réagit en visionnaire. Pour lui le monde va à sa perte et c’est toujours d’actualité aujourd’hui.
C’est le sujet de ce tableau FYI – volet 2 ‐ETNA, Il imagine la purification des âmes par le feu du volcan ETNA en reprenant la légende de l’immolation de EMPEDOCLE pour purifier les âmes et pour permettre un retour à l’homme originel des cavernes rupestres et à son art pariétal .Pour lui l’art pariétal n’a jamais été dépassé Ce tableau reflète donc bien le MIRO de cette époque d’incertitudes et de sa quête vers le retour dans l’esprit de l’homme originel et il utilise dans son imagination délirante , qui pourrait passer pour de la folie si ce n’était pas de MIRO ,sa façon de purifier des âmes .Bien sûr comme beaucoup de tableaux de cette époque le tragique , la violence et l’humour font bon ménage mais son fond de pessimisme perdure.
A ‐ ETUDE HISTORIQUE de FYI
Il faut se rappeler qu’en 1935 MIRO sort d’une période 1928‐1931 appelé par DUPIN « assassinat de la peinture » ou apparaissent des œuvres violentes, destructrices pour la peinture qui est dans la lignée de son adhésion au groupe DADA mais contrairement à son compagnon de peinture DUCHAMP qui lui arrête la peinture , MIRO continue dans l’optique d’une peinture ‐poésie et peinture pour créer la vie et changer le monde. Il utilise des moyens imagés rejetant la représentation et faisant des expérimentations avec la peinture comme matière et geste
A1‐ Année 1935
Le tableau FYI est daté du 3 mai 1935 ( Figure 71 page 123).A cette époque MIRO réside à BARCELONE, il y restera de Janvier à juin ,il fait quelques brefs séjours à PARIS et il passe l’été à MONT ROIG avec sa famille jusqu’au mois d’Octobre.
Depuis le début des années 30 ,la crise de 1929 affecte encore le marché de l’art comme tous les secteurs de la vie économiques. En 1934 . Pierre LOEB, marchand de MIRO, qui avait l’exclusivité des ventes se trouve dans l’impossibilité d’acheter toutes les toiles de MIRO. Dans un premier temps il s’adresse à ZERVOS directeur de la revue d’art « Les cahiers d’art » pour le soutenir récemment acquis au travail de MIRO. En Mai 1934 , les époux ZERVOS allaient publier un numéro spécial des « cahiers d’art » sur MIRO . La revue d’art rapporte les travaux de FROBENIUS et l’abbé DE BREUIL grands ethnologues et préhistoriens qui sont les référents de MIRO. Pierre LOEB s’adresse aussi à Pierre MATISSE pour le soutenir .
En Avril 1934 MIRO signe un contrat d’exclusivité avec son Marchand Pierre MATISSE pour les ETATS UNIS et Pierre LOEB pour la France et l’EUROPE, PIERRE MATISSE obtient les ¾ de la production.
Alors qu’on pouvait s’attendre à ce que la peinture de MIRO allait s’épanouir sur les assises de sa peinture Précédente, à partir d’Octobre 1934 un soudain changement prend l’allure d’un cataclysme et vient tout Bouleverser. « A la domination des formes et des signes qu’il venait d’atteindre succède un déchainement Expressionnistes des formes les plus instinctives de la subjectivité . C’est une éruption volcanique» dans un pays qui semblait tranquille, un coup de tonnerre dans un ciel serein et un orage qui emporte tout sur son passage et menace l’édifice de l’œuvre jusqu’à ses fondements . Que s’est t’il passé ? Dans la vie du peintre rien n’a changé . Si quelque chose a changé c’est le monde.
L’euphorie , la nonchalance heureuse des illusions des années 20 sont bien finies, il n’est plus possible d’ignorer le fatal engrenage dans lequel le monde est engagé
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Nous verrons que ce tableau marque donc une transition nette entre les collages de 1933 et les tableaux dits sauvages depuis Octobre 1934
Cet état d’inquiétude, d’agression, de tragédie, de monstruosité , de malaise que l’on ressent dans les tableaux de 1935 et FYI en particulier est du à l’instinct visionnaire de MIRO . Sa sensibilité lui fait ressentir avant les autres créateurs le déchirement des hommes, la montée des intolérances et des assassins.
L’Espagne est en proie à des manifestations populaires qui sont réprimées dans le sang et annonce une guerre civile que MIRO redoute déjà à l’avance et que cette guerre civile redoutée soit le reflet de catastrophe mais aussi il l’espère d’espoir d’une réaction du monde entier en créant un électrochoc
L’Allemagne aussi donne des signes d’inquiétude avec la montée du nationalisme et MIRO le visionnaire y voit une guerre généralisée qui se profile à l’horizon.
Devant les intolérances, les difficultés de la vie, comme ses amis PICASSO, GIACOMETTI et les leaders des mouvements modernes, MIRO croyait qu’on pouvait être révolutionnaire et rendre les hommes plus libres en écrivant des poèmes, en peignant des tableaux, en réalisant des sculptures ou des bâtiments sans avoir besoin d’utiliser d’autres armes. Les événements du monde extérieur ont influencé de manière décisive le cours de sa pensée dans son action et dans ses œuvres artistiques. Il pensait pouvoir régler les contradictions entre la libération de l’esprit et la libération sociale en pensant que la première devrait précéder la deuxième ou tout au moins être parallèle. MIRO voit qu’il a un rôle non pas politique, monde dont MIRO se méfiait, mais social à travers ses peintures et non pas l’art pour l’art, mais un rôle de peintre pour transformer la société en un monde utopique de bonheur pour libérer l’individu de son aliénation.
Comme le peintre TAPIES il défend une théorie de l’art révolutionnaire en tant que libérateur de l’esprit et promotion de la démocratie. Il revendique la liberté formelle, complète et absolu de l’artiste.
Dans son travail Miro souhaite que le spectateur apprenne à regarder son travail, à développer son autonomie. Cela ne le gêne pas que le regardeur ne comprenne pas ses idées ou ne sait interpréter ses signes , il pense que cela viendra plus tard . L’important pour lui c’est de permettre aux germes de pousser. Il veut être le médiateur entre le spectateur et le monde pour faire naitre dans l’esprit qu’un nouveau monde doit remplacer celui existant sous peine de disparition. Il compte sur la puissance universelle de l’image au service des idées.et pour cela il utilise souvent des métaphores.
En revanche pour garder son indépendance par rapport a tout engagement politique MIRO refusera d’être un membre militant, refusera le culte des groupes ce qui provoquera son éloignement par rapport aux surréalistes et BRETON en particulier ainsi que des intellectuels plus directement engagés
Le tableau FYI n’est rien d’autre que cette vision de MIRO que son imagination met en images.
Déjà, le tragique et l’inquiétude sont bien là dans le tableau FYI . Dans le « volet 2 »la tête d’oiseau fait plus penser à un monstre qu’à un oiseau paisible, le serpent avec la gueule ouverte est en position d’attaque pour dévorer le personnage de droite (paysan Catalan),et le paysage volcanique ( l’ETNA) s’étend sur une grande partie du tableau avec un aspect sombre qui n’inspire plus la sérénité comme elle pouvait l’inspirait quand on ne s’en tenait qu’au bovin de caverne rupestre du « volet1 ». Le volcan ( ETNA) est supplicié, Il donne la mort, brûle les corps, les disloquent pour aboutir à sa fonction de purification des âmes, cela sera vu en détail dans le paragraphe appelé ETNA.
Dans ses peintures de 1935 comme dans FYI, MIRO va faire surgir des monstres qui vont remplir l’espace tout entier, le monstrueux est partout, il occupe tout le champs du regard comme le signe d’une catastrophe universelle
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Dans FYI, le tableau retrace toute l’histoire de l’humanité depuis le cavernes rupestres jusqu’à notre époque contemporaine. Il a la particularité de superposer deux tableaux en 1 sans avoir rien supprimé pour passer d’un tableau à l’autre. Nous verrons dans FYI la douceur des cavernes rupestres dans le premier tableau et la cruauté du 2eme tableau qui prône l’immolation de l’homme par le feu du volcan ETNA pour retrouver finalement la pureté originelle de l’être humain et retour donc au premier tableau dans un cycle infini.
Pour DUPIN la cruauté dont il fait preuve ne s’exerce pas sans ironie, sans autodestruction, sans humour sans habileté, ni ruse sans perversité … Il est allé dans ses peintures sauvages jusqu’aux approches de la folie. La nature suit MIRO dans son infortune et l’accompagne dans son délire. Le paysan catalan du tableau dont on aperçoit le visage en transparence en bas à droite subit les montres ( serpent). C’est l’univers entier de MIRO qui hante le spectre des futures catastrophes.
En ce qui concerne la façon de travailler sur le tableau FYI, il semble que le peintre continue la même méthode qu’avec les collages précédents de 1933. Dans ses collages il travaille sans idée préconçue, il commence à coller dans un endroit quelconque de la toile, une image détachée d’un catalogue ou d’un journal parfois une carte postale, Celle‐ci l’amène à dessiner une forme puis d’autres formes et d’autres images tout en cherchant le mouvement et l’équilibre du tableau, . Il ne se sert de l’image que comme motif d’action
Dans FYI , Sans doute est ’il parti pour créer son tableau de plusieurs taches d’essence et de graisse visibles sur le tableau , traces laissées suite au nettoyage de pinceaux à l’essence ( figure 5 page ). Cela lui a peut‐être donné l’idée de mélanger de l’huile et de l’essence pour faire cette masse centrale du tableau sans idée préconçue, une forme de tête de taureau en est sorti de façon sommaire et ainsi de suite, le tableau s’est construit , ses idées et son imagination ont alors orienté de façon volontaire sans le hasard du premier coup de pinceau jusqu’à ce que l’équilibre du tableau et l’expression poétique arrive à son terme .
En 1934 MIRO abandonne les aplats de couleurs, l’écriture cursive et les couleurs pures. Selon Jacques DUPIN
« Au cours de l’hiver et printemps 1934, MIRO expérimente, dessine, conduit toujours plus loin mais aussi plus surement , ses recherches et ses fouilles … Il saisit un monde dans l’instant de sa naissance, de son bourgeonnement… » FYI correspond bien à cette recherche à ses fouilles pour la naissance d’un monde meilleur . L’image nous montre la transformation d’un être perdu et perverti ( symbolisé par l’oiseau de mauvais augure du tableau FYI) qui doit renaître purifié après sa destruction par le feu de l’ETNA suivant l’exemple du philosophe grec antique EMPEDOCLE
A2‐LE Marchand PIERRE MATISSE
Ce tableau signé de MIRO le 3 mai 1935 est sans doute parti chez son marchand PIERRE MATISSE en 1935 dont le contrat avait été tout fraichement établi en AVRIL 1934. Cette hypothèse est justifiée par le numéro 362 ( Figure 13, page 20qui se trouve au dos du tableau . Cette numérotation semble correspondre aux numéros de mis en stock des tableaux reçus de MIRO pour Pierre MATISSE en 1935 ( voir état des stocks joints).(FIGURE page 20)
Dans l’état du STOCK physique de MATISSE écrit de sa main en 1935 apparait bien un numéro 362 )mais ce n’est pas le tableau FYI. ( figure 13 page 20)Le tableau 362 nommé par MATISSE « personnage devant la nature » (figure 15 page21) est un tableau créée au début de 1935 par MIRO il faisait partie d’une série de tableaux sur carton Ce tableau 362 a été acheté par le galeriste et marchand HOWARD PUTZEL en Juin 1935 , directeur de la galerie STANLEY ROSE de Los Angeles et revendu en décembre 1935 au collectionneur Walter C Arensberg . Il a rejoint le Philadelphia Museum of art en 1951 suite à un don des époux ARENSBERG avec toute la collection léguée au musée sous le contrôle de MARCEL DUCHAMP
‐
FIGURE 12
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Les chiffres indiqués du dos du tableau et l’écriture des chiffres des feuilles de stock de la galerie MATISSE ; semblent identiques. C’est probablement l’écriture de Pierre MATISSE
page 20
Rapprochement des deux tableaux 362 de 1935 « personnage devant la nature » et « FYI »
Ces deux tableaux ont été réalisés pendant la période dite sauvage qui a débuté en octobre 1934. Ces deux tableaux sont habités par des monstres agressifs : Tête de reptile et corps de chévre ( Dragon) en haut pour l’un, serpent en bas pour l’autre. Dans les deux tableaux, ces monstres attaquent un personnage situé en bas à droite, Ce personnage est un Gnome pour « Personnage devant la nature » et un paysan Catalan portant la coiffe du paysan catalan dans « FYI » ( FIGURE 15, page 21)
Dans « Personnage devant la nature » c’est un paysage de montagne volcanique, le fond est rouge de la couleur du sang ou du feu des volcans et dans FYI le paysage est une montagne volcanique l’ETNA, le fond a la couleur fuligineuse de la poussière du volcan
Dans « Personnage devant nature » les deux pieds de la chèvre monstrueuses a tête de reptile sont bien ancrés dans le sol , métamorphose d’êtres malfaisants qui remontent en surface. On voit en transparence du dragon le sang de la terre qui remonte comme la sève d’un arbre ( couleur rouge par le pieds à droite ) , une transformation a lieu dans le corps du dragon pour purifier cette terre qui enfante des monstres , cette transformation purifié redescend par le pied à gauche ( couleur jaune). Dans FYI l’oiseau de mauvais augure descend dans le cratère du volcan pour subir le feu du cratère dans la destruction pour recréer un être pur ( l’intérieur du cratère nous montre en transparence cette destruction par des lignes courbes ouvertes en fragment de cercles qui éclatent pour se reformer pour une purification, ces fragments de cercle représentent des fragments de corps qui imagent ,la philosophie de EMPEDOCLE qui sera étudié dans le chapitre ci‐dessous sur EMPEDOCLE)
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Sur un autre état de STOCK dactylographié il apparait 362‐111 qui a été barré à l’encre rouge ( figure 14 page20)cela montre bien qu’il est rentré et sorti du stock en 1935. Les fiches de stock de MATISSE font partie des archives qu’à bien voulu me transmettre Mme Isabel MOLESTINA de « THE MORGAN LIBRARY » qui possède les archives de la Galerie PIERRE MATISSE de New York
Si FYI qui porte aussi le numéro 362, n’apparait pas dans le stock physique , l’achat et la réception par MATISSE de FYI a du se faire en même temps que 362‐111 « personnage devant nature « vu la date de réception du tableau 362 ‐111et sa vente en juin1935 ,c’est sans doute que ce petit tableau n’était pas destiné à la vente mais qu’il aurait probablement été offert sous les directives de MIRO. Il n’apparait donc pas dans le stock physique car il n’a pas de valeur marchande pour la vente. En effet dans ce stock physique vous remarquerez que chaque tableau à une valeur marchande en face.
Il n’était pas rare que MIRO ou MATISSE fassent des cadeaux de tableaux de MIRO à certains amis ou personnes influentes pour la diffusion de l’œuvre de MIRO surtout en Amérique, ce nouveau marché en plein développement développé par Pierre MATISSE son nouveau marchand officiel .
Par exemple, Le 7 Février 1934, Miro avait envoyé une lettre a MATISSE lui demandant d’offrir une peinture à Henri MC BRIDE, critique d’art Américain « je me ferai un plaisir d’expédier une peinture à Mc BRIDE en preuve d’amitié de sympathie » Un autre tableau , une gouache a été offert à MC BRIDE en 1934 c’est relaté dans une autre lettre du 11/6/34 à MATISSE « Voudriez-vous me donner l’adresse de MC BRIDE et me dire s’il est à NY pour lui expédier une gouache que je garde pour lui.
Le premier tableau de MIRO rentré au musée d’art moderne de PARIS « La course de taureau » '( figure 23 page 42) est aussi un tableau offert en 1945 au musée d’art moderne de PARIS conservé aujourd’hui au centre POMPIDOU. De même il avait offert à son ami poète et peintre de collages, Georges HUGNET une aquarelle dédicacée en 1931.
FYI aurait pu être offert en 1935 à MC BRIDE mais aussi aux collectionneurs Américains GALLATIN ou ARENSBERG en remerciement de leurs achats de MIRO en 1935 . ARENSBERG avait acheté un MIRO le fameux « personnage devant la nature » portant le même numéro 362 dans le stock de MATISSE ou à son courtier « MARCEL DUCHAMP à qui ARENSBERG louait son appartement . Il aurait pu l’offrir aussi à Howard PUTZEL qui par MARCEL DUCHAMP son maître d’œuvre avait envoyé une lettre à MIRO pour lui dire son intention de présenter des tableaux de MIRO dans une exposition collective avec d’autres peintres modernes dans la galerie de PUTZEL : MIRO écrit à MATISSE dans une lettre du 13 juillet 1935 « MARCEL DUCHAMP m’a proposé de faire une petite exposition à SAN FRANCISCO de CALIFORNIE, chez PUTZEL, comme il y a 2 ans. Je lui est dit de s’adresser à vous et à PIERRE(Pierre LOEB) ». Cette exposition a bien eu lieu en novembre 1935 et c’est à l’issue de cette exposition dont les époux ARENSENBERG étaient présents qu’ils achetèrent en décembre 1935 le tableau « PERSONNAGE DANS LA NATURE « pour leur collection et qui se trouve aujourd’hui au Musée de PHILADELPHIE. PUTZEL se constituait également une collection personnelle dans laquelle il y avait des MIRO.
A3‐GEORGES DUTHUIT
MIRO connaissait Georges DUTHUIT le beau fils de Pierre MATISSE depuis les années 20 . Ils se voyaient chez leurs amis communs MASSON et ZERVOS. MASSON habitait rue BLOMET à PARIS tout près de chez MIRO
En 1935 MIRO et DUTHUIT ont assisté au mariage de MASSON en Espagne où ils étaient les 2 témoins. Dans cahiers d’art ( N°8 et 10) de 1936 qui sera publié en 1937 sous la rubrique « Ou allez- vous MIRO »
DUTHUIT écrit sur MIRO sous une forme d’entretien. Miro en est très honoré et il le signale à son marchand MATISSE
« Le prochain numéro de cahier d’art me sera en partie consacré….il y aura un très bel article de DUTHUIT en forme de conversation avec moi »
Pour beaucoup de réflexions sur l’art ; MIRO et DUTHUIT étaient en phase avec notamment l’idée que l’existence ne devait pas prendre sens dans les images mais à travers elles , qui faisait de l’art un moteur plutôt qu’un contenu dont la perception était vouée à se consumer dans des actions qu’elles accompagnaient dans l’énergie. En d’autres termes ils étaient contre l’art qui ne serait uniquement une représentation du présent .
Ils avaient une grande admiration pour l’art d’Asie. En 1936, DUTHUIT sortait un livre « mystique chinoise et peinture moderne »
En bas à gauche de FYI on remarque une calligraphie proche d’une calligraphie chinoise et phénicienne ( ce signe indiqué dans le tableau correspond à alphabet phénicien ou grec ancien qui veut dire taureau) Juste à côté après une ligne verticale est inscrit l’acronyme FYI qui signifie en langue anglaise « FOR YOUR INFORMATION » bien connu des américains dans leurs correspondances . Cela nous oriente vers un destinataire du tableau qui pourrait être Américain ou quelqu’un qui maitrise la langue américaine et qui en connait ses subtilisées comme Georges DUTHUIT qui avait été interprète pour l’armée américaine , et écrivait dans des revues en anglais « transition » il avait obtenu une licence d’anglais en 1921
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D’autre part , la petite taille du tableau et sa richesse de création font penser aux miniatures persanes qui ont leur origine en Mongolie et dont Georges DUTHUIT s’y était intéressé également.
Tous deux pensent que l’artiste a un rôle social et peu importe s’il doit sacrifier sa renommée en retrouvant l’anonymat des grandes époques de la création avant le culte moderne de l’artiste. Peu importe que l’artiste demeure inconnu comme l’étaient les chaldéens, les Égyptiens, les chinois, les chrétiens, l’artiste demeurant tout entier lui‐même, il deviendrait plus encore un artiste social. Miro disait dans un entretien à TAILLANDIER « Plus que le tableau lui « même ce qui compte c’est ce qu’il jette, ce qu’il répand. Peu importe que le tableau soit détruit…. Ce qui compte, c’est qu’il ait répandu des germes sur la terre …. Le tableau doit être fécond, il doit faire naître un monde » , Ils étaient favorables à l’anonymat de la peinture et non à la peinture spectacle dont la peinture reste immobile dans les musées comme des reliques Ils pensaient que l’art devait être vivant , vivant dans la durée d’une humanité sans cesse portée à aviver par sa force créatrice collective.
MIRO comme DUTHUIT inscrivent l’art dans le flux de la vie quotidienne. Pour eux l’art ne doit pas être enfermé mais ouvert au public et anonyme et il a toujours été réticent à signer ses tableaux qui alimentaient l’aspect commercial vénal des œuvres qu’il combattait fermement mais dont il ne pouvait se défaire en raison de la demande de ses marchands et collectionneurs qui exigeaient une signature. Dans le tableau FYI , la signature est rapportée à la taille du tableau c’est‐à‐dire minuscule et à peine perceptible à œilil nu
Néanmoins, MIRO s’oppose sur un point à DUTHUIT, il a réuni la civilisation chinoise et la civilisation grecque antique dans la même démarche philosophique symbolisé par un signe graphique calligraphique, idéogramme semblable aux deux civilisations et en mettant en image une allégorie sur la légende d’EMPEDOCLE dont la philosophie est très proche aussi du taoïsme et confucianisme. Alors que DUTHUIT au contraire, oppose nettement ces deux civilisations
Mais en définitive DUTHUIT et MIRO recherchent la même chose et ont le même but utiliser l’art pour proposer un nouveau monde loin du monde actuel et non pas utiliser l’art comme une fin en soi , l’art pour l’art mais pour dynamiser le monde c’est‐à‐dire l’art utile, c’est la lecture de ce tableau FYI
Le message du tableau FYI dans le volet 1‐Bestiaire, c’est retrouver l’âme des primitifs des cavernes rupestres du paléolithique et l’art pariétal : Miro disait : « La peinture est en décadence depuis l’âge des cavernes » et pour DUTHUIT son point d’origine de perversion c’est la civilisation gréco romaine et la renaissance qui ont perverti le monde, pour lui « le nouveau monde c’est retrouver un nouveau vitalisme pour changer et transformer les rapports interpersonnels, regénérer le monde. Il prend le contre ‐ ’exemple des musées dont il est le « muséoclaste » par excellence ou il s’insurge contre la civilisation occidentale avec ses images depuis la renaissance, images poussiéreuses fermées dans les musées comme dans des prisons et l’artiste se barricade lui‐même dans sa prison pseudo‐scientifique, prisonnier de son motif, butée sur sa composition, obnubilé par le souci du pittoresque et les recherches gratuites du colorie et du mouvement et a perdu l’art populaire, collectif de la vie
Pour DUTHUIT l’art , les tableaux, doivent être dans les églises, les fêtes, les cérémonies là où est la vie et non pas les musées. Il va déployer toute sa vigueur et son énergie pour critiquer André Malraux lui qui prône l’établissement des œuvres dans musées dans son livre populaire « le musée imaginaire » qu’il contre attaquera dans son livre « le musée inimaginable »
Ce tableau FYI ayant un rapport certain aux spécialités littéraires et philosophiques de DUTHUIT aurait pu aussi servir de cadeau qui lui aurait pu lui faire très plaisir
Comme Georges DUTHUIT , ZERVOS s’était penché sur l’art préhistorique , MIRO en était très proche, celui‐ci s’intéressait aussi à l’art préhistorique, notamment l’art pariétal, c’est ce que nous allons voir dans un des chapitres suivants
A4‐Henri MC BRIDE
Henri MC BRIDE a commencé sa carrière de critique d’art en même temps que l’ARMORY SHOW en 1913 et ensuite sa carrière a été spectaculaire, sa réputation a été faite avec l’expressionnisme abstrait Américain . En France il était l’ami de GERTRUDE STEIN . Il passait de nombreux étés PARIS ou à part STEIN, il rencontre les peintres PICASSO, BRAQUE,LEGER. Il était en relation avec les galeries Françaises et Pierre LOEB marchand de MIRO.
En 1934 MIRO envoi plusieurs lettres à son nouveau marchand new Yorkais , Pierre MATISSE .Il l’informe qu’il a été très impressionné des articles élogieux que Mc BRIDE a écrit sur lui il lui écrit :
Lettre du 7 février 1934 à MATISSE, « Je vous envoi ci‐joint une lettre pour Mc BRIDE . Voudriez‐vous avoir l’extrême gentillesse de lui faire suivre ?. Son article est très touchant et me flatte beaucoup. Je dois partir quelques jours à PARIS……. Et me ferai un plaisir d’expédier une peinture à Mc BRIDE en preuve d’amitié et sympathie… »
Lettre de Mai 1934 à MATISSE, « Mc BRIDE vient de m’envoyer un mot pour me dire qu’il avait reçu son aquarelle et qu’elle lui plaisait beaucoup, je lui ai donné votre adresse , il doit vous écrire
Lettre du 11 mai 1934 à MATISSE « Voudriez‐vous me donner l’adresse de MC BRIDE et me dire s’il est à NEW YORK pour lui expédier une gouache que je garde pour lui. »
Lettre du 11 mars 1938 de MATISSE à MIRO « Mon cher MIRO, j’ai toujours la gouache que vous aviez envoyé en vue du catalogue et que je n’avais pas usée car elle est arrivée trop tard, je vais l’offrir de votre part à Mr Mc BRIDE qui est un de vos fervents défenseurs et qui nous aide beaucoup dans ce combat »
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Des relations étaient donc établies entre MIRO et MC BRIDE . En remerciement de bons articles écrits sur lui, MIRO lui avait offert plusieurs œuvres comme indiqués ci‐dessus. Est‐ce que ce tableau FYI aurait été offert à MC BRIDE , c’est aussi une possibilité comme PUTZEL, DUCHAMP ou DUTHUIT ou peut être aussi d’autres comme le critique d’art James Johnson SWEENEY qui avait rencontré MIRO à plusieurs reprises dans les années 20 et 30, qui avait fait une monographie sur MIRO quand il était conservateur au MMA de NEW YORK et qui avait une collection privée d’artiste modernes dont des MIRO. MIRO avait d’ailleurs offert au musée MMA de New par l’intermédiaire MATISSE une œuvre de MIRO , comme il avait offert au musée d’art moderne de PARIS le tableau « course de taureau » ( figure 23 page 42)
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A5‐ ACCEUIL AUX ETATS UNIS
Dans un entretien avec RAILLARD , MIRO lui avait dit : « Les américains ont toujours été beaucoup plus sensible à mon travail qu’on ne l’a été à PARIS ». Peut‐être aucun peintre au XXème siècle n’a reçu une plus grande renommée aux ETATS UNIS que MIRO, Les américains étaient parmi ses partisans les plus ardents au cours de ses premières années à PARIS et des collectionneurs privés américains , des musées et des galeries ont continué à acheter et à exposer son travail au cours du dernier demi‐siècle.
Aux Etats Unis dans les musées, sans parler des collections particulières on voit beaucoup plus d’œuvres de MIRO qu’en France
A New‐ York , il a trouvé une large audience, sa renommée n’a cessé de croitre à chaque exposition depuis celle organisé par Pierre MATISSE en 1932. Le biomorphisme de MIRO a marqué GORKY et De KOONING dès le début des années 30, son écriture d’idéogrammes proche de l’image archaïque ou préhistorique a profondément influencé les recherches sur la peinture expressionniste abstraite de POLLOCK, ROTKO, De KOONING,GORKY,GOTTLIEB,, HOFFMAN,MOTHERWELL, BAZOITTES etc
Pour revenir à FYI, ces trois lettres font penser à l’acronyme américain : FOR YOUR INFORMATION qui était utilisé déjà dans le années 30 et qui entré dans le langage usuel avec l’arrivée de l’informatique.
D’autre part au dos du tableau le numéro 362 ( FIGURE 13 PAGE 20) correspond aux numérotation des tableaux reçus par PIERRE MATISSE marchand de MIRO à NEW YORK dans les années 34 à 36 . Ce numéro a été attribué aussi à une autre peinture « Personnage dans nature » ( FIGURE 15 page 21) qui a une certaine ressemblance avec FYI. On y retrouve aussi un personnage masculin en bas à droite muni de son béret, béret catalan pour FYI « la BARRETINA », un paysage de montagne volcanique, deux formes géométrique en bas à gauche une noire et l’autre perpendiculaire orange qui comme le mur de FYI équilibrent le tableau comme dans FYI aussi une tête de serpent la gueule ouverte est prêt à attaquer et à dévorer ,monstre sur des pattes de chèvre à rapprocher du serpent du tableau FYI en bas au centre en position de dévorer sa proie également. Le paysage volcanique est typique de cette époque dite des peintures sauvages ou le paysage montagneux et les volcans sont présents dans la plupart des tableaux de MIRO.
Les deux tableaux 362 « FYI » et « personnage dans nature » sont donc probablement arrivés en même temps chez Pierre MATISSE. L’un 362 « personnage dans nature » a été mis en stock à son arrivée et vendu quelques semaines plus tard le 1er Juin 1935 à Howard PUTZEL directeur de la galerie STANLEY ROSE qui lui‐ même l’a vendu à WALTER ARENSBERG en décembre 1935 sans doute à l’issue d’une exposition que Howard PURZEL a organisé en novembre 1935
Comme indiqué ci‐ dessus la raison de la non présence du tableau 362 dans la notation du STOCK de MATISSE de 1935 est du au fait que probablement ce tableau n’a pas été vendu mais offert et donc n’ayant pas de valeur commerciale il n’a pas été noté dans le stock comptable il a donc repris ce même numéro pour le tableau suivant reçu de MIRO à la même époque en 1935 nommé« Personnage nature »
Il aurait pu être offert aux personnages indiqués dans le chapitre précédent intitulé « Marchand Pierre MATISSE »
En ce qui concerne les expositions de MIRO aux USA en 1935
‐ Musée de l’art de SAN FRANSICO ( juin et aout) 1935
‐ Musée de l’art de San FRANSISCO, Décembre 1935
‐ Galerie STENDHAL septembre 1935
‐ Galerie STANLEY ROSE à LOS ANGELES ( expo personnelle de Howard PUTZEL) Octobre et nov 1935
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B‐ SUJETS DU TABLEAU- FYI BESTIAIRE
C’est à travers l’art du passé que la vie et la nature révèlent à MIRO leur pureté et leur beauté .Pour lui son modèle d’artiste à qui il aimerait se substituer c’est l’homme préhistorique à travers l’art pariétal pour sa pureté artistique , sa poésie et son contact avec nature . Il se considère lui‐même dans sa démarche artistique comme un artiste préhistorique vivant dans le monde contemporain. Son atelier c’est sa grotte. Il se dit n’avoir rien à voir avec un décorateur superficiel qui cherche à produire des toiles agréables . C’est un créateur qui entretient un dialogue avec la tradition du passé. Dans le volet 1 ‐FYI , il se représente à travers ce tableau comme un artiste des grottes rupestres dans une nature dont il fait partie intégrante tout comme le poisson ou l’arbre mais son monde idéal se trouve dans la grotte , Cet homme préhistorique idéal dans l’esprit de MIRO ne cherche pas à savoir ce qui se passe à l’extérieur , derrière le mur de la caverne , sa seule préoccupation c’est la chasse pour se nourrir et l’art pariétal pour la beauté de la nature .
Ce monde primitif des cavernes rupestres que l’on connait mal car il n’y a pas d’écrits, seulement des peintures aussi MIRO le crée dans son esprit avec un monde ou règne le silence, le calme, la simplicité, la simplicité de la vie , la poésie en opposition avec notre monde contemporain .
Mais il va vite s’apercevoir que passé le mur ce n’est plus l’Arcadie de la grotte . Dans ce tableau on n’a pas la notion du temps , des siècles et on passe de la grotte préhistorique à notre période contemporaine ou l’homme a été perverti pour toutes sortes de raisons et il est agressé par des démons extérieurs et intérieurs ( image du serpent qui agresse le paysan catalan en bas du tableau) et donc pour MIRO il faut revenir à la candeur, à la pureté de l’homme des cavernes de l’art pariétal. Il imagine donc comme solution radicale dans sa folie créatrice , celle de EMPEDOCLE qui s’est immolé par le feu de l’ETNA ( dans le tableau volet 2 c’est l’oiseau qui rentre dans le cratère du l’ETNA) en se jetant dans le cratère du volcan pour une purification de l’homme par le feu qui passe par une destruction pour recréer un homme nouveau et pur et ainsi MIRO créateur se présente comme demiurge tout comme le volcan ETNA pour la naissance d’un nouveau monde et la naissance de l’art.
Dans un livre que MIRO possède sur les peintures de la grotte de LASCAUX, Georges BATAILLE parle des maîtres préhistoriques et les compare aux artistes contemporains. Pour lui ils sont réunis par l’essence de la créativité. BATAILLE dit « Certes l’homme de LASCAUX n’est pas en tout point le même que nous, mais il l’est au moins sur la forme du génie créateur. C’est la présence de ce génie créateur , surgi à la naissance de l’humanité et le forçant à créer que MIRO ressent en lui et qu’il cherche chez les autres »
On peut se poser la question ? Quel est le point de départ de ce tableau. Il faut se rappeler que souvent MIRO commence un tableau sans avoir réfléchi au départ à un sujet précis .Il improvise à partir d’un signe , d’un point, d’une tache, d’une matière, d’un accident qui lui semblent intéressant pour démarrer une toile.
Il disait dans un entretien : « il me faut un point de départ, ne serait-ce qu’un grain de poussière ou un éclat de lumière. Cette forme me procure une série de choses , une chose faisait naître autre chose… »
Dans ce cas précis de FYI , il aurait pris un morceau de papier cartonné dont il s’était servi pour nettoyer ses pinceaux ( FIGURE 12 page 19 ). En effet au verso du carton ( figure 6 page11 )il y a des traces de peintures qui ressemblent à des passages de peintures comme pour nettoyer un pinceau des peintures restantes et sur le recto qui a servi à la peinture du tableau on remarque quelques taches de matières grasses ( figure 5 page11 )qui ressemblent à de l’essence, traces que l’on remarque encore par transparence, même avec la peintures qui ont été rajoutées par‐dessus ? cela peut correspondre aussi a des nettoyages de pinceaux. Au milieu du carton on remarque un point noir. Tout cela lui a peut être donné l’idée à partir du point noir qui fera office d’œil de créer une tête d’animal et les taches d’essence de réaliser un mélange de peinture à l’huile et d’essence pour créer une peinture qui servira à peindre la tête de l’animal De là sans doute lui est venu dans son imagination l’idée de réaliser un tête de bovin sans contours précis et ainsi de fil en aiguille de réaliser ce tableau non plus à partir du hasard mais de son imaginaire tout en restant dans la réalité et la figuration des choses
Avant d’entrer en détail dans le tableau FYI il est intéressant de faire un retour sur les tableaux des années précédentes et à venir car la plupart des peintures de MIRO restent en liaison avec les précédentes tout en étant radicalement différentes.
Une étude générale des 18 grands tableaux de collage réalisés avant FYI en1933 montrent que ces toiles suggèrent des peintures des cavernes mais aussi le commencement ou la fin d’un monde
En effet, Les éléments collés des tableaux découpés dans des journaux, listes de vente représentant des éléments d’outils, de machines ou des marchandises deviennent indéterminées mais avec un biomorphisme qui évoque des os, des membres détachés, des organismes unicellulaires ou des hybrides. La question qu’on peut se poser c’est de se demander : s’agit ’‐il du commencement ou la fin d’un monde.
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C’est exactement le même sujet traité dans le tableau FYI mais vu d’une manière complètement différente nous le verrons
Quand a l’année 1935, il peint des personnages masculins qui sont très rares dans son œuvre contrairement aux personnages féminins et oiseaux qui sont souvent les métamorphoses de ses personnages féminins de ses très nombreux tableaux.
Parmi ceux‐ci avec des personnages masculins il y a quelques exemples : « Tête d’homme »,« Homme et femme »,, « 2 philosophes », « homme », « personnage devant nature » « homme et femme devant un tas d’excréments » Ensuite à part l’autoportrait et le faucheur de 1937 Il faudra attendre plusieurs années pour revoir des personnages masculins. Dans FYI on remarque une tête de paysan catalan en bas à droite.
1935 ce sont aussi de nombreux paysages de volcans : « paysages de montagne », « paysage de volcan »,« personnage devant la nature » etc
Dans le tableau FYI, D’abord on remarque la tête d’un bovin qui prend le ¾ de la surface du tableau et malgré la couleur sombre de la tête , on découvre un animal , nonchalant, bienveillant et souriant rien à voir aux taureaux de PICASSO prêts à tuer ou à attaquer .Quand on se rapproche et que notre regard monte et se pose au niveau de ce qui semble être les oreilles du bovin aussitôt notre jugement change car de l’aspect paisible il y a un revirement vers l’aspect monstrueux . En effet on remarque un oiseau au sommet du crâne qui se caractérise par 2 yeux énormes globuleux qui semble nous fixer de manière inquiétante, un bec en forme de sexe féminin se détache de la tête ( figure 30, page 78) ,Ces éléments sont indépendants semblent devoir se lier et se constituer en oiseau de nuit, hibou ou chouette voulant pénétrer dans la tête du bovin
A partir de ce moment, nous entrons dans le deuxième tableau que j’ai appelé : volet 2 ‐ETNA.
Avant que le tableau soit étudié en détail , Il y a deux façons bien distincts de le lire dans mon étude ( il y en a certainement d’autres car Miro nous laisse le choix en faisant travailler notre imagination, son biographe DUPIN disait en parlant de MIRO, « les recherches sur MIRO ne se terminent jamais car on trouve toujours quelque chose de nouveau).
Pour résumer simplement, il y a 2 tableaux en 1 .Le tableau FYL à la particularité de superposer deux tableaux distincts, imbriqués l’un dans l’autre sans avoir supprimé quoi que ce soit pour passer de l’un à l’autre. Je pense que dans l’histoire de l’art MIRO était un des rares peintres capables de réaliser ce tour de passe ‐passe. On retrouve cette superposition dans les « autoportraits » de 1937 et 1960 ( figure 9 page 15), mais aussi « l’hirondelle éblouie par l’éclat de la prunelle rouge » de 1925 et 1960. ( Figure 9 page 15)Il y a des exemples aussi avec des tableaux qu’il n’a pas fait lui‐même , qu’il a repris en ajoutant sur les copies des éléments rajoutés par lui, tableau de COROT, Tableaux anonymes, pompiers .
Ce tableau FYI possède 2 volets, 3 époques et une double visibilité Le premier tableau que j’ai appelé volet 1‐bestiaire est une description du plafond de la caverne d’ALTAMIRA et du mur d’entrée de celle‐ci, revisité par l’œil de MIRO et donc visibilité vu de l’extérieur ( Figure page 10)
Le deuxième tableau que j’ai appelé volet 2‐ETNA , c’est d’avantage , une représentation de l’imagination en partant de faits extérieur , c’est alors une visibilité de l’intérieur. Son idée :Il s’image en demiurge créant un monde nouveau à la place du monde actuel qui revient à son point d’origine, à la période de l’art pariétal et dans le microcosme de ce qui touche à cet art préhistorique . Ici Miro se pose en créateur en utilisant des images au service des idées .il utilise des métaphores et se sert de la légende de EMPEDOCLE pour purifier l’humanité par une méthode terrifiante que nous verrons ci‐dessous
Le cadre , les fonds des tableau de MIRO sont très souvent méditerranéens et il utilise ses références à d’autres civilisations .Dans le cas de FYI le volet 1 est dans le cadre de la grotte paléolithique D’ALTAMIRA dans le nord de l’Espagne, et dans le 2eme volet c’est l’ETNA italien à l’époque des présocratiques et revue à l’époque contemporaine de MIRO
L’idée de départ comme indiqué , c’est le volet tableau que j’appellerais « BESTIAIRE ».Ce premier tableau c’est celui qui nous vient naturellement au premier regard sans avoir de connaissance particulière de MIRO et en ayant le même regard qu’un enfant. Il y a une masse centrale sombre dont les bords mal définis ont le profil d’un bovin (et devant cet animal un mur semble le cacher en partie. Sur le sommet de la tête de l’animal émerge un oiseau inquiétant aux yeux énormes, animal qui ressemble à un hibou ou chouette au crane aplati
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Le deuxième tableau ne pourra se dévoiler qu’à ceux qui connaissent la vie et l’œuvre de MIRO en profondeur et ses tableaux monstrueux de 1935. On peut y voir à la place de l’animal décrit ci‐dessus , une montagne volcanique dans lequel rentre à l’intérieur du cratère un oiseau à la tête fragmentée non reconstitué aux yeux énormes et a une oreille gigantesque sur la droite, Devant la montagne un mur qui semble en ruine et délavé par le temps et au pied de la montagne et du mur on remarque un serpent qui semble vouloir attaquer sa proie sur sa droite , qui est un paysan catalan en raison du bonnet qu’il porte , type « Barretina ». Ce paysan dont on ne voit que le profil de la tête vaporeuse, fantomatique en transparence avec la terre
Le tableau FYI est donc la réunion des deux que j’appellerais aussi BESTIAIRE/ETNA
1er tableau BESTIAIRE ( volet 1)avec ( bovin ) des cavernes rupestres de l’art paléolithique
2eme tableau ETNA‐ ( volet 2) : Montagne ETNA devant le mur appelé le mur du philosophe selon la légende de EMPEDOCLE
Les décors étant posés , vous trouverez ci‐dessous les détails que j’ai découvert dans ce tableau FYI
B1‐ALTAMIRA, LES CAVERNES RUPESTRES
Tout d’abord l’étude du volet1 ‐BESTIAIRE
Depuis son enfance à BARCELONE MIRO est en contact direct avec l’art primitif qui exercera une influence durable sur sa personnalité et son art tout au long de sa carrière. C’est son amour de la CATALOGNE qui entraine un vif intérêt pour le patrimoine artistique de son pays et particulièrement pour le primitivisme ( préhistoire et cavernes rupestres), le culte de la vie, les manifestations spontanées du monde primitif et préhistorique du début du XXème siècle qui devaient légitimement entrainer MIRO vers la quête des origines. Dans des tableaux MIRO fait des allusions directes à des grottes rupestres que ce soit « ELS RUPESTRE » ou « GRANDS RUPESTRES » (Figure page 42) ou des motifs de peintures rupestres dans sa série des« CONSTELLATION ». Ils s’appliquent autant à l’introduction de symboles individuels comme des lignes droites, obliques, courbes ouvertes, brisées, dentées qu’au caractère global du tableau (le bovin, la grotte, la peinture ocre aux couleurs des murs de la caverne)
Selon Remi LABRUSSE, « si l’imaginaire collectif a si puissamment placé les grottes ornées au cœur de la vision moderne de la préhistoire, s’il y a autrement dit un désir de grotte dans notre désir de préhistoire, c’est précisément parce que on a commencé par désirer, avant toute chose cette concaténation du présent et du passé que les grottes incarnent mieux qu’aucun autre environnement »
« Il faut dire aussi que aussitôt reconnues les grottes ont suscité la ferveur universelle au point d’occuper dans l’imaginaire préhistorique une place disproportionnée par rapport à leur quantité et peut être à leur signification même, comparée à celle de tant d’autres témoignages archéologiques de l’activité des hommes du paléolithique. L’intérêt de la grotte est aussi qu’elle ne bouge pas a l’empilement des siècles comparé aux bouleversements à l’extérieur durant tous les siècles passés, et à force d’obscurité, la cavité souterraine semble illimité , les sons du dehors s’y dissolvent, elle est totalement détachée de tout ce qui se passe à l’extérieur. Nos capacités de mesure qu’elles viennent du corps ou de l’esprit, qu’elles soient mentales ou perceptives y perdent prises et dérapent, nos sens ne s’accrochent plus qu’à des sensations .Tout cela favorise l’imagination des artistes et leur rapprochement avec la contemporanéité »
Miro comme la plupart des artistes s’est intéressé à la préhistoire pour exprimer la contemporanéité de l’art préhistorique et il s’est inspiré de l’aspect énigmatique des grottes et de leur intemporalité . Dans l’esprit de beaucoup d’artistes également et cela se retrouve dans les œuvres de ERNST, KLEE, GIACOMETTI et bien sûr MIRO, la préhistoire fait resurgir des gestes des ancêtres enfouies dans la conscience des hommes qu’ils remontent à la surface en s’apercevant que la conscience de la préhistoire dévalorise irrémédiablement la valeur vitale du présent. Ils expriment un rêve utopique d’un retour à l’âge paléolithique sous le microcosme de l’art des cavernes rupestres
Autrement dit selon un article de Maria STRAVRINAKI sur « Modernité préhistorique… » qui explique comment des artistes comme MIRO ou ERNST on voulu briser le bloc de l’histoire en faisant
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Fonctionner la préhistoire comme une paroi, un écran de projection sur lequel se reconnaissait la modernité critique de l’entre ‐deux guerres, par le refus de MIRO et d’autres d’un évolutionnisme monolithique faisait écho à l’idée d’une temporalité asynchrone. Une rétroprojection vers cette origine absolue permettait d’effacer la mémoire immédiate et standardisée au profit de ce que Marcel PROUST appelait la « mémoire involontaire en renversant le processus de constitution de leur subjectivité par le désapprentissage et l’oubli »
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Par définition dépourvus d’annales, d’histoire, la préhistoire aux yeux des artistes comme MIRO éliminait le temps historique par une intemporalité particulièrement précieuse dans ces temps de tensions historiques de l’entre ‐deux guerres ; pour qu’en réaction contre la vision matérialiste de l’histoire s’installe une vision trouvant ses ressorts dans l’intériorité. C’est ainsi que dans FYI, MIRO nous fait représenter la préhistoire comme l’origine de l’homme pur originel auquel il voudrait faire revenir l’humanité sur l’idée unique du microcosme de la préhistoire sous l’œil de l’art pariétal
Chez MIRO le pessimiste de nature tragique et taciturne est constante mais avec un fond tout de même d’espoir de créer un monde nouveau sur le modèle de l’art pariétal.
C’est précisément ce que montre ce tableau FYI avec ses deux volets à la fois distincts par les civilisations, Deux civilisations sont présentes dans ce tableau ( la préhistoire et la civilisation grecque ancienne présocratique ) que Miro transpose jusqu’à aujourd’hui mais dont l’espace temps est occulté, c’est clairement pourquoi les deux volets distincts se superposent dans une seule image pour faire un tout , il n’y a aucune notion de temporalité dans ce tableau FYI.
De la période présocratique le peintre fait la transposition à la période moderne pour nous dire que la modernité n’est pas un bienfait pour l’humanité et que depuis la période préhistorique des cavernes rupestres il y a eu une transmutation des valeurs, un effondrement des principes, une aliénation de l’homme, un abrutissement et donc dans son imagination un peu folle et idéaliste, Miro nous propose un retour aux origines de la période de l’âge des cavernes rupestres pour prendre un nouveau chemin différent que celui qu’à pris l’humanité jusqu’à aujourd’hui et retrouvez l’innocence des enfants que l’on retrouve dans le tableau FYI dans la façon de peindre le bovin préhistorique qui est bien moins précis de les bovins et bisons de la grotte d’Altamira car plus minimaliste mais pour MIRO le but n’est pas de faire de l’art pour l’art et de rivaliser avec les peintures rupestres . La peinture pour MIRO n’est pas un moyen ( il voulait assassiner la peinture) mais une fin en soit ( c’est l’idée qui se dégage de sa peinture qui l’intéresse), ce qui l’intéresse c’est ce qui ne se voit pas et qui ne peut être vu
Cette notion de nouveau monde en création souhaité par MIRO on le retrouve dans un de ses tableaux « la naissance du monde » MIRO s’est révélé comme un peintre des Commencements(N a i s s a n c e du monde) et de la naissance mais aussi de la métamorphose , de la transformation,
c’est ce que nous verrons dans ce tableau FYI divisé en 2 volets Bestiaire/Etna. Il va du commencement ( volet (Bestiaire) , de la de la transformation ( volet ETNA) pour une Transformation ( Empédocle) et un retour à l’originel, pour la pureté de l’âme de l’âge des cavernes, art pariétal
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De ces points de vue il se rapproche du peintre TAPIES qui écrivait :
« Au monde borné plein de tabous, de péché et de perversion , nous cherchons la pureté de l’innocence du 1ER jour, retrouver les sources limpides pour ne pas se perdre dans une société prétentieuse pleine de fausseté et de mensonge ». C’est tout ce que nous trouvons dans FYI ( les deux volets Bestiaire+ Etna) , l’innocence des premiers jours et enfance de l’art. Pour MIRO l’humanité doit rechercher la pureté des premiers jours pour éviter le chaos et la fin d’un monde qui se trouve en phase de vieillissement. Dans sa folie imaginaire MIRO nous montre par la peinture comment retrouver la pureté originelle des cavernes en utilisant la légende de EMPEDOCLE qui s’était immolé par le feu de l’ETNA pour retrouver la pureté des premiers hommes. C’est ce que nous verrons dans le chapitre suivant consacré à L’ETNA
Comprenons donc que l’intérêt pour MIRO pour la préhistoire n’est donc pas une appropriation nostalgique mais il cherche à faire revivre cette période humainement et artistiquement pure de tout antécédent pour réinventer un homme nouveau et un art CATALAN international et universel.
MIRO est captivé par les formes préhistoriques et les signes pré linguistiques pour un art anonyme collectif et pour l’universalité de leur expression qui répondent parfaitement à ses objectifs artistiques . Il est attiré par la simplicité de leurs représentations figuratives ainsi que par les fonctions magiques qui leur sont associées.
Commençons par le volet 1 ‐BESTIAIRE
Au premier regard sur le tableau FYI on remarque immédiatement cette masse centrale sombre sans forme précise qui fait les ¾ du tableau équilibré par une forme géométrique à 3 cotés qui s’avance jusqu’au milieu et dont un coté monte subitement en dehors du cadre et qui fait penser à un mur en ruine.
Il faut se rappeler pour comprendre cette partie du tableau dans un premier temps, le grand intérêt de MIRO pour l’art pariétal paléolithique. MIRO entretenait des liens personnels ou intellectuels indéfectibles dans les années 30 avec quelques grands ethnologues de son temps comme LEIRIS et MAUSS avec qui naitra une communauté d’esprit assez unique sur l’art du début du XXème siècle. Il suivait les nouveaux développements de l’ethnologie , les découvertes de sociétés non atteintes par la civilisation moderne des grottes pariétales et aussi l’attrait de l’orientalisme , c’est‐à‐dire un monde qui lui plait , un monde qui retourne aux origines de l’humanité et que l’on retrouve dans ce tableau FYI ( 1er volet – art pariétal de la grotte d’Altamira et orientalisme avec en bas à gauche symbole calligraphique que l’on retrouve chez les chinois mais nous le verrons aussi chez les grecs anciens et phéniciens). Dans ce tableau FYI, il se met dans une nouvelle approche ou s’ouvre à lui un monde sans se préoccuper d’un cadrage historique et d’une échelle de temps ou de l’espace et seul compte ce qui se passe à l’intérieur de la grotte. Dans un premier temps il occulte tout ce qui se passe à l’extérieur et dont à vrai dire on ne sait pas grand‐chose car nous n’avons aucune description écrite des personnes qui ont vécu cette civilisation préhistorique hormis les peintures
Il avait dit dans un entretien : mes écoles de peintures préférées remontent aussi loin que possible , la peinture des grottes préhistoriques, les primitifs…
Le choc préliminaire pour les primitifs et le primitivisme vient de sa jeunesse à MONT ROIG, C’est sur les champs pierreux de sa maison de MONT ROIG qu’il l’a d’abord mis en forme et découvert dans la solitude, le recueillement spirituel et les mystères du presque rien qu’il retrouve comme les primitifs pour un brin d’herbe, un caillou, il disait :
« Un brin d’herbe est aussi important qu’un caillou , un arbre, une fourmi ou une montagne » aussi dans ses tableaux il ne respecte pas les proportions. Dans le tableau FYI nous remarquons des disproportions entre la tête du bovin ou la montagne et le mur , l’oiseau ou le serpent . Dans une lettre à RAFFOLS il lui disait sa joie d’arriver à comprendre dans un paysage un petit brin d’herbe, un caillou en ajoutant que seuls les primitifs et les japonais ne les ont pas négligés
Ils s’intéressait aux primitifs, il possédait des objets primitifs dont un magnifique masque à double tête de Papouasie Nouvelle Guinée qu’il prêtait régulièrement pour des expositions d’art primitif . Ses amis et marchands, TZARA, Pierre LOEB, Charles RATTON étaient de grands collectionneurs d’art primitif . Dans les années 20 , dans diverses expositions, les tableaux de MIRO étaient couramment prêtés
Si L’art primitif avait un grand intérêt pour MIRO, il en était de même de l’art préhistorique et notamment de l’art pariétal paléolithique des cavernes rupestres. « Il rêvait encore à la fin de sa vie de devenir assez mur pour retrouver le regard primitif, le regard sauvage, le regard vierge » des hommes de l’art pariétal paléolithique. Ses références à la préhistoire et à l’art pariétal proprement dits sont incessants depuis ses premières œuvres des années 20 ( la naissance du monde, Terre labourée » (FIGURE 20 page 39) avec un taureau préhistorique et un dinosaure au centre du tableau) jusque dans les années 70 ( série de lithos sur les cavernes rupestres). ( FIGURE 23 page 42)
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Très tôt dans sa jeunesse, il est allé voir de splendides vases de l’âge des cavernes des musées de BARCELONE , il s’était intéressé aux représentations de la grotte d’ALTAMIRA à travers les revues , les magazines , les expositions , Grotte qu’il visitera en 1955 avec ARTIGAS, en préparation d’une peinture murale pour L’UNESCO à Paris
Jusqu’au début du XX éme siècle avant les travaux de FROBENIUS , des découvertes d’objets primitifs et préhistoriques , des cavernes rupestres ornées et de la mode lancée par PICASSO , DERAIN, MATISSE , Maurice DE VLAMINCK dans la collection d’art primitif, c’était l’évolution populaire Darwinien qui prédominait , qui arrangeait, ceux qui croyait à l’évolution de l’homme et la nature avec le temps et qui ne remettaient pas en cause la représentation académique de la vie et de l’art .Lorsqu’on l’appliquait à l’espèce humaine on voyait des êtres féroces et misérables , semi‐ animaux, nus ou déguenillés , s’entretuer , se trainer au fond des grottes ou fuir devant des animaux monstrueux
Parfois ces scènes contrebalancées par des scènes idylliques du bon sauvage avaient trouvé refuge dans des représentations de temps préhistorique mais dans un cas comme dans l’autre la représentation académique n’était pas remis en cause et a dissipé l’indistinction, c’est‐à‐dire l’accès à une vérité historique prétendument objective .
Et pourtant les œuvres d’arts paléolithiques découvertes au XXème siècle ,s’accordaient mal à cet état de barbarie inculte dans lequel nous nous représentions les peuplades préhistoriques et aborigènes disaient les ethnologues de la fin du XIX éme siècle LARTET et CHRISTY qui selon eux vivaient de la pêche et de la chasse qui leur suffisait largement et leur laissaient les loisirs d’une existence peu tourmentée, cette vie facile a permis à ces hommes de la préhistoire d’enfanter les arts mobiliers et l’art pariétal. Petit à petit les clichés que l’on se faisait de la préhistoire notamment avec les découvertes des cavernes rupestres ont changé mais il a fallu de temps
Même lors de la découverte de la grotte d’Altamira avec ses surprenantes peintures rupestres qui semblaient avoir été peintes la veille de la découverte tellement l’état visuel de fraicheur, les couleurs , les lignes de peinture semblaient avoir été faits par des peintres contemporains qu’il a fallu plus de 20 ans pour accréditer ces peintures à l’art paléolithique car pour les sceptiques divisés en 2 catégories les uns croyaient à une supercherie, pour ceux‐là les peintures auraient été réalisées par des artistes contemporains a l’exemple de Gabriel de MORTILLET préhistorien du XIXéme siècle, Emile CARDILHAC qui pensaient que la date des peintures d’ALTAMERA était récente et la controverse qu’ll existait entre l’Espagne et la France sur le sujet à la fin du XIX siècle, L’Espagne déclinait les grottes rupestres sous l’aspect de la religion et de la révélation alors que la France réfutait ce point de vue et pour les autres ils ne voulaient pas ouvrir les yeux car cela contrediraient leur perception de l’évolutionnisme de l’humanité depuis la préhistoire du classicisme ambiant
L’art paléolithique découvert au XXeme siècle a fini par changer les clichés que l’on se faisait de la préhistoire notamment avec les découvertes des cavernes rupestres ornées de dessins et peintures et d’objets découverts dans ces grottes du sud de la France et du nord de l’Espagne
Par l’obscurité , le silence , l’humidié, le milieu souterrain en tant que tel ,ils produisent une impression d’éternité à l’écart du bruit du monde et de la vie frémissante dans l’omniprésence de l’eau, enfin et surtout les traces humaines qu’il s’agit de peintures, gravures, de modelage ou d’empreintes laissent tout récit, toute l’histoire à l’état virtuel. Par ce milieu stable elles se caractérisent souvent par une fraicheur qui produit une forte impression de proximité avec les gestes dont elles sont les résultats et comme disait André DAVID le découvreur de la grotte PECHMERLE en 1922, « nous avons l’impression d’être rentré dans un autre monde. »
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D’autre part la grotte rupestre D’ALTAMIRA qui semble être l’exemple pris par le peintre dans ce tableau FYI, volet 1, BESTIAIRE, encore aujourd’hui elle donne l’impression d’être vivante par l’humidité du plafond irriguée par l’eau . L’eau est ici comme le sang qui irrigue le corps d’un être vivant. Par son caractère vivant et humain, l’art D’ALTAMIRA semble annoncer l’inanité du mythe progressiste et l’avènement futur d’une nouvelle préhistoire susceptible de refonder la civilisation après un extinction de l’humanité actuelle qui pourrait être les conséquences de guerres ou catastrophe humanitaires. Cette thèse semble être exprimée dans FYI
MIRO au XXéme siècle lui, suivait les recherches, le travail et les trouvailles des grands ethnologues, nous l’avons vu avec LEIRIS et MAUSS mais aussi paléontologues , préhistoriens du XXéme siècle a l’exemple de PROBENIUS, de l’abbé BREUIL André SCHNAEFFER qui écrivaient des livres et des articles dans des revues et magazines comme les« cahiers d’art » de ZERVOS , « Documents » de BATAILLE, « Le Minotaure » de Albert SKIRA . Zervos consacrera un numéro spécial à MIRO dans son édition de 1934 des cahiers d’art Numero 1‐ 4, date du tableau FYI !
L’allemand Frobenius joua un rôle décisif dans la diffusion chez les artistes mais aussi au grand public de l’art préhistorique des cavernes rupestres, l’art pariétal , par ses publications ou il montrait son importante collection de fac‐similés d’art préhistorique , de centaines de dessins reproduits des grottes ornées qu’il avait visité lui et ses collaborateurs artistes dessinateurs , reproduisant fidèlement les tailles, les formes et les couleurs des peintures. Ces dessins reproduisant les grottes rupestres firent l’objet de nombreuses expositions à travers le monde. Pour certaines d’entre elles dont l’objet était la comparaison entre l’art préhistorique et l’art contemporain , MIRO exposait des œuvres à côté des collections de FROBENIUS , MIRO était convié également aux vernissage des expositions de FROBENIUS et les visitèrent . Celui‐ci rédigea aussi de nombreux articles dans des revues d’art comme « les cahiers d’art de ZERVOS. Miro ne pouvait donc qu’être sensible à cet art préhistorique paléolithique des cavernes rupestres ornées. FROBENIUS contribua au succès de l’art moderne par la divulgation de ces images préhistorique dont MIRO s’inspira aussi et dont le Tableau FYL dans son premier volet que j’ai appelé BESTIAIRE en est un exemple concret.
Si FROBENIUS s’est intéressé surtout à l’aspect scientifique de la préhistoire, L’abbé BREUIL s’est surtout penché sur l’aspect chronologique et culturel ainsi que la paléontologie humaine et différents aspects de l’art pariétal comme l’étude des figures animalières des grottes mais il s’en conclu que la préhistoire n’est pas une science exacte, nous en connaissons que des fragments liés aux découvertes et nous n’en pouvons faire que des interprétations d’ensemble dans un temps immémorial , Nous n’aurons jamais accès à une vérité préhistorique, prétendument objective ce qui permet aux artistes comme MIRO, ERNST, KLEE, de laisser libre court à leur imagination tout en tenant compte des avancées des préhistoriens comme BREUIL et FROBENIUS
L’intérêt que MIRO trouvait dans ces revues et magazines, c’est que Préhistoire et modernité dialoguent , se confondent parfois dans ce musée imaginaire qui se déploie , page après page revue après revue à travers l’alternance d’images préhistoriques et d’art vivant dont le peintre faisait partie. Il s’intéressait aussi au livre de Georges HUGNET de 1933, soutenu par Paul RIVET et Levy BRUTEL qui développait l’hypothèse d’une identité entre les dessins d’enfants et les gravures du paléolithique dans son livre « enfance » illustré par MIRO lui‐même. « Miro a retrouvé le secret de la peinture rupestre enfoui dans la conscience des hommes en le ramenant à la surface et que l’on retrouve naturellement chez l’enfant. ». Il avait probablement lu également l’ouvrage à succès de Amédée OZEFANT « art de 1928 »ou il fait ‘éloge des grottes paléolithiques ornées avec de nombreuses reproductions
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L’opinion de MIRO en comparant les arts de tous les temps était que « La peinture est en décadence depuis l’âge des cavernes » . Son aphorisme ; qu’aucun artiste ne pouvait surpasser les peintures rupestres paléolithiques se rapprochait aussi de Jean CASSOU qui écrivait dans cahiers d’art en1926 « Nous pouvons aller aussi loin que possible, nous ne dépasserons pas la perfection inscrite dans les grottes d’Altamira… »
Les avis restaient divisés encore au temps de MIRO et même encore aujourd’hui sur l’art paléolithique et sa datation (en raison de la difficulté de recours à la stratification pour mesurer le temps est encore malaisé aujourd’hui pour déterminer une datation absolue par l’absence de matériaux organiques comme le charbon de bois qui exclue le recours au carbone 14 )
La préhistoire n’est pas une science exacte, nous ne connaissons que des fragments lies aux découvertes et nous ne pouvons faire que des interprétations d’ensemble dans un temps immémorial ce qui permet aux artistes de laisser libre court à leur imagination tout en tenant compte des avancées des préhistoriens comme l’abbé BREUIL et FROBENIUS
Fort de toutes ces connaissances qu’il avait accumulé sur la préhistoire ,l’art de la préhistoire mobilier ou pariétal ,des cavernes rupestres paléolithiques et étant donné que tout ce qu’on a pu dire sur la préhistoire et les grottes du paléolithique demeure incertain faute d’une temporalité précise, il existe donc un vide des origines que MIRO va utiliser pour donner libre court à tous les phantasmes du revival , de la déconstruction et d’une nouvelle naissance, c’est le sujet de ce tableau FYI volet1 ‐BESTIAIRE
Miro fait son choix avec l’art rupestre de l’ère paléolithique qu’il place au‐ dessus de toute la préhistoire en raison de la pureté de l’âme des hommes des cavernes qu’il imagine, de la vie dans la nature ( via la cueillette et la chasse) et surtout de l’importante de l’art mis en valeur par ces hommes des cavernes. Ils sont tout à l’opposé de l’homme contemporain conditionné par l’industrialisation, contaminé par l’argent, le désir de posséder et la vie moderne pleine de contraintes. Il veut créer un monde nouveau dont l’origine vient de l’art pariétal.
C’est ce qui semble le mieux lui correspondre pour son tableau FYI, tout en tenant compte des avancées des découvertes prodiguées par les préhistoriens et paléontologues et ainsi comme beaucoup artistes de l’époque de MIRO : Max ERNST, Paul KLEE, GIACOMETTI, il utilise toutes les libertés sur cet art des cavernes qu’il met en œuvre pour son art en effaçant l’espace temps ,ainsi cet art pariétal n’était pas d’hier mais d’aujourd’hui et qu’on pouvait y puiser et rester dans la contemporanéité
Miro sait qu’il peut se tourner vers le langage des peintres rupestres, des graffitis, des grottes préhistoriques pour donner une nouvelle dimension à ses symboles qui sont adaptés à leur fonction ornementales dans ses tableaux et il ne s’en prive pas. De grands signes tracés de façon sommaire avec des couleurs semblables à celles des peintres primitifs et préhistoriques avec un petit nombre de tons élémentaires( terre, ocre, noir, vert olive,) qui occupent les parois des cavernes altérées par le temps , c’est ce que l’on trouve dans ce tableau FYI. Il n’a cessé de dire qu’il considère la peinture de l’art pariétal comme le sommet de la peinture de l’humanité et que l’art moderne en est son illustre représentant. La peinture moderne c’est le retour à la case départ de la peinture préhistorique
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Nous verrons dans ce tableau que Miro préconise aussi le même cheminement en transposant le retour de l’esprit et de l’âme des êtres humains à la préhistoire qui est aussi selon lui l’Arcadie , la période idyllique de l’humanité, Pour lui son rêve c’est de revenir à l’aube de l’humanité et prendre un autre chemin que l’évolutionnisme qui a abouti à notre société contemporaine , c’est ce qu’il tente de nous dire dans ce tableau à double volets , c’est sa folie bienheureuse, son utopie qu’il ne peut faire passer que par sa peinture.
Dans la première partie du tableau FYI que j’ai appelé BESTIAIRE, on peut donc rapprocher cette masse sombre centrale aux contours flous et imprécis à un bovin d’un aspect primitif qui s’accorde bien à ce que l’on peut voir dans la caverne d’ALTAMIRA , sur le plafond orné d’animaux et de bisons. Il reprend le motif issue de la peinture rupestres qu’il admirait particulièrement ( FIGURE 2 page 10)
Le fond du tableau non peint, resté brut couleur ocre terre du papier cartonné qui a été Sali donne l’aspect du plafond de la grotte . Cette tête de bovin, on peut aussi la rapprocher d’un dessin d’enfant, ce n’est pas contradictoire avec l’idée de préhistoire car comme le dit HUGNIET , « le MIRO de la préhistoire c’est aussi l’enfance de l’art mais pas l’art de l’enfant » et selon EINSTEIN , MIRO lui-même à propagé le mythe de l’artiste comme enfantin et spontané .
Pour la spécialiste de MIRO Maria STAVRINNAKI « Miro veut revenir à l’enfance de l’art c’est-à-dire avant l’imitation de la nature et des règles transmis par ses prédécesseurs, à l’observation d’un jeune enfant dont les premiers gribouillages lui semblaient répéter le parcours de l’humanité depuis les premières figures tracées sur les parois des cavernes »
Par ce tableau FYI, v o l e t 1 ‐ Bestiaire ,MIRO refuse l’historicité de la peinture, d’un évolutionnisme monolithique et d’un art standardisé, au contraire MIRO se tourne vers un retour aux origines des cavernes rupestres et d’une temporalité asynchrone qui avaient été évoqués par les préhistoriens l’abbé BREUIL et Emile CARTAIHLAC .L’antiquité devient prime jeunesse, l’âge des cavernes un état d’esprit à la compréhension de l’enfance
Ce tableau FYI on peut aussi le rapprocher dans son esprit du tableau de MATISSE « le bonheur de vivre » ( FIGURE 16 page 35)
Pour MATISSE son bonheur de Vivre a pour origine la période paléolithique représentée par l’art Pariétal qu’il veut réactiver dans son tableau à la période contemporaine. Cet art des cavernes on le retrouve donc dans le tableau de MATISSE « le bonheur de vivre » qui est suggéré dans le tableau à sa droite par une cavité de grotte concave coupée en deux par une fissure et sur laquelle sont dessinées deux chèvres sur le point d’entrer dans la caverne. Un jeune berger les accompagne au son de la flute, traduction musicale d’un ensorcellement des bêtes entrant dans la caverne. Comme MIRO il occulte l’espace‐ temps, la paroi de la caverne nous fait passer du monde des cavernes rupestres à l’Arcadie d’un monde contemporain comme voudrait se l’imaginer MATISSE . Dans son tableau MATISSE ne dit pas comment y arriver contrairement à MIRO qui suit la même généalogie disjonctive et anti‐ évolutionniste mais nous le verrons, fait passer pour un retour en arrière immédiat de l’’époque contemporaine à l’âge des cavernes par une mort violente d’immolation par le feu du cratère de l’ETNA afin de purifier les âmes .
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Dans le tableau FYI de la 1er partie que j’ai appelé BESTIAIRE, il ne peut y avoir de mythe au sens plein c’est‐à‐dire narratif enraison de l’indétermination dans la datation de l’âge des cavernes du paléolithique du temps de MIRO et du silence de cette période car il n’y a pas d’histoire à raconter de cette période pas de trace de langage écrit,pas de mémoire, seulement l’indistinction des origines de l’humanité, tout est brouillé ,il est donc dans une impasse,. Nous verrons que MIRO ainsi va passer à un deuxième volet avec un bon de plusieurs millénaires dans le temps tout en gommant la temporalité et ainsi utiliser le mythe du philosophe grec EMPEDOCLE pour exprimer ce que MIRO veut nous dire à travers ce tableau et nous le verrons avec le deuxième volet, que la fin rejoint le commencement.
Miro nous fait basculer d’un volet à l’autre du tableau .Le pont de plusieurs millénaires pour passer de l’un à l’autre est à la fois l’oiseau qui symbolise l’homme ou la femme, la femme car la forme du bec fait penser à un sexe féminin mais aussi l’homme l’oiseau dans son entier à la forme d’une sexe masculin, le pont est aussi le signe calligraphique qui nous le verrons est une composition de 3 signes linéaires géométrique qui font parties du vocabulaire de base de MIRO
Chez Giacometti , une sculpture et une petite eau forte correspondante, travaillée au burin peuvent aussi se rapprocher du tableau FYI dans le même esprit, il s’agit du « Cube « de GIACOMETTI.
Comme BESTIAIRE la sculpture CUBE ( figure 18 page37), dont la forme d’une pierre de caverne préhistorique à l’aspect macabre , fermée comme une tombe ,avait d’abord été conçue au départ comme une chose accueillante et creuse à l’exemple de la joie de vivre de MATISSE puis dans un deuxième temps vient l’inquiétude, il l’a fermé pour ressembler à un objet mortifère ,dans son pendant de gravures , on y voit le même cube s’identifier cette fois à une figure féminine maternellement monstrueuse, vénus immémoriale enserrée dans la forme d’un rocher. L’angoisse de la mort y prévaut. Si Giacometti reste sur l’idée de mort à partir du CUBE, Miro également nous le verrons dans le deuxième tableau intitulé ETNA engage l’animal (l’oiseau représenté par sa tête au dessus de la tête du bovin ,l’oiseau peut être selon MIRO une représentation humaine , souvent féminine) aussi vers la mort mais Miro se sert de la mort pour recréer et faire renaître un nouvel être à l’âme purifiée et retrouver son état d’origine de l’humanité qui se situe pour MIRO au temps des cavernes rupestres.
Chez KLEE nombre de toiles comme « couple du monde primordial » utilisent l’art de la préhistoire. Dans ce tableau qui incarne une éternelle sacralité et une mélancolie , une utopie du bonheur parallèlement, cette mélancolie exerce une action reconstructrice sur le rêve de la préhistoire et l’utopisme , le bonheur d’une société préhistorique devient pessimisme jusqu’à l’horizon d’une terre inhumaine
Un peu plus tard en 1948 fut créé, une école d’ALTAMIRA qui considérait Altamira comme symbole de l’art vivant, de l’art en dehors du temps historique, elle favorisa la confrontation entre les réalisations paléolithique et les œuvres actuelles. L’école d’ALTAMIRA repose sur la conviction d’une correspondance profonde entre modernité et préhistoire et la symétrie entre ces deux époques pourtant si lointaines. Ces traces de la modernité semblent s’affleurer sur les parois des cavernes rupestres. On a dit que les grottes d’Altamira sont la chapelle sixtine de la préhistoire mais aussi la chapelle sixtine de l’art moderne et qu’il n’y a rien de plus jeune, de plus neuf, de plus moderne.
Cette présentation de la préhistoire conduit à une réécriture du temps historique ou contemporanéité et préhistoire se rejoignent. Cela a pour conséquence l’inanité du mythe
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SCULPTURE CUBE GIACOMETTI DESSIN DESSIN CUBE GIACOMETTI
FIGURES 18
Progressiste et cet homme des cavernes rupestre on a pu l’appeler contemporain. Miro bien avant l’ouverture de cette école adhérait déjà en 1934 à ces préceptes
Dans BESTIAIRE Volet 1 de FYI, le peintre nous montre un tête de bovin de caverne rupestre souriante et bienveillante à comparer aux bovidés du plafond de la caverne d’Altamira . Devant la tête se trouve le mur de la grotte érodée par les siècles écoulés et en ruine. C’est le premier regard qui vient à l’esprit dans ce tableau mais en s’y attardant et en regardant précisément ,on remarque que le peintre à la manière du film de science‐fiction « alien « fait sortir ou rentrer , nous verrons avec le 1er volet l’oiseau sort , alors que dans le volet 2 on a l’impression qu’il rentre ,du crane du bovin tout en douceur malgré sa couleur sombre un oiseau de mauvais augure ressemblant à un hibou ou chouette oiseau de nuit au crane aplati , bec crochu et une oreille surdimensionnée.
A partir de là le tableau se transforme dans un deuxième temps et parallèlement, subissant une métamorphose complète , nous passons alors dans le deuxième volet que j’ai appelé « ETNA » .
C’est alors que comme GIACOMETTI et sa sculpture et gravure « cube » ( figure 18 , page 37) et comme KLEE et son tableau « couple du monde primordial » les tableaux ont commencé par l’utopie, le bonheur , l’Arcadie de la préhistoire sous l’angle de l’art pariétal et la société contemporaine en passe de devenir inhumaine au regard de la période paléolithique.
Mais à la différence de cette constatation faite par GIACOMETTI et KLEE, Miro propose dans son imagination une peu folle de retrouver cette pureté des âmes dénaturée par la vie moderne en se référant à la légende d’EMPEDOCLE, ce philosophe qui s’est immolé par le feu pour ,croyait t’il
, retrouver la pureté des origines. La fin rejoint le commencement. C’est ce que veut nous dire le peintre dans son deuxième volet de FYI .
Mais avant de développer le deuxième volet ETNA , j’aimerais vous développer ce que j’ai retenu du style et de la manière de peindre de cette partie du tableau FYI ‐volet1
FYL :( BESTIAIRE + ETNA) est composé de 3 plans
Le 1er plan comporte le mur et dans la continuité au pied du mur une zone dans les mêmes tons que le mur, c’est la terre ferme , ce qui se passe à l’extérieur du mur Il s’agit d’un mélange de couleurs très fluides bleues, blanches, vertes sur un fond brut sans couche de fond et donc couleur du papier cartonné ocre terre .Dans la manière de traiter la matière de la peinture on peut le rapprocher du fond de son tableau « femme en révolte » de 1938 ( Figure 18 page 38)mais aussi des tableaux chinois d’artistes comme ZAO WOU‐KI ou CHU TEH CHUN
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FIGURE 18 a
Le 2eme plan est formée par cette masse énorme qui représente les ¾ du tableau au ton sombre composé de plusieurs couleurs fluides, dégradées très subtiles , légères car mélangées avec de l’essence de térébenthine qui donne cette fluidité à cette composition ce qui est à rapprocher avec les fonds des constellations , peintures des années 40 et 41, notamment le tableau « Femme en révolte » ( figure 18 a page 38)
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Dans la partie supérieur de ce 2eme plan en haut à gauche, le peintre a gratté la peinture (page133) jusqu’à retrouver le fond pour simuler probablement l’humidité du plafond de la grotted’ALTAMIRA afin de montrer que la grotte est vivante, irriguée par l’eau de ruissellement et montrecette humidité sensible à l’endroit de la peinture grattée.
Le fond du tableau laissé brut sans peintures , couleur du carton ,ocre terre, fuligineux a été sali volontairement probablement avec un pinceau non encore complètement nettoyé pour donner un aspect de poussière, de saleté
En ce qui concerne ce fond du tableau, on peut considérer que le peintre a voulu reconstituer les couleurs du plafond de la grottes d’ALTAMIRA d’où ce papier cartonné brut couleur ocre terre , sali pour donner l’aspect de la grotte originelle . Ce fond est à rapprocher dans sa composition de tableaux comme : « L’addition » « la naissance du monde » et « femme à la blonde aisselle coiffant sa chevelure à la lueur des étoiles » ( figure 20 page 39)
Dans ce fond sali et poussiéreux, le peintre dans un style spontané, y a placé une forme simplifiée, d’aspect enfantin, sans contour précis, qui fait penser à un bovin. Dans cette masse se détache des points noirs ( les yeux de l’animal), en bas des traits blancs ondulés ( les nasaux et la bouche de l’animal) , autour des yeux des traits concaves et convexes noirs discontinus et à gauche vers la partie montante du mur un trait noir convexe dont nous verrons les signification dans le chapitre consacré à l’ETNA.
Entre le mur et la masse du bovin‐bovidé, au niveau de la partie horizontale de ce mur on remarque des traces de peinture noires, appliquées aux doigts comme on en trouve dans les cavernes rupestres paléolithiques ornées ( figure21 page 40). Les empreintes des doigts sont visibles dans FYI et font la soudure entre le mur et le bovin
Jusque‐ là ,le peintre nous montre l’aspect idyllique de sa peinture , qui nous fait suggéré, l’art des cavernes rupestres et son caractère enfantin, réjouissant ou les hommes heureux s’adonnaient à la pêche ,à la chasse et qui leur laissaient tout le loisir de peindre et ainsi le peintre nous renvoie à tout ce que nous connaissons des cavernes rupestres d’ALTAMIRA et de tout ce qui a en a été dit et peint par les artistes peintres , les écrivains et surtout les préhistoriens, ethnologues, paléontologues et tout les spécialistes de la préhistoire Comme FROBENIUS, L’ABBE BREUIL, qui laissaient entendre que la période paléolithique était une période hors du temps car indéterminée faite de loisir de bonheur et de dons artistiques, l’homme vivant en bonne compagnie dans une nature luxuriante et bienfaitrice au milieu d’animaux
Le mur de la grotte du tableau « Bestiaire » placé devant la tête du bovin ou bovidé est le signe de l’entrée de cette grotte , ce lieu protégé de l’extérieur. Nous verrons dans le tableau du 2eme volet que devant ce mur tous les maux de la terre , les destructions , guettent au pied du mur, représenté par le serpent qui est prêt à attaquer sa proie et dans le coin en bas a droite le profil d’un paysan catalan coiffé du bonnet catalan qui semble abattu par toutes les misères qu’il subit de cette terre et semble attaquer par un monstre ( symbole de cette terre inhospitalière)
Ce mur a aussi d’autres significations chez MIRO qui se rapporte à ce tableau. Il sert aussi à équilibrer le tableau qui est dominé exagérément par cette masse sombre centrale qui prend les ¾ de la surface ( figure 10, page 11). La partie visible du mur qui continue hors du tableau est disposé pour former une forme géométrique à 3 cotés visibles .
Pour illustrer cette forme géométrique qui équilibre le tableau , il existe un tableau intéressant de MIRO qui illustre bien cette façon d’équilibrer un tableau face à une masse imposante , il s’agit du tableau « composition « de 1927 , que j’ai mis en parallèle inversé Dans les deux tableau on trouve aussi ce minuscule point rouge ( figure91 page 151). Il y a aussi d’autres interprétations de ce mur qui seront développées dans le chapitre suivant concernant l’ETNA, il s’agit de l’échelle ( de jacob) et du mur du philosophe EMPEDOCLE ( FIGURE 47-48 page 76)
Certains éléments visuels du tableau pris séparément ont une interprétation différente dans chaque volet Bestiaire et ETNA . Prenons 4 éléments représentatifs du tableau FYI ( Bestiaire + ETNA)L que sont :la masse centrale, le mur, l’oiseau ( femme) et la calligraphie en bas du tableau à gauche
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Ba‐LA MASSE CENTRALE : FYI
Dans BESTIAIRE la masse centrale sombre correspond à un bovin créée de manière spontanée sans préparation avec 2 yeux ( points noirs) des nasaux (des traits ondulées blancs sommaires)
Dans ETNA, la masse centrale correspond au volcan ETNA avec son cratère, ce volet sera étudié en détail ci‐dessous
Bb‐Le MUR de protection et mur du philosophe EMPEDOCLE
Dans BESTIAIRE du volet 1, (FIGURE 8 page14) le mur qui permet d’équilibrer le tableau face à cette masse centrale qui prend le 3/4 du tableau a aussi son utilité comme entrée de la grotte dans laquelle est placée le bovin ( ALTAMIRA figure 2 page 10) . Mais quand on voit ce que MIRO a voulu nous dire dans le volet 2 (ETNA) et que l’on revient au volet 1 ,Peut‐ être faut‐il voir aussi encore une autre signification , c’est alors que ce mur de la grotte apparait comme une protection de l’homme originel contre les agressions du monde extérieur,
c’est au temps préhistorique une protection contre une nature agressive et les animaux malveillants et monstrueux et aujourd’hui un environnement belliqueux de la modernité. Le tableau de MIRO est intemporel c’est l’ immédiateté qui prévaut que ce soit la préhistoire ou l’époque contemporaine que nous vivons. Le mur est donc considéré comme un mécanisme de défense de la grotte.
Pour René DROUIN ( galériste et dessinateur de mobilier) , l’homme moderne se trouve dans les mêmes conditions de terreur des faits matériels que les hommes du paléolithique. L’abri anti atomique est la grotte rupestre préhistorique mais MIRO ne se représente la préhistoire qu’à travers l’art Pariétal ou la nature, l’homme et l’animal vivent en bonne harmonie . L’homme occupe son temps à chasser à pêcher et aux loisirs comme dessiner et peindre. Miro a occulté tout ce qui se passe à l’extérieur de la grotte pour la bonne raison que nous ne savons pas, il n’y a pas de traces écrites ou orales aucune trace rapportée par l’homme a part certains objets qui ont été découverts ici et là
Dans ETNA du volet 2, le mur à une tout autre signification nous le verrons dans un prochain paragraphe ,il correspond à la tour en ruine du philosophe EMPEDOCLE( figure 4 page 5), mur ravagé par les coulées de laves ( ce mur a disparu en 2002 suite à une coulée de lave)
C’est aussi plus largement une annonce des peintures murales qu’il accomplira plus tard ou l’on retrouvera des motifs de peintures rupestres (animaux) , le feu utilisé pour les céramiques du mur, les couleurs ocre des murs délaves comme mur du tableau FYI ( ( mur de la lune de 1957 , siège de l’Unesco)
Bc‐ Le BOVIN
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Il s’agit de B o v i n ( figure 22 page 42) car le tableau ne semble pas vouloir faire la distinction. Je pense que dans l’esprit de MIRO c’est un bovin mais dans le tableau ce pourrait être aussi un bovidé et plus précisément un bison comme celui représenté au plafond de la grotte d’Altamira. De plus chez MIRO , les taureaux, bœuf ou vaches sont confondus sexuellement dans une créature hermaphrodite aux propriétés divines .c’est un animal familier de MIRO mais dans le tableau pour être en phase avec l’aspect de la grotte D’ALTAMIRA il pourrait s’agir d’un bison, animal que l’on retrouve au plafond de la grotte
Ce triptyque du tableau , Bovin , oiseau serpent présents dans FYI sont des signes de prédilections de MIRO . On les retrouve dans ses peintures, lithographies, affiches d’exposition ou sculptures en très grands nombres
Pour MIRO le bovin ( taureau) n’a pas la même signification que PICASSO, LEIRIS ou MASSON .Le bovin pour MIRO c’est d’abord l’animal qui représente son pays : l’Espagne et contrairement à PICASSO dont le taureau représente la force et parfois la mort, à la manière de la tauromachie. Miro n’est absolument pas un aficionados malgré qu’il habite dans la ville des amateurs de taureaux mais il appréciait l’iconographie et le symbolisme du sujet si lié au monde méditerranéen et magique. Le taureau c’est aussi le mythe de la séduction et de la mort récurrents dans les arts figuratifs et abstraits. Il fréquentait aussi des passionnés de tauromachies comme le critique de corrida GASH, DUPIN, LEIRIS, MASSON
Miro, lui à la manière d’un paysan, qui vit avec ses bêtes voit surtout dans le bovin l’animal rieur et sympathique de douceur . Il lui rappelle la ferme de catalogne avec tous ces animaux qu’il aimait représenter dans ses tableaux de 1920 à 1924 ( La ferme, terre labourée etc) mais aussi tout au long de sa vie d’artistes et avec les tableaux rupestres sous forme de lithographies qui datent de 1979.
Dans le tableau FYI le bovin rieur est perceptible par les lignes blanches ondulées qui font office de naseaux et de bouche en bas à droite
Un tableau important ,premier tableau sous forme de dessin de MIRO présent dans un musée Français en 1945 ( musée d’art moderne de Paris) qui a été offert par MIRO est « course de taureaux « ( FIGURE 23 page 42)
Un signe graphique en bas à gauche en forme de calligraphie ou idéogramme est une juxtaposition des « éléments du vocabulaire basique de MIRO ( figure 24 page 43) mais c’est aussi dans le language phénicien ou vieux grec la signification du mot « taureau » ( Figure 11 page 16), est‐ce un hasard ou délibéré de la part du peintre ! Il a donc son sens dans les deux volets du tableau ( arc et flèche dans language préhistorique, Taureau dans le language grec ancien ou phénicien)
Bd‐ L’OISEAU, VOLET1‐2 ‐BESTIAIRE‐ETNA
Dans BESTIAIRE volet 1 ( figure 27 page 44) l’oiseau est un être malveillant ,inquiétant, , ténébreux, qui sort de la tête du bovin
Dans ETNA volet 2 ( figure 27 page 44), il s’agit d’un oiseau ,être disloqué qui pénètre dans le volcan, qui sera brulé par le feu du volcan pour en ressortir un être nouveau , recomposé et purifié ..
Dans l’ordre de création du tableau FYI on peut imaginer l’ordre suivant. D’abord création de la masse représentant le BOVIN de la caverne d’ALTAMIRA ensuite création du mur et de l’oiseau qui nous fait basculer dans un autre volet de FYI, le bovin devient la montagne ETNA et de là MIRO met en image la légende D’EMPEDOCLE dans ce deuxième volet pour un retour définitif au premier volet , la boucle est bouclé à l’infini , la fin rejoint le commencement, notre société mourante redevient prime jeunesse.
L’oiseau est la courroie de transmission pour bien se représenter le tableau
Le tableau FYI est une imbrication entre l’origine ( volet 1‐bestiaire) et le présent ( volet 2‐ ETNA) comme si le temps n’existait pas. Les traces de doigts dans le tableau ( figure 25 page 43) ( entre le mur et le BOVIN ou la montagne) sont comme les traces de doigts ou de mains très fréquents dans les grottes qui symbolisent l’immédiateté , la rapidité de l’action , du passage d’un doigt comme si cela venait d’arriver , la peinture grattée ( figure 26 page 43) au haut du tableau à gauche symbolise la vie par des gouttes d’eau qui ont traversé le tableau et ont altéré la peinture, de la même manière que des gouttes d’eau du à l’humidité qui avaient traversées le plafond de la grotte d’ALTAMIRA
Miro abandonne la caverne rupestre et d’un tour de magie, le bovin se métamorphose en montagne volcanique, L’ETNA, Le mur qui est alors situé au pied du volcan devient « la tour du philosophe EMPEDOCLE » tout cela sans rien effacer du volet précédent, le plafond de la caverne devient un ciel volcanique dont la couleur ocre terre reflète les poussières volcanique en suspension dans le ciel. Nous voilà dans le 2eme tableau que j’ai appelé ETNA et qui fait l’objet d’un nouveau chapitre.
Dans ce 2eme tableau il se réapproprie une image déjà existante par lui‐même pour créer un nouveau tableau totalement différent et détournée par superposition pour former cette nouvelle œuvre , de la même manière qu’il a crée « L’Hirondelle éblouies par l’éclat de la prunelle rouge ( FIGURE 9 page 15) ) » le tableau de 1925 a été repris en s’inspirant de lui‐même pour créer un nouveau tableau en 1960 auquel il a rajouter des éléments ( retouche des yeux avec de la couleur, ajout de points noirs, ligne concaves ouvertes ) sans supprimer des éléments du tableau de 1925 comme dans FYL
D’autres tableaux très connus dans ce sens sont les autoportraits de 1937 et 1960 ou MIRO a repris une reproduction de « l’autoportrait » de 1937 ( figure 28 page 44) pour y rajouter des traits noirs épais et 5 taches de couleurs
L’oiseau semble donc le déclic de métamorphose qui pousse MIRO a crée un nouveau tableau dans le précédent et passer dans l’immédiateté de la préhistoire à la période grecque présocratique et à notre civilisation occidentale contemporaine.
l’oiseau représentera la pureté qui sort du feu du volcan ,un nouvel être pur suite à l’immolation par le feu , c’est le cycle éternel vu par MIRO selon la théorie présocratique de EMPEDOCLE, de la mort nait une nouvelle vie.
Souvent l’oiseau symbolise pour MIRO , le mouvement ou l’envol , le passage d’un élément à un autre , l’ascension de la terre vers le ciel ,porteur de la profondeur et de l’espace infini.
Dans le tableau FYI il est l’instrument de la transcendance à double titres :
D’une part , transcendance pour passer sans transition du volet 1 ( BESTIAIRE) au volet 2 ( ETNA), autre transcendance pour passer à un nouvel être purifié prêt à s’envoler et à se retrouver dans l’être originel du début de l’humanité selon le message porté par MIRO de retour à l’homme de l’art pariétal.
L’oiseau c’est un personnage clé de l’œuvre de MIRO comme la femme, le soleil, la lune, les étoiles. Cet oiseau typique de MIRO est souvent représenté comme celui du tableau avec de gros yeux ronds ou en amandes comme des haricots, disproportionnés par rapport au reste du visage immédiatement reconnaissable à MIRO dans leurs simplicités.Dans FYI au stade 2 , MIRO nous montre l’oiseau dans son aspect sombre ( il ressemble à un hibou, oiseau de nuit) avant d’être brulé et purifié par le feu du volcan, il rentre dans le volcan pour en ressortir libéré et purifié vers le ciel.
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l y a un autre aspect de MIRO que l’on remarque à partir de l’oiseau de FYI c’est l’humour avec son œil immense rond et le sexe féminin à la place du bec .
L’oiseau peut être transformé aussi en sexe masculin Comme souvent aussi MIRO relie l’humour au thème sexuel. Dans l’oiseau de MIR0 il y a un peu de la poésie de JARRY avec son personnage UBU
En résumé L’oiseau dans FYI c’est le vecteur de transformation de l’âme qui doit sortir purifié du volcan comme le prétend EMPEDOCLE, MIRO se sert de cette légende, de cette mythologie pour construire ce tableau dans son imaginaire mais il y a toujours chez MIRO cette ambiguïté entre optimisme et pessimisme alors y croit t’il vraiment. Ce questionnement est visible par l’oiseau qui garde un aspect cruel et comique
Be‐LE CRUEL ET LE COMIQUE
Comme indiqué ci‐dessus à partir de l’oiseau qui se veut un élément sérieux du tableau car il représente l’homme , la femme, MIRO, l’humanité entière que MIRO imagine l’âme purifié pour créer un monde meilleur, un retour à l’homme originel il ne peut s’empêcher de l’affubler de comique et de cruel.
MIRO rappelle souvent dans ses entretiens, dans ses écrits « Je pense que tout va tourner très mal » et « s’il y a quelque chose d’humoristique dans ma peinture, je ne l’ai pas cherché consciemment. Cet humour vient peut être de ce que j’éprouve e besoin d’échapper au coté tragique de mon tempérament , c’est une réaction mais c’est involontaire. »
L’humour de MIRO a souvent un arrière‐ goût de violence, de cruauté particulièrement troublant. Sa vision de l’image humaine est souvent dévastatrice et rappelle les distorsions impitoyables de PICASSO mais parfois l’atmosphère est plus détendue et alors les contorsions et les grimaces de ses personnages provoquent le rire par leur bouffonneries innocentes ou le grotesque
Dans FYI, humour et cruel se contrebalancent comme pour s’annuler l’un et l’autre afin qu’il ne reste plus que l’aspect sérieux, philosophique, prophétique du tableau . Dans cette optique le peintre dans FYI suit les préceptes du présocratique HERACLITE et l’alliance des contraires dont le processus est de rapprocher les contraires (cruauté, humour) pour les annuler
En effet pour arriver à cet aspect rédempteur que suggère FYI, il faut passer par la phase cruelle de destruction des corps, de la mort par le feu du volcan
C– ETNA
Tout d’abord ces quelques phrases du peintre TAPIES en 1973 qui résument très bien ce 2eme volet
« ETNA » étudié ci‐dessous et ce que l’on peut en extraire comme sens général
« Face à un univers crée et contrôlé par les Dieux, Miro nous offrait le flux continu, changeant et infini de la nature . Devant l’orgueil monstrueux des puissants, il montrait que nous sommes tous égaux parce que nous sommes faits de la flamme même des astres , que nous devons à nouveau chercher la pureté, l’innocence du 1er jour , que la vie était lutte et avant tout renouvellement »
Ce volet aux conclusions étonnantes dans l’idée qu’il peut faire suggérer au regardeur on le retrouve dans ce tableau FYI
D’abord il faut signaler que la montagne, l’oiseau et le mur ne sont pas proportionnés dans le tableau FYI , il faut se rappeler que MIRO accorde la même importance à l’infiniment grand qu’à l’infiniment petit, pour lui les ordres de grandeur n’existent pas . Il disait qu’une Montagne, un arbre ou un brin d’herbe avaient la même importance à ces yeux , ce sont des êtres vivants . Même l’homme aux yeux de MIRO ne peut se prévaloir de sa supériorité sur l’arbre. La mer ne pèse pas plus lourd que la goutte de rosée, la montagne n’est pas plus haute que le brin d’herbe. Pour lui dans la réalité de la nature toutes les créatures sont équivalentes, toutes infiniment précieuses mais aucune n’est irremplaçable . Cette façon de voir le monde est aussi à rapprocher de la philosophie japonaise. Dans une lettre à RAFFOLS il disait lui indiquer sa joie de comprendre dans un paysage un petit grain d’herbe en ajoutant qu’à part les primitifs et les japonais presque tout le monde néglige les choses divines. Cette absence de perspective, de proportion entre les choses s’accorde donc tout à fait au tableau FYI
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C1‐MONTAGNE
Miro a toujours été intéressé par les paysages de MONTAGNE( figure 30a page 47). Il a passé une partie de son enfance à MONTROIG et y est revenu tout au long de sa vie y passer quelques mois d’été, c’était son point de repère qui était à l’origine de la plupart de ses tableaux faisant état de la nature.. Il aimait MONTROIG pour ses paysages de rochers et sa situation adossé aux premiers contrefort des montagnes. Les paysages montagneux reviennent très souvent dans ses tableaux et notamment les montagnes volcaniques à l’exemple de « paysage au serpent de 1927 » ( figure 30 page 46) ( voir figure et comparatif du tableau page ) ou nous trouvons le pendant de FYI ( volcan cratère ,terre, ciel, serpent, la tour du philosophe) mais aussi « la sauterelle », « paysan catalan au repos » « mes flammes du soleil rendent hystérique la fleur du désert » et d’autre part des tableaux ou la montagne , le volcan est l’image cachée du tableau comme FYI‐ volet 2 , on peut y trouver « l’autoportrait de 1919 » ou la FORNARINA de 1929
Certaines choses immobiles comme un galet, une montagne déclenchent dans l’esprit de MIRO de grands mouvements qui ne s’arrêtent jamais, qui n’ont pas de fin . C’est la Montagne ETNA que MIRO utilisera dans le tableau FYI pour la faire vivre .
Ce n’est pas facilement que l’on trouverait dans un groupe des individus de nature aussi différentes que les 3 principaux peintres surréalistes ERNST,MASSON et MIRO qui pourtant se rejoignent sur 1 point ou plutôt sur un trait de leur génie qui les rassemblent et ce trait ou ce point caractéristique c’est le volcanisme.
DUPIN qui connait l’amour de MIRO pour les montagnes volcaniques écrit dans sa biographie sur ses peintures en support MASONITTE de 1936 « le peintre lui-même devient volcan, entre en éruption", ‐
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projette sur le support de la Masonite les signes bruts et les matières effervescentes dont il doit se délivrer »
MIRO nous dit sur l’amour de ses montagnes « Les montagnes fantastiques jouent un rôle dans ma vie et le ciel aussi, pas dans le sens romantique allemand, c’est le choc de ses formes sur mon esprit plus que la vision. A MONTROIG, c’est la force qui me nourrit. MONTROIG c’est le choc préliminaire primitif ou je reviens toujours. Ailleurs tout se mesure par rapport à MONTROIG »,
il dit aussi « Je peins avec le feu d’un volcan dans l’âme continuellement non par intervalle »
Alors que du temps d e s fresques romanes, de » la préhistoire, ce sont les animaux qui ont une grande importance (comme dans Volet 1 de FYI), dans la civilisation occidentale c’est l’énorme montagne qui a tous les privilèges.( comme volet2‐ETNA)
C2‐POURQUOI L’ETNA
Pour MIRO les choses sont vivantes même si elles sont immobiles. Comme les arbres , les montagnes ont un caractère sacré, mythologique par leurs côtés anciens et vivants .
La mythologie de L’ETNA évoque une symbolique de la puissance naturelle libérant des énergies de la nature soumise à la volonté des DIEUX dans les civilisations antiques. Dans ces civilisations, une montagne comme l’ETNA est sacrée, elle apparait comme un monde intermédiaire entre l’homme et les Dieux ( purification des âmes selon EMPEDOCLE) mais aussi source de terreur par ses destructions causées par la lave qu’elle déverse
Le volcan ETNA est une chose vivante en mouvement perpétuel dans son antre et présent chez les hommes depuis des siècles .Comme les hommes, il puise son énergie de la terre qui remonte jusqu’au sommet. Dans le tableau il est bien délimité par rapport à la terre et le ciel avec une base bien posé dans le sol de la même manière que les personnages de MIRO avec des pieds énormes pour bien montrer que l’énergie remonte par les pieds comme par exemple, « la fermière » de 1924)
Il vit au milieu des hommes , lui apporte bienfaits, par sa terre fertile mais c’est aussi un être maléfique quand il surgit et déverse de la lave qui emporte tout sur son passage, détruit les hommes et les biens . C’est une interaction du bien et du mal .
La montagne volcanique s’accorde bien aux peintures de MIRO des années 30 et prises au sens propre comme au sens figuré comme des éruptions volcaniques qui emportent tout sur leur passage Ces périodes entre 28 et 33 sont appelées par DUPIN « assassinat de la peinture » et la période qui suit « les peintures sauvage » .FYL de 1935 se situe dans la période sauvage .
Le feu suggère le désir de changer, de brusquer le temps, de porter toute la vie à son terme et à son au‐delà. L’être fasciné par le feu selon BACHELARD entend l’appel du bucher, pour lui la destruction est plus qu’un changement , c’est un renouvellement. Cette rêverie détermine un véritable complexe
,complexe ou s’unissent l’instinct de vivre de l’instinct de mourir, c’est ce que BACHELARD appelle le complexe d EMPEDOCLE
Plusieurs raisons font penser que cette montagne représentée dans FYI , 2eme volet est bien L’ETNA. Cet interaction du bien et du mal, de la destruction et de la construction nous le retrouvons dans ce 2eme volet de FYI , destruction des corps pour renaissance des âmes selon EMPEDOCLE . En effet EMPEDOCLE se précipite dans le chaos du cratère pour que son moi se dissolvant renaisse un monde meilleur car il croyait dans la métempsychose permettant aux âmes l’expiation et leur salut
Cette montagne ETNA de FYI peut donc être vue d’une part comme un monstre qui se nourri de chair humaine par le feu et exprime la terreur des hommes mais il a aussi un aspect bénéfique dans FYI car il recrée un nouvel homme purifié et libre qui le sort de l’emprise du serpent en bas du tableau et de tous les maux contemporains de la terre actuelle. MIRO utilise cette image de L’ETNA et de la légende d’EMPEDOCLE qui sera développé ci‐dessous car il ne croit plus à l’idée la plus rependue du XX éme siècle qui consistait à supposer que les changements technologiques entrainant une mécanisation et l’utilisation des moyens chimiques, électroniques etc rendraient l’homme meilleur à tous points de vue et plus heureux et que cette évolution est irréversible. Pour MIRO l’humanité s’est orienté sur un mauvais chemin et il n’y a pas d’autre moyens que purifier l’âme des être humain pour changer le monde comme il l’entend.
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Tout d’abord le cratère d’où sort l’oiseau, montre une montagne volcanique en activité avec un feu étoilé sur le flanc droit qui fait penser à des fumerolles éruptives( figure 30 page 49), de la même manière on retrouve ce feu étoilé dans l’œil de l’autoportrait de 1937 ( figure 31 page 49)qui exprime le feu intérieur de MIRO.
Ensuite, le mur devant le volcan qui fait penser au mur en ruine de la tour du philosophe EMPEDOCLE ( figure 4 page 10) et enfin sur des photos de l’ETNA vues sur un des versants au pied de l’ETNA on remarque une forme faite de roches de laves du volcan ; Cette forme ressemble au serpent du tableau , la gueule ouverte . L’idée du serpent dans le tableau au pied du volcan est peut êtrer venu à MIRO grace à cette reproduction photographique de l'ETNA ( figure 4 page 11)
Enfin le fond du tableau non peint et Sali sans doute par des traces de pinceaux à nettoyer fait penser à un ciel fuligineux des poussières dégagées par le volcan et sur le côté , à droite du volcan un halo de peinture verte fait penser à des vapeurs de chaleurs dégagées par le volcan à l’aube.
Tout ces éléments significatifs sont mis dans le tableau pour faire penser à un volcan et l’ETNA en particulier. En définitive le rôle de L’ETNA dans le tableau , c’est l’élément transformateur qui fait passer d’un monde à l’autre , du monde de la terre chargé de tous les maux de toutes les souffrances au nouveau monde de MIRO pour la félicité
Comme indiqué ci‐dessus dans la préface, Miro , grâce à MASSON et ses amis de la rue BLOMET , s’était intéressé à la civilisation grecque antique et notamment aux présocratiques, HERACLITE,PYTHAGORE,PARMENIDE et EMPEDOCLE.
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C3‐EMPEDOCLE
En ce qui concerne EMPEDOCLE . Il aurait terminé sa vie selon la légende en se jetant dans le feu du cratère de L’ETNA pour purifier son âme afin de se mettre en accord avec sa philosophie. Ce suicide est la conséquence de sa philosophie, pour lui ce qui nous apparait comme un début et une fin n’est qu’une illusion , en réalité il n’y a que mélange ( voir paragraphe ci‐dessous , philosophie présocratique de EMPEDOCLE‐HERACLITE)
Il aurait laissé ses sandales au pied du volcan avant de disparaitre dans le feu du volcan et à cet endroit fut érigé ce qui a été appelé « la tour du philosophe » Au fil des siècles la tour fut attaqué à maintes reprises par la lave du volcan et à l’époque de MIRO il ne restait plus qu’un mur en ruine qui a été totalement détruit par l’éruption du volcan en 2002 ( figure 4 page 11)
Comme indiqué ci‐dessus une photo de ce versant de L’ETNA en noir et blanc est étonnamment proche du tableau FYL, volet ETNA ( figure 3 page 10) ) ou l’on voit distinctement le mur en ruine de la tour du philosophe avant 2002
Miro part donc d’une légende, la légende d’une croyance, la légende d’EMPEDOCLE qu’il met en scène par l’image dans FYI volet 2. De cette légende il crée un nouveau mythe , une nouvelle humanité sous les ruine de l’ancienne. MIRO n’accepte pas le concept de la vie adaptée à la réalité en se contentant d’actions réformistes et avec la légende d’EMPEDOCLE adaptée à son imagination il adopte une action radicale
D’abord quelques lignes sur le personnage EMPEDOCLE, sa vie , sa philosophie et ce qu’il en reste aujourd’hui.
De son vivant ( ‐490, ‐430) EMPEDOCLE dans sa ville D’AGRIGENTE en SICILE il était considéré comme un être extraordinaire capable d’exploits comprenant la prévision, la thaumaturgie, l’ubiquité,l’anamnèse de vies précédentes, le voyage extatique et la translation dans l’espace. Il était ingénieur et exerçait la philosophie et la poésie
Sa pensée était influencée par l’orient, l’orphisme et le pythagorisme. Avec PYTHAGORE , HERACLITE, PARMENIDE, PYTHAGORE les plus connus il faisait partie des philosophes grecs présocratiques. Il avait suivi l’enseignement de HERACLITE .Il faisait aussi partie de l’école D’ELEE ( ELEE , inventeur de la dialectique). A la fin de sa vie ,il déclara qu’il avait atteint l’état suprême , qu’il n’était plus mortel mais un Dieu immortel . il se suicida en se jetant dans l’ETNA
Il est le fondateur d’une doctrine déjà entrevue par ses prédécesseurs mais à laquelle il a donné sa formule définitive , les 4 éléments : la terre, l’eau, l’air, le feu . La combinaison de ces 4 éléments forment tous les êtres vivants de l’univers .Ils répondent aux apparences et aux états de la matière.
‐La terre est le principe et le support de l’état solide et de la sécheresse
‐ l’eau obtenue soit par fusion ignée soit par dissolution est le support de l’état liquide ou du froid
‐l’air est le principe de l’état volatil et gazeux
‐ le feu, plus subtil répond à la fois à la notion de fluide éthéré, support symbolique de la lumière ,de la chaleur,
Par exemple les quelques traits noirs, concaves, convexes, nous signalent le démembrement des êtres à l’intérieur du volcan. ( Figure page 70 )Dans ce tableau malgré l’aspect minimal de cette œuvre , nous avons un grand nombre d’éléments figuratifs , de signes, de symboles qui se signalent au regardeur et sont importants pour la compréhension du tableau
Il faut se rappeler ce que disait MIRO pour la compréhension de ses tableaux. IL ne donne jamais d’explications à ses tableaux,, il ne veut pas dévoiler et révéler le secret de son travail , il ne donne jamais de renseignements sur ses sources d’inspiration, il n’aimait pas le faire.il ne fait que suggérer, c’est au regardeur de les construire lui‐même en utilisant son imagination, en utilisant les fragments et le vocabulaire de base de MIRO dont il se sert pour construire ses tableaux et d’interpréter ce qu’il voit mais surtout ce qui ne se voit pas .
Pour Miro le tableau doit toujours avoir quelques obscurités et autres significations., il ne révèle pas les secrets de son travail, il veut maintenir son universalité
Les gens doivent continuer à regarder et à penser sur le tableau , faire des efforts pour apprécier pleinement le tableau, Il n’accepte pas de réduire son niveau d’exigence pour favoriser la compréhension sinon il n’y a rien de plus que l’immédiateté vide comme l’on regarde une publicité où il faut tout comprendre en quelques secondes.
Ce tableau FYI en est un exemple représentatif. Cette étude sur ce tableau montre tous les côtés obscurs et l’ouverture libre des significations. Un tableau ne doit pas toujours avoir une signification profonde , universelle et significative afin que chacun puisse voir ce qu’il souhaite
Miro insiste aussi dans ses entretiens qu’il n’a pas le coté perfectionniste des peintres classiques et il ne cache pas ses maladresses. Il montre le côté humain, artisan ,de la peinture . Pour lui ce n’est pas la beauté du tableau, l’esthétisme qui compte, ce qui compte, c’est l’esprit dans la peinture, c’est faire réfléchir le spectateur et lui suggérer par l’imagination des messages ; C’est le germe, l’idée qu’il suscite qui importe dans le tableau mais dit il , « s’il est détruit , jeté, ce n’est pas grave du moment que le germe prend racine». Il disait en parlant des peintres : « Nous ne sommes rien, c’est ce que nous cherchons qui est tout »
Mais aussi Miro disait qu’il est difficile de parler de ses peintures, il ne propose même pas d’explication à lui‐même car parfois il ne sait pas lui‐même, ça peut être un travail d’hallucination ou de choc de quelque chose et les résultats sont inattendus même pour lui‐même .
Dans FYI, il y a probablement de tout cela, il y a des chocs, du rêve, des hallucinations et le résultat était sans doute inattendu pour lui‐même . Par exemple, il donne une nature humaine et même nature de demiurge à la Montagne ETNA comme il donne une nature humaine aux arbres ( dans certains tableau il pare l’arbre d’oreilles humaines)
Le résultat fini est rarement refait. si le travail le convint, il est supposé fini sinon il le détruit ou le laisse de côté, le temps le persuade et il l’accepte sans retouche, il modifie rarement mais devient un stimuli pour un autre tableau , un autre projet de travail. Parfois il reprend des fragments de tableau pour le placer dans un autre tableau ( exemple, peinture 1927 et Paysage animé de 1927) ( figure 59 page 102
L’important pour MIRO ce n’est pas de terminer une œuvre mais de laisser entrevoir qu’elle sera un jour au commencement de quelque chose
D13 ‐LES IMAGES ( REBUS)
Les images présentées dans le tableau notamment le volet 2‐ Etna peuvent être lus à la manière d’un rebus. La montagne (ETNA,) le mur ( tour du philosophe), l’oiseau qui sort du cratère font penser à EMPEDOCLE . Au moment ou ce nom apparait à la vue du spectateur, tout le reste du PUZZLE se met en place et a un sens ( le personnage, le serpent etc) et on comprend mieux le chevauchement du volet 1‐ bestiaire au volet2 ‐Etna
D14‐FYI ENTRE FASCINATION ET DENONCIATION DE L’IMAGE
Comme indiqué ci‐dessus , le peintre suggère plutôt qu’être directif dans ses tableaux et comme il le dit, il ne cherche pas à faire beau en utilisant les canons de la peintures ,
« ce qui compte , c’est ce qu’il jette en l’air, ce qu’il répand. Peu importe que le tableau soit détruit . L’art peut mourir , ce qui compte c’est qu’il ait rependu des germes sur la terre… Une peinture , en effet, il ne faut pas se soucier qu’elle demeure telle quelle , mais plutôt qu’elle laisse des germes , qu’elle répande des semences d’où naissent d’autres choses. »
Selon Remi LABRUSSE, la plupart des productions de MIRO avant 1945 reposent sur un double postulat, une propension simultanée a faire de l’image un objet de fascination et à l’inverse à dénoncer l’image du visible sur la vie ; célébration des pouvoirs de l’image et dénonciation concomitante de ses faux semblants, ce qu’il appelait dès 1927, « l’assassinat de la peinture » cette double postulation produit dans l’esprit du spectateur une instabilité mentale et visuelle ;.dans ce combat qui s’oppose, le plus important c’est la tension entre une vie invisible, constitutive du sujet et les formes visibles que celles‐ci se donnent pour objets. C’est l’épreuve d’un infini radicalement étranger au monde des phénomènes extérieurs et donc aux images, d’un infini intérieur , primordial et fondateur
Dans FYI le plus important ce n’est pas ce qui se voit mais ce qui est invisible , Ce n’est pas L’ETNA, l’oiseau et le mur mais ce qui se passe à l’intérieur du volcan dans l’imagination du peintre c’est‐à‐ dire une destruction et une reconstitution des êtres pour ressortir purifiés Cette destruction invisible est symbolisée par quelques traits noirs au milieu du volcan ( démembrement des êtres) , par les étincelles en forme d’étoile en surface au niveau de l’œil vu à droite dans le volet 1, qui montre l’activité créatrice qui se dégage sous les roches de l’ETNA A ce point de vue on peut rapprocher ce tableau des autoportraits de 1937‐1960
D15‐ LES FIGURES DE MIRO dans FYI
Pêle ‐mêle , nous trouvons dans FYI une tête de bovin, l’œil ,les grandes oreilles l e serpent, le le paysan catalan et sa BARRETINA, le mur, la montagne, la terre, le ciel, le volcan , l’étoile, les lignes droites,ondulées, concaves ,convexes , le sexe féminin, le sexe masculin c’est‐à‐dire des formes parfois excentriques, parfois humoristiques qui font typiquement partie des formes Mironiennes qu’on retrouve plus ou moins dans tous les tableaux de MIRO mais qui se réinventent sans cesse, on les retrouve dans beaucoup d’autres tableaux mais avec des variantes. Comme dans certains styles préhistoriques, archaïques , la taille, l’agrandissement des figures reflètent leur importance dans le récit et vont parfois jusqu’à un niveau de caricature ( dans FYI, taille de l’oiseau, œil de l’oiseau, sexe féminin à la place du bec par rapport à la montagne) par opposition à une corrélation fidèle dans l’espace perspectif
Parfois il y a confusion entre les êtres et le choses. Ainsi dans FYI l’oiseau peut être transformé en sexe masculin mais aussi en calligraphie ou calligramme où l’on peut lire le M de MIRO et même en cherchant bien aussi le nom entier MIRO avec superposition des lettres M et R
C’est au regardeur de mettre de l’ordre dans tout cela et de déterminer des significations el là MIRO ne nous aide pas , il ne donne pas d’explications .Parfois il nous laisse découvrir ce que lui‐même n’avait pas pensé, c’est‐à‐dire que les réponses peuvent être multiples
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En résumé dans ce volet 2 de FYI, Miro joue le rôle de prophète et de révélateur du monde. Il juge que le monde arrive à sa fin , qu’il a pris une mauvaise pente. On retrouve dans ce tableau le pessimisme de MIRO ( Bas du tableau avec le serpent). Pour lui ,l’avenir de l’humanité ne peut être sauvé qu’en retrouvant sa pureté originelle du temps des hommes des cavernes rupestres FYI, volet 1‐bestiaire et il utilise l’exemple du philosophe EMPEDOCLE pour la régénérescence de l’homme par l’image du volcan ETNA avec la purification de l’âme par le feu suivant la légende d’EMPEDOCLE
Miro se comporte comme un demiurge, pouvoir qu’il transmet aussi au VOLCAN. Ces preuves de croyance de MIRO de la condition de l’artiste en tant que prophète et demiurge sont innombrables dans les interviews, déclarations et écrits . Dans un de ses derniers documents en 1980, il écrivait encore dans ses notes, son intention d’être un prophète qui annonce un nouveau monde fondé sur une inspiration primitive
Ce tableau Volet2 de FYI a aussi une expression religieuse, poussé par un besoin spirituel dans ce désir de purification de l’âme humaine en supprimant les pêchés accumulés par les hommes .
On retrouve ici dans ce tableau une transposition de la réalité cher à MIRO qui reflète un monde imaginaire dans un espace de fantaisie et de rêve mais un espace de rêve qui est égal à la raison et à l’imagination par une relation ambivalente avec la réalité et sa représentation par la nécessité de refléter un monde de faits imaginaires de transposition de la réalité mais toujours en deçà, Il met toujours en avant par sa qualité d’artiste , la vie et la liberté. Il utilise l’imagination pour spéculer à partir d’éléments du réel.
D16‐ LES TITRES DES TABLEAUX
Les titres des tableaux de MIRO sont souvent des allusions à l’héritage artistique . C’est parfois MATISSE qui choisissait le titre quand il était absent des tableaux de MIRO . Quand il n’aimait un titre choisi par MATISSE il lui faisait savoir ainsi dans une lettre du 12 octobre 1934 il dit à MATISSE ;
« J’ai beaucoup réfléchi à la question des titres, je dois vous avouer que je n’en trouve point pour ceux dont je pars d’un hasard quelconque pour aboutir à un fait réel. Autrefois j’avais mis des titres , mais cela avait l’air d’une rigolade. Je vous autorise cependant à ce que vous mettiez les titres des choses réelles que mes œuvres pourraient vous suggérer , pourvu que ce soit pas des titres que puisse marquer une tendance quelconque, de laquelle je tiens absolument à rester à l’écart, par exemple « composition »( à tendance groupe abstraction /création ou titres littéraires ( à tendance surréalistes))
Dans le tableau « FYI » il n’y a pas de titre ou s’agit t’il de ces trois lettres dans le tableau en bas à gauche que j’ai moi‐même choisi pour le nommer FYI ? Ce titre présumé FYI est une allusion probablement au symbole écrit à sa gauche, séparé par une barre verticale en diagonale. Ce symbole composé de 3 signes réunis du vocabulaire de base MIRONIEN est une représentation d’une calligraphie qui fait partie du vocabulaire grec ancien et phénicien qui signifie « taureau » . Cette calligraphie n’est sans doute pas un hasard dans ce tableau car il résume parfaitement celui‐ci dont les deux thèmes sont dans le volet 1, la grotte préhistorique à travers le bovin qui est représenté et dans le volet 2 une épiphanie aux présocratiques EMPEDOCLE et HERACLITE. FYI est comme une indication que donne MIRO pour la compréhension du tableau. Je pense que ce tableau est destiné à des personnes bien précises qui pourraient être intéresser par la préhistoire, la civilisation grecque, des ethnologues , philosophes , critiques d’art, collectionneurs d’art premier de surréalisme, je pense à Georges DUTHUIS, ARENSBERG, PUTZEL, Marcel DUCHAMP, Mc BRIDE en premières possibilité. Ce tableau à sans doute été offert à l’un d’eux.
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D17‐TABLEAU FYI A TRAVERS UN VOILE
Miro a souvent exprimé une grande admiration pour MALLARME. A l’instar de MALLARME Miro sait que notre regard va au‐delà lorsque nous percevons les choses à travers un voile qui ne peut être levé et par lequel il nourrit notre imagination , au niveau de la poétique nous voyons et nous interprétons.
Dans FYI, volet 2‐Etna, le serpent, le paysan catalan en transparence sont vus à travers un voile et par extrapolation, nous voyons les choses à travers ce voile pour interpréter ce tableau. Ce voile qui ne peut être levé entièrement donne libre cours à notre imagination.
Miro dans ce tableau nous donne des éléments pour interpréter, interprétation qui peut être différente d’une personne à l’autre suivant notre propre imagination et des informations que nous possédons sur le peintre lui‐même.
Miro nous dit : « Toute interprétation est bonne »
Dans FYI, Il cherche seulement à nous ouvrir les yeux. Il ne s’agit pas de nous efforcer d’atteindre le paradis (oiseau vers le ciel) ou l’enfer (le serpent) mais plutôt de nous faire comprendre les deux extrêmes et notre relation inévitable entre les deux. Pour cela il choisit la légende d’EMPEDOCLE. Miro tente de nous ouvrir les yeux et accéder à de nouvelles zones de réflexions.
Une des réflexion est celle qui est exposé ici, c’est la poétique de l’ETNA imagé par la terre ( symbole du péché) et l’ETNA ( purification),intermédiaire qui transforme l’homme et le purifie par le feu du volcan pour nous ouvrir la porte vers le ciel et le paradis
Mais il y a 2 niveaux de compréhension dans ce tableau comme ceux développés ci‐dessus . un niveau ou est représenté un bovin devant un mur ( mur de la grotte) des cavernes rupestres ou MIRO se place dans les conditions d’un peintre de cette époque en revenant au peintre originel de la préhistoire mais aussi en se mettant dans les conditions d’un enfant qui découvre le monde et n’est pas conditionné par la civilisation et ses codes notamment en peinture
un deuxième niveau , plus difficilement compréhensible si on ne connait pas l’œuvre de MIRO, son amour de la montagne, de la civilisation grecque présocratique de HERACLITE et EMPEDOCLE et des poètes comme MALLARME, René CHAR etc et si on ne connait pas son pessimisme latent teintée d’humour ,son aversion pour le monde contemporain et son désir intense de retrouver un monde originel à l’exemple de celui peint par l’art pariétal.
Dans sa folie imaginative il utilise la vie légendaire de EMPEDOCLE comme solution pour retrouver l’homme originel par la destruction de l’homme actuel dans la terreur du feu de l’ETNA pour permettre une renaissance de l’homme originel purifier de tous les méfaits accumulés pendant des siècles . C’est phénix qui renait de ses cendres. Miro peint ici son monde intérieur bien qu’il le fait après avoir reçu son inspiration de l’extérieur . de l’extérieur il crée un demiurge ETNA, Il reprend le mur du philosophe ( ruine) qui servent de démarrage pour l’intérieur ( imagination)
D18‐Les MOUVEMENTS, Les TRAJECTOIRES
Contrairement aux peintures classiques, pour MIRO il existe des trajectoires rectilignes, brisées ou sinueuses qui créent des mouvements. Dans FYI ,le mouvement ascendant du mur qui monte vers l’infini du ciel, mouvement rectiligne du serpent, mouvement de l’oiseau qui sort du volcan
,mouvements à l’intérieur du cratère des lignes convexes , concaves qui sont la destruction des corps, l’éclatement avant phase de rapprochement de recréation, mouvement des étincelles dans le volcan en forme d’étoile, Formes sinusoïdes blanches dans volet 1‐ bestiaire et enfin Mouvement des taches de peinture du 1er plan du tableau qui ont l’air de bouger comme des nuages dans le ciel
D19‐ENFANCE ET MIRO
Certains parlent des peintures de MIRO comme des peintures enfantines. Lui‐même à propagé le mythe de l’artiste dont il s’allie, comme enfantin et spontané , travaillant à partir de la matière plutôt que pour une représentation quelconque . Pour MIRO c’est la matière qui décide à partir d’accidents ,de taches, de formes, tout accident est bon pour MIRO et il attache une grande importance au choc initial.
Le travail de MIRO est beaucoup plus complexe qu’il ne laisse croire , La peinture, la matière ne cessent jamais de réserver leurs énigmes. Le travail du créateur contrairement à son image conventionnelle ne correspond pas à l’aspect imparfait et maladroite que nous associons au langage des enfants. MIRO ce n’est bien entendu pas l’art des enfants , c’est l’enfance de l’art. Il a réduit , les objets, les figures à leur formes essentielles , se rapprochant de l’innocence des enfants et leur façon de s’exprimer
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Comme les surréalistes BRETON , Georges HUGNET et LEIRIS, MIRO s’est tourné vers le monde de l’enfance pour exprimer des images de pureté ou l’imagination est souveraine et où tout est possible par opposition aux contraintes sociales et mentales de l’âge adulte. André BRETON écrit dans son premier manifeste: « c’est peut- être l’enfance qui approche le plus de la vraie vie » .et il écrira plus tard un texte dont ’il prescrit un retour à l’enfance en tant qu’état d’esprit et le désir de s’exprimer sans entraves. Il cite MIRO et KLEE parmi les artistes modernes qui ont tout fait pour renouer avec le monde de l’enfance. Selon BRETON ,
« une bonne œuvre doit être capable d’exprimer une enfance mythique, une œuvre d’art digne de ce nom est celle qui nous fait retrouver la fraicheur d’émotion de l’enfant »
Leiris, rapproche la vision du peintre MIRO à celle de l’enfant et fait allusion à cette attitude chez l’enfant et MIRO a être émerveillé, Il rapproche aussi les tableaux de MIRO de l’enfance et des peuples sauvages,
Georges HUGNET dans son livre paru en 1933 « enfances » illustré par 3 gravures de MIRO évoquait chez le peintre cet art enfoui dans la conscience des hommes depuis la préhistoire qu’il arrivait à faire ressortir dans ses peintures et que l’on retrouver naturellement chez les enfants
TZARA écrit que MIRO a retrouvé le secret de la peinture rupestre enfoui dans la conscience des hommes en le ramenant à la surface de la plus aiguë actualité. Il en démontre les rouages dont l’eau et la flamme sont les attributs naturel ( voir ci‐dessus, EMPEDOCLE et les 4 éléments eau, le feu, l’air, la terre), il a retrouvé l’enfance de l’art au niveau de l’homme contemporain
Pour les surréalistes l’esprit enfantin de MIRO est lié à la spontanéité supposée de ses gestes picturaux. Ils récusent le puéril qui est régressif en faveur de l’enfantin qui est libérateur.
Dans le tableau FYI cet aspect de l’enfance est très présent dans le volet 1. Il semble que pour réaliser cette peinture MIRO est parti de taches présentes sur le carton et qui sont toujours visibles même le tableau terminé . A partir de ces taches MIRO s’est mis dans l’esprit d’un homme préhistorique pratiquant l’art PARIETAL c’est‐à‐dire comme un enfant qui n’a aucune notion d’art et comme un homme préhistorique qui découvre le dessin dans une grotte et qui n’est absolument pas influencé comme un peintre contemporain par les techniques de peintures, le classicisme et tout ce qui s’est fait avant lui pendant plusieurs millénaires. Il se présente devant ces taches vierges et se met dans les conditions de l’homme des cavernes qui n’a comme références que sa caverne et ce qui se passe à l’extérieur, les animaux , la nature., D’où ce bovin qui pourrait ressembler au dessin d’un enfant tout en étant similaire mais moins précis que les bisons de la grotte rupestre d’ALTAMIRA
D20‐TABLEAUX MEDITES ET SPONTANES , STYLES
Chez MIRO comme chez BRETON leur vision d’antinomie KANTIEN est étroitement liée
Il existe deux sortes de tableaux chez MIRO dans la façon de concevoir la peinture Elle peut être méditée ou spontanée. Nous verrons que dans FYI on retrouve les deux
Les concepts binaires opposés sont des concepts réconciliés, la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé ou le futur, le haut et le bas, le naturel ou le fabriqué, l’objectif ou le subjectif et le spontané ou le médité. On l’a vu précédemment avec HERACLITE et CHAR qui parlent de« l’éclatante alliance des contraires « selon les mots de HERACLITE,
Au début de sa carrière ses tableaux détaillistes sont médités. Dans les années 40, les constellations sont méditées mais tout au long de sa carrière de peintre on trouve des tableaux spontanés. Ces peintures jaillissent comme un cri, elles ont recours à la rapidité d’exécution, les résultats sont aléatoires, improbables. Contrairement aux peintres classiques et beaucoup de peintres en général, ceux ‐ci passaient d’un style à l’autre mais sans jamais revenir en arrière et donc avec des styles bien tranchés bien souvent par période de 10 ANS. Pour MIRO il n’en est rien de cela. C’est un artiste éclectique pour qui les styles , les méthodes de création n’étaient que des moyens d’atteindre des objectifs Ce qui importe c’est le processus créatif pour arriver à ses fins Que ça soit peinture méditée, spontanée ou les deux à la fois. Cela fait partie des contradictions de MIRO,
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Dans la rétrospective de MIRO au MOMA, Caroline LAUCHER disait que MIRO était déchiré entre deux impulsions, le médité et le spontané ce qui peut provoquer l’alternance entre les styles élaborés et automatiques.
SWEENEY remarque la composante irrationnelle des changements stylistiques de MIRO, dans une évolution sans plan critique méthodique, guidé par la passion du moment qui conduit a des changements stylistiques aussi soudains que prémédités. Miro avait expliqué « C’est toujours la passion ardente qui me guide, celle qui me mène à droite, à gauche. » et SWEENEY conclut que ce changement d’influence d’un style à l’autre obéissait à un courant interne, à un besoin spirituel, a conduit à un résultat final….. plus heureux que si j’avais prévu ». « Et quand une expérience est épuisé y revenir c’est se copier.. Quand vous savez quelque chose, vous devez le laisser pour aller à ce qui est inconnu » « créer c’est briser et briser c’est la violence ».
Le spontané pour MIRO c’est un désir d’améliorer le processus de création sur ses résultats. Il se caractérise par des fonctionnalité telles que rapidité, automatisme, gestuelle, impulsivité dans l’irréflexion momentanée, attentif à la magie du moment et toujours enraciné dans la nature mais ce n’est pas un art éphémère et momentané. En ce qui concerne FYI c’est bien une alternance de médité et spontané
La masse centrale du tableau ( volet1 et volet2) a été créé d’une manière spontanée au mépris du raffinement mais d’une maladresse féconde comme l’affirmation brutale et directe d’une énergie intérieure du peintre. Le pinceau du peintre semble s’être comporté de façon non guidée dans les contours, cerné par des traits de peinture verdâtre pas plus précis.
Il n’y a pas de délimitation précise, elle est comme un tâche dont on peut trouver une forme plus ou moins précise qui ressemble à un bovin et dont les couleurs à l’intérieur se fondent les unes dans les autres. La forme n’étant pas assuré dans FYI le volet1‐bestiaire , il n’y a donc pas de difficulté à faire passer cette forme également pour une Montagne dans FYI le volet 2‐Etna
Surement voulu pour se rapprocher d’un état d’innocence, d’un sens primitif comme s’il voulait désapprendre pour peindre plus purement à l’exemple des peintures de la grotte d’ALTAMIRA dont il avait vu les dessins et les illustrations représentant des scènes d’animaux dont des bovidés peut être que le peintre s’est inspiré de ces illustrations et s’est mis dans les mêmes conditions pour démarrer ce tableau FYI volet 1‐bestiaire
Le reste du tableau est fait avec beaucoup plus de précision et semble plus travaillé comme l’oiseau en haut qui s’intègre dans une calligraphie, calligramme représentant le nom MIRO qui est à la fois inquiétant, oiseau de nuit Chouette ou Hibou avec sa grande oreille à droite mais aussi humoristique avec son bec en forme de sexe féminin et sa ressemblance dans l’humoristique au personnage d’UBU. Le serpent dont la ligne du dos est commun avec le mur et le personnage au trait fin , très discret avec son bonnet Catalan.
Le ton du 1er plan est fait tout en délicatesse de tons clairs d’ocre , de vert de bleu de blanc , un mélange très travaillé sur un fond non peint couleur du papier à l’exemple des peintures chinoises ( ZA WOU KI)Quand au 2eme plan , la forme centrale a été réalisée de manière spontanée sans contour précis qui laisse place à l’imagination mais la peinture, elle dans sa composition semble très complexe et a du demander de la méditation., comme indiqué dans le chapitre sur les couleurs , cela semble un mélange de gouache , d’essence et d’eau plus dense en bas et plus fluide en haut. Cette composition ressemble très fort aux fonds des peintures appelés « constellation » ( figure 19-20 page 39)sous le titre « réveil au petit matin »ou « l’oiseau migrateur » « Femme dans la nuit » . l’oiseau quand à lui a été réalisé avec une peinture à l’huile pure et tranche avec la masse dont elle fait bloc
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Les deux styles de peintures méditées ( lentes) et spontanées » sont donc présentes dans le même tableau FYI contrairement à la plupart des peintres qui changent de styles par décade sans jamais revenir à leur style précédent. Miro change de style sans jamais renoncer au monde qu’il s’est crée au profit d’un monde à venir.
Dans le tableau FYI, volet2‐ Etna le peintre utilise des métaphores,la légende d’EMPEDOCLE pour retour à l’homme originel des cavernes rupestre Le serpent de la terreur , du mal, du monde souterrain pour signifier la terre L’oiseau symbole de liberté, de pureté, du cosmos Le volcan a la fois symbole de terreur, de destruction mais de renaissance , de pureté, considéré comme un demiurge , un être vivant
MIRO veut que sa peinture soit universelle ,s’adresse à tout le monde , il ne cherche pas a faire beau, décoratif et il n’explique pas ses œuvres il ne fait que suggérer. Dans ce tableau complexe, il y a plusieurs niveaux de compréhension
Le 1er niveau pour grand public qui ne connait ni l’œuvre ni la biographie de MIRO nous montre un bovin avec une forme simple enfantine dont un animal ( hibou ou chouette) sort du crane du bovin et de là on peut y voir de multiples scénarios à l’imagination de chacun. C’est le niveau 1 du tableau appelé Bestiaire .
Le 2eme niveau , complexe s’adresse à ceux qui connaissent la vie et l’œuvre de MIRO et qui ont pris le temps de bien regarder en détail ce tableau aux multiples références et dont on a jamais fini de le découvrir à chaque fois qu’on le regarde , ce minuscule tableau qui a été fait en 1935 c’est‐à‐dire encore dans la première moitié de sa vie d’artiste permet de résumer sa vie d’artiste précédente mais aussi d’envisager sa vie future .Ce tableau FYL met en Relation deux volets : volet 1 (appelé BESTIAIRE) et volet2 (appelé ETNA)
Quand le peintre a commencé à travailler son tableau il n’avait sans doute par prémédité de faire 2 tableaux en un seul. C’est au fur et à mesure du déroulement de son tableau sur le Bovin, le plafond et le mur des cavernes rupestres que l’idée lui est sans doute venu de créer un deuxième tableau dans le tableau ou tout au moins de permettre au regardeur de le suggérer.
Les deux tableaux semblent indépendants mais il existe néanmoins un fil d’ariane qui les relient. Le peintre met en relation la préhistoire, la Grèce antique des présocratiques et notre monde contemporain, soit toute l’histoire de l’humanité résumée. Aujourd’hui dans notre monde vieillissant la technique à pris le pas sur la pensée. Le tableau ( Les 2 volets) nous fait imaginer un retour à l’origine de l’humanité par un nouveau cycle qui doit prendre un nouveau chemin différent de l’évolutionnisme qui a abouti au monde actuel et pour cela in utilise l’histoire légendaire de EMPEDOCLE. De son point de vue MIRO est restrictif. Il juge la préhistoire sur le côté qui l’intéresse c’est‐à‐dire l’art pariétal avec les dessins dont il trouve qu’il n’y a rien de mieux dans la peinture depuis l’âge des cavernes rupestre et les rapports de l’homme, l’animal et la nature ou tout était en symbiose. Nous vous rappelons qu’il disait à TAIILENDIER dans un entretien : « Quand je vois un arbre, je reçois un choc, comme si c’était quelque chose qui respirait , qui parlait. Un arbre c’est aussi quelque chose d’humain », Pour lui un brin d’herbe est aussi important qu’un caillou ,un arbre, une fourmi ou une montagne il disait aussi « La peinture est en décadence depuis l’âge des cavernes » .
Dans le 2eme volets‐Etna, il nous montre son intérêt pour la Grèce antique et à travers elle les philosophes présocratiques et les rapports avec les Dieux, l’esprit, la pensée. Il se sert de l’histoire de la légende d’EMPEDOCLE pour purifier les âmes par le feu de L’ETNA . Il crée le tableau comme un poème d’HERACLITE qui Comme Héraclite compose ses poèmes de fragments dispersés .
Aucun philosophe n’a sans doute plus pensé par images qu’Héraclite des images dont l’apparente diversité ne fait que refléter une image centrale, comme le tableau FYI de MIRO se réduit pour un regard attentif à un seul tableau. il voit et il sait que ce qu’il voit, il le voit seul, et que les autres ne peuvent le voir, s’ils ne s’installent avec lui en son centre.
Les Grecs ne séparent jamais l’individuel du général. La personne, n’a pour eux de sens que reliée à la famille, à la Cité, à l’univers. Quand MIRO nous montre l’oiseau ( la femme, l’homme) qui rentre ou qui sort du cratère purifié à l’exemple de EMPEDOCLE lui‐même dans sa légende, c’est l’univers tout entier qui est personnifié.
En étudiant ce tableau en détail c’est ce que j’ai découvert au fils de mes recherches sur l’œuvre de MIRO mais comme le voulait MIRO qui n’a jamais dit comment il fallait lire tel ou tel tableau on peut probablement voir ce tableau en prenant un tout autre chemin avec un angle différent quand on connait l’œuvre de MIRO très éclectique et et comme disait MIRO " toute explication est valable" "même celles dont il n’avait pas pensé"
Le tableau FYI peut être vu également comme un totem à l’image de le sculpture « la fourche « de Saint Paul De VENCE avec le corps à cône renversé et tête symbolisé par la fourche, Un mur de vieilles pierres devant comme pour FYI
Dans d’autres tableau ,MIRO représente la femme avec un corps en forme de jupe en cône renversé surmontée d’une tête d’oiseau
D20- 1 ,MEDITATION ,REFLEXIONS
Ce petit tableau qui semble au premier regard improvisé, fait à la va vite et au gré du hasard a sans doute demandé beaucoup de méditation et de réflexion vu la complexité de la création et du message. car d’une part il est composé de deux tableaux qui se superposent et dont les éléments de l’un s’adaptent à l’autre tout en ayant des significations différentes et sans que cela prête à confusion et d’autre part ce tableau est digne d’une fresque car riche en signes ,en symboles en réflexions poétiques et philosophiques, riche dans sa temporalité car il va de la préhistoire à notre époque contemporaine
Toute l’œuvre de MIRO peut apparaitre comme un vaste jeu de formes et de signes pour lequel il cherche à provoquer la réflexion de celui qui le regarde.
Ses formes offrent tantôt des êtres reconnaissables, tantôt des images inconnues qui bien que se détachant de la réalité, n’en évoquent pas moins notre monde et parfois nos tragédies.
Le jeu auquel se livre MIRO n’est effectivement pas sans un sentiment d’étrangeté et d’angoisse et n’exclue pas la cruauté « Le monde innocent » de MIRO désigné ainsi par Paul ELUARD est aussi peuplé de goules effrayants aux crocs acérés . Le jeu n’exclue pas le calme et la méditation
Dans FYI , le calme et la méditation sont imagés par l’observation des cavernes rupestres de la grotte d’ALTAMIRA du volet 1 ‐bestiaire quant à l’étrangeté, l’angoisse, la cruauté de la destruction et la réflexion sur la création d’un monde nouveau purifié nous le trouvons dans le volet 2 ‐Etna sous la forme légendaire de la mort d’EMPEDOCLE pour une résurrection d’un homme nouveau à l’âme nouvelle et l’étrangeté et l’angoisse que procurent l’oiseau qui sort du volcan et semble toujours inquiétant pour des raisons expliquées dans le chapitre sur l’oiseau .
D21‐ FYL et LE VOCABULAIRE, LE LANGAGE DES SIGNES , LES SYMBOLES MIRONIEN, LES CALLIGRAMMES
« L’art de MIRO est précisément un art de signes , de calligraphies , d’idéogrammes ou se mêlent des réminiscences d’arts primitifs restés dans la mémoire collective. C’est une existence qui ce suffit à elle- même parce que tout son sens est rempli »
Pour QUENAU, « le vocabulaire de MIRO découle de son subconscient, vocabulaire qui sont des signes qui apportent une dispersion de significations et interprétations. »
Chaque œuvre est un ensemble de signes inventés au cours de l’exécution et dictés par le besoin du contexte. Ces signes crées font partie du répertoire Mironien .
Dans FYI , on trouve l’oiseau ,le serpent, le bovin, le mur ( échelle),la calligraphie MIRO, l’idéogramme signe graphique en bas à gauche,l e paysan Catalan avec son béret catalan , les lignes concaves, convexes, ondulantes
MIRO disait : « les signes d’une écriture imaginaire sont apparus dans mon travail » , il a peint des signes sans préméditations comme s’il était sous l’influence d’un rêve, il combinait réalité et mystère dans un espace libéré .
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Dans FYI, Il invente des formes qui ont rapport avec des signes préhistoriques ( volet 1 , bestiaire ) de cavernes rupestres, des signes graphiques des idéogrammes Chinois ou l’alphabet phénicien ou grec ancien, des calligrammes à la manière d’APOLLINAIRE ( figure 60 , page 110)
FIGURE 60
La sensibilité profonde de MIRO le fait communiquer à travers des symboles. ce faisant ,ils ressemblent à nos ancêtres lointains qui ont inconsciemment crée un langage artistique qui ne parle pas de manière universelle et au‐delà du temps . Les formes Moroniennes comme celles des primitifs agissent sans être soumis à un sens.
Les signes qui n’ont pas de significations précises ce sont ceux qui provoquent un sens magique. Dans FYI, les lignes concaves , convexes au milieu de la masse du volcan ( figure 43 page 69) pourraient avoir un sens magique vu de l’extérieur car elles sont sans significations mais c’est à l’intérieur du volcan vue en transparence que ça se passe avec de l’imagination : démembrement, destruction des êtres avant reconstruction d’un nouvel être purifié dans l’optique de la légende d’EMPEDOCLE
Et comme KANDINSKY, KLEE ou ARP ils ont trouvé un système de signalisation totalement personnel . Dans FYI, le signe graphique sous forme d’alphabet ou d’idéogramme en bas à gauche est empreint d’influences préhistorique phéniciennes, grecques et orientales
MIRO par ses figures, ses signes, ses symboles, sa calligraphie, tous étranges constituent une véritable langue unique mais il n’y a pas de symboles appropriés si une signification préexiste, Les symboles de MIRO bénéficient de la liberté car ils ne proviennent d’aucun code et sont soumis à aucune syntaxe ou relation particulière. Au début ils se développent au rythme fantaisiste de ‐ l’écriture puis se fragmentent et s’approchent du pictogramme lorsque l’auteur est emporté par l’amour du concret
Le langage de MIRO ne peut naître, ne peut fonctionner qu’à la condition de se transformer constamment , d’être perméable à de continuelles mutations .Appelé vers l’inconnue et s’ouvrant à lui il s’expose à ses remous, à ses bouleversements. Par exemple le signe graphique en bas à gauche dans FYI se compose de 3 traits qu’on retrouve dans de nombreux tableaux mais dont les 3 traits se conjuguent de différentes manières d’un tableau à l’autre .( à comparer sigle mironien de la fondation miro de Barcelone et idéogramme de FYI) ( figure 61 PAGE 110)
FIG 61
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En effet , Miro travaille à partir d’un système de signes élaborés mais non fixés, signes mouvants, ouverts disponibles pour de nouvelles combinaisons dont ils obtiennent leur pouvoir de novation, leur fraicheur, leur force et leur éclat. Il ne s’agit pas d’une création arrêtée mais au contraire d’une invention continue, chaque élément du vocabulaire , n’est pas inscrit une fois pour toute mais reste un élément organiquement vivant qui subit toutes les modifications et altérations que nécessitent son emploi particulier ou ses combinaisons avec d’autres .
Ainsi les choses, les signes peuvent être prisonniers les uns des autres. Dans FYI le mur est prisonnier du serpent ( ils ont des lignes communes) le mur est prisonnier du volcan qui sont soudés l’un a l’autre par une tache noire faite avec les doigts de l’artiste ( figure 62 page 111)
Le signe graphique qui forme un caractère grec ou phénicien ou idéogramme Chinois est une combinaison de 3 traits du vocabulaire Mironien , prisonnier également comme les 3 lettres qui sont composées de différents traits qui font aussi parti du vocabulaire de base MIRONIEN ( figure 41 PAGE 65)
CIRICI lui, parle différemment de contact entre la plupart des éléments préférés de MIRO entre eux ce qui revient au même à l’exception des étoiles, des oiseaux , des papillons. Même le feu du volcan à un sens du contact, il s’allonge comme une langue et tend vers quelque chose d’extérieur
Dans FYI , le serpent est en contact avec le mur ( ligne commune), L’oiseau en contact avec le volcan ( comme indiqué ci‐dessus), le mur en contact avec le volcan ( comme indiqué ci‐dessus) le paysan catalan avec sa terre ( intégré en transparence , dont on ne peut l’extraire), le serpent avec le monde souterrain ( en transparence avec le terre du monde souterrain), la calligraphie du tableau en contact avec 3 symboles du vocabulaire MIRONNIEN et les 3 lettres avec les traits du vocabulaire de Base MIRONIEN
Tout se tient et si on enlève 1 élément du tableau il perd son sens.
Dans ce tableau FYI ,les signes, vocabulaire, symboles, idéogramme, calligraphies sont nombreux.
Valerio BOZAL historien d’art souligne la multiplicité des significations dans l’univers des signes MIRONIENS qui se divisent en 3 ensembles :
‐ Les mots et les lettres
‐ Les motifs iconographiques
‐ Les graphiques secondaires
Au premier regard en bas à gauche du tableau sous des traits et signes géométriques de couleur blanche un signe graphique, calligraphique ou idéogramme et 3 lettres séparées par un trait vertical attire l’attention et intrigue, quelle signification pourrait‐on donner à cet ensemble bien mystérieux.
Miro a breveté un langage pictural , les spécialistes parlent de calligraphie MIRONIENE, Pour reconnaître un tableau de MIRO c’est plus efficace qu’une signature.
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Les traits qui demeurent sur la toile composent un alphabet unique, un code plus ou moins facile à décrypter selon DUPIN.
Ici dans FYI ces calligraphies, idéogrammes , lettres et mots sont emprunts de plusieurs influences, on retrouve un signe graphique ressemblant dans des caractères phéniciens, grecs ancien mais aussi idéogrammes chinois .Ce signe graphique fait partie de la bibliothèque des signes du peintre
.On ne retrouve jamais exactement la même signe mais approchant . Il faut savoir que MIRO ne reproduisait pas deux fois la même chose mais en revanche les structures de telles ou telles calligraphies sont toujours similaires . Un exemple significatif est le signe graphique de MIRO repris par la fondation de BARCELONE pour en faire son LOGO et ce symbole calligraphique du tableau FYI ( page 113) les deux signes graphiques sont pris dans le vocabulaire des formes basiques MIRONNEN . Ils sont formés de 3 éléments basiques et sont agencés pour en faire un signe graphique , Les deux sont très proches mais agencés de manière un peu différente
D’autres signes graphiques ressemblant au signe graphique, idéogramme du tableau FYI , ils sont très nombreux
Ce signe graphique breveté par MIRO qu’on trouve également dans l'alphabet phénicien et le premier alphabet grec ( figure 42 page 66) a une signification très étonnante , en effet ce signe veut dire « taureau » en phénicien, le volet1 de FYI représente un bovin ou bovidé est ce un hasard ?
Intéressant aussi ce signe graphique Mironien à une ressemblance aussi avec l’un idéogramme oriental chinois
Pour continuer dans la calligraphie MIRONIENE, le haut du tableau avec l’oiseau en est un exemple très convaincant. Comme indiqué à plusieurs reprises dans cette étude dans différents paragraphes MIRO était très intéressé par Apollinaire et ses Calligrammes .La tête de l’oiseau dont les éléments qui le constituent ne sont pas solidaires et donc indépendants ( les yeux, le bec sexe féminin , l’oreille) peut être décomposé en lettres placés de façon irrégulières et superposées pour former le nom MIRO
la lettre M la plus évidente sous forme de calligraphie est décliné de manière particulière, elle permet de placer entre ses jambages la lettre O (figure 63 page 113)qui est aussi l’œil de l’oiseau et l’œil de MIRO, le jambage à droite correspond aussi à l’oreille de l’oiseau., le jambage à gauche étant le bec ( le sexe féminin)
Cette lettre M sous forme de calligraphie est présente dans plusieurs tableaux de MIRO comme monogramme du nom MIRO
FIGURE 63
Par exemple dans le tableau « Pomme de terre »( figure 66 page 116) de 1928,la calligraphie de la lettre M de Miro est dans le creux de la main du personnage
Dans plusieurs tableaux nommés « peinture « de 1949 la lettre calligraphique M est présente à différents endroits des tableaux ( figure 64 page 114)
Dans « la sauterelle « de 1926 la lettre M est tronqué et redouble la ligne des montagnes au‐ dessus de lui ( figure67 page 116). Comme FYI la lettre M est liée au sujet du tableau ( Montagne pour M dans « l’hirondelle », M de L’oiseau pour FYI) mais la ressemblance dans le lettrage ne s’arrête pas là , Les lettres MIRO dans les deux tableaux sont placées de manière inégales espacées et désordonnées
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Dés 1924, Miro avait dessiné des textes dans ses tableaux , d’abord des lettres puis des mots. A la fin des années 20 , il mélangeait des phrases aux figures, comme « le corps de ma brune » ou « ceci est la couleur de mes rêves » « le signe de la mort »
Pour PENROSE , l’intérêt de MIRO pour l’apparition des mots et leur pouvoir magique découlent d’une longue tradition Catalane. Les paysans Catalans décorent leurs charrettes avec des arabesques et décrivent leur nom et des inscriptions sur elles avec éclat. Par conséquent les catalans attachent une grande importance aux mots et au lettrage et cette importance se retrouve dans le travail de MIRO.
Comme indiqué dans le paragraphe de MIRO et l’Asie, l’artiste était très intéressé par l’art Chinois et japonais qui alliait peinture et textes poétique dans leurs œuvres graphiques
En bas du tableau FYI a gauche en plus du signe graphique, idéogramme, il y a aussi séparé par un trait vertical 3 lettres FYI dont j’en ai fait le titre du tableau.
Il faut se rappeler les liens étroits que MIRO avait avec son marchand Pierre MATISSE depuis le début des années 30 et surtout après l’établissement d’un contrat en 1934 pour la distribution de ses œuvres aux ETATS UNIS ( 1934 date du tableau FYI). Les œuvres destinées aux Etats Unis représentaient une grosse part de la production de MIRO
Ces 3 lettres sont probablement l’acronyme de l’anglais « For your information »Il était d’usage d’annoter là‐ bas certains courriers qui ne demandaient pas de retour par la mention « For your information » ( Figure 60 page 110) D’ailleurs aujourd’hui ces 3 lettres ont pris un langage universel avec internet, facebook, instagram
Pour Miro les mots comptent moins que les lettres . Son biographe DUPIN constate à ce propos que la lettre devient pour MIRO un signe de force identique aux signes plastiques ( étoile , lune etc) qui composent son vocabulaire de peintre . Il écrit comme il peint, il peint comme il écrit.
Miro aimait achever ses tableaux par une brève inscription mais il ne donnait rarement de détails sur la signification de ses inscriptions
Ce n’est pas le seul tableau ou MIRO inscrit 3 lettres en anglais dans un tableau Dans une œuvre de 1924 « Le GENTLEMAN » un « yes » est écrit sur un fond vert dans un coin du tableau. Miro veut t’il nous prouver que les pieds parlent anglais et qu’il s’agit d’un gentleman ? ( figure 68 page 117)
Pourquoi ces trois lettres FYI dans le tableau FYI ? ,difficile à dire !
La signification de ces 3 lettres de FYI que je suppose ( FOR YOUR INFORMATION) pourrait être adressée à un américain bien précis ou quelqu’un connaissant bien la langue, auquel MIRO aurait fait cadeau de cette œuvre . MIRO développe ses ventes sur le marché Américain et il aurait pu faire cadeau de cette œuvre à un diffuseur de ses tableaux cela pourrait être un collectionneur ( ARENSBERG,GALLATIN), un organisateur d’exposition ( DUCHAMP, Howard PUDZEL) un écrivain ( DUTHUIT, voir paragraphe sur l’écrivain) ) un critique MC BRIDE ( voir paragraphe sur Mc BRIDE).
Un autre tableau semble aussi intéressant dans le rapprochement avec FYI pour son lettrage, il s’agit du tableau « Madame B » ( figure 69 page 117on remarque 4 lettres disposées de façon désordonnées autour de ce qui semble être une couronne tenu par la Mère UBU . IMRA pourrait être une abréviation de « Sa majesté la reine d’Angleterre » mais certains y voient d’autres explications comme lettres décryptées en MIRA Impératif du verbe MIRO en espagnol qui veut dire « regarder en Français ». Dans ce cas ce serait la signature de MIRO. Ce dispositif de lettres brouillées permet d’élargir les possibilités d’interprétation mais aucune des deux n’est peut être correcte. Une 3eme explication pour certains autres qui voient dans IMRA , l’abréviation de : Je suis jésus de NAZARETH, roi des juifs semble écarté par beaucoup.
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FIGURE 70
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De même pour FYI qui pourrait aussi avoir d’autres explications que je ne soupçonne pas. Pour ce qui est du tableau « Madame B » il y a d’autres rapprochements qui seront détaillées en fin d’étude après la conclusion générale
Dès 1924 MIRO avait dessiné des textes dans ses tableaux, d’abord des lettres, puis des mots et des phrases aux figures à l’exemple de « le corps de ma brune » « ceci est la couleur de mes rêves » « le signe de la mort »
Certains tableaux avec inscriptions ont été sujet de discussions entre spécialistes de MIRO. Dans le tableau acheté par breton de 1925, le mot SARD pour les uns voulait dire sardine pour les autres sardane ( danse espagnole) Au bout de quelques années MIRO a levé le voile en disant que dans le tableau il avait pensé à SARDANE mais il n’avait pas réfuté SARDINE
Dans d’autres tableaux , les inscriptions n’ont qu’un rôle plastique sans sens réel comme celui avec l’inscription « fragile » fait avec des lettres similaire aux lettres au pochoir qu’on applique sur les caisses à envoyer par transporteur.
D’autres encore comme RR dans « pastorale » , chant du grillon qui devient signature de MIRO. Parfois les lettres font place aux chiffres comme le chiffre 48 qui apparait dans une œuvre de MIRO
. Ce chiffre correspond à la maison qui se trouvait en face de l’atelier de MIRO, rue des BLOMET à PARIS. Cela date du temps ou il ne mangeait pas à sa fin et le chiffre 48 était vu alors comme un caractère hallucinatoire obsessionnel, lui rappelant ses hallucinations
Pourquoi ce signe graphique ?
Ce signe graphique posé devant les 3 lettres séparé d’un trait vertical, ressemble à un caractère phénicien, grec ancien , idéogramme chinois ( figure 42page 66) : sans doute ce signe est appliqué dans un esprit de suggestion à la philosophe présocratique de EMPEDOCLE, CHINOISE TAOISTE très proche de EMPEDOCLE. C’est un indice pour nous orienter vers les présocratiques HERACLITE et EMPEDOCLE
Pourquoi ce rapport signe graphique phénicien, grec antique ou chinois à coté des 3 lettres FYI ?
C’est sans doute pour orienter le spectateur et lui donner un indice pour la compréhension du tableau volet2. Ce tableau qui nous conduit de la Grèce antique symbolisé par signe graphique phénicien à notre époque contemporaine avec les 3 lettres de l’alphabet latin que MIRO nous présente dans l’immédiatibilité
. Pour MIRO cette période depuis la Grèce antique est arrivée à sa fin et il faut qu’un monde nouveau le remplace d’où ce que MIRO en prophète nous propose dans ce volet 2.
Ce signe graphique veut dire en phénicien Taureau ! est‐ce un hasard ?
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‐Parmi les signes MIRONENS présents dans FYI on y trouve le serpent, l’œil, l’étoile, le sexe féminin, le sexe masculin l’échelle, l’oreille, le mur, la montagne, la ligne convexe, concave, curviligne, des traces de doigts ou de main etc .
En particulier en bas à gauche se mêle des réminiscence d’un caractère phénicien, grec ancien ou idéogramme Chinois ou comme indiqué ci‐dessus l’oiseau fait avec la calligraphie MIRO en forme de calligramme, morphologie d’inspiration organique qui ne fait pas appel à une raison symbolique mais reconnaissance intuitive des sources originales
Ces signes propres à MIRO et reconnaissables sont malgré tout différents des autres signes similaires sur les autres tableaux, MIRO ne fait jamais 2 fois le même signe totalement identique , il y a toujours des variantes , Les figures se répètent inlassablement tout au long de ses œuvres mais jamais de manière identique. c’est ce qui fait la richesse des tableaux de MIRO et qui fait qu’il y a un effet de surprise à chaque œuvre, chaque œuvre est unique. Vous trouverez joint des illustrations de Tête d’oiseau, calligraphie, serpent, traces de doigt ou main extrait de différentes œuvres de MIRO
Ce qu’on appelle vocabulaire , signes, symboles , calligraphie Mironiens font partie du langage de MIRO ne sont pas renouvelables et infini contrairement à ce qu’il pourrait paraître, juste parce que c’est pas nécessaire car étant organiquement vivants, ils détiennent toutes les possibilités expressives et toutes le chances de métamorphoses.
Parfois la présence de signes reconnaissables nous font penser que leurs significations sont évidente, l’œil, le mur, le personnage mais cette reconnaissance n’est pas une fin en soi et en général on doit utiliser des clés qui n’ont rien à voir avec la représentation du visible empirique.
Dans FYI le peintre utilise des éléments figuratifs qui ont une représentation symbolique ainsi : L’œil peut symboliser l’œil de MIRO,
l’oiseau : la femme,
le volcan‐ :le mythe
,le bovin‐bovidé :la préhistoire, l’étincelle
:le feu,
le serpent : le pêché originel, le malheur L’échelle,
le mur : le lien entre la terre et le ciel
on peut considérer que ce symbolisme d’éléments, de mots usuels on le retrouve aussi dans la poésie.
La poésie est son territoire de prédilection et il est plus facile d’exprimer ces représentations symboliques avec des images qu’avec des mots et plus difficile encore avec de la poésie
La perception que le peintre nous soumet consiste précisément à sauter par‐dessus les conventions , à transcender le pur registre empirique des choses et un choix de suggestions s’offre à nous . Par exemple dans le volet 2 de FYI le mur ascendant peut être vue comme une échelle qui monte vers le ciel à l’exemple de l’échelle de jacob. Cet exemple de l’échelle revient souvent chez MIRO. Ce même mur c’est aussi la tour du philosophe dans le volet 2 ou dans volet 1 le mur est l’entrée de la grotte de la caverne rupestre . de même dans FYI volet 2 l’oiseau qui représente la femme ce peut être aussi MIRO ( l’œil de MIRO)ou plus généralement l’être humain
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Pêle‐mêle, L’œil, L’oiseau la tête du bovin, le serpent, le paysan catalan , les lignes droites, concaves, convexes, le volcan, qui ne semblent pas avoir de rapport et de signification d’ensemble avec le reste du tableau oblige le regardeur à envisager une transmutation pour donner un sens à l’image et constituent un ordre visuel.
Du premier tableau ( volet1) dans une vue d’ensemble, il faut repartir à Zéro pour reconstituer le volet 2 et à partir de là un nouveau sens se fait jour, le bovin se transforme alors en montagne ETNA et la calligraphie qui semblait correspondre dans le volet 1 à la signification de « taureau « en langage phénicien alors que dans le volet2 il n’a pas de signification précise sinon un rapport avec la Grèce et la chine pour leur idéogramme respectivement très proche
D’ailleurs GILLOS DORFLOS le critique d’art nous met en garde contre les limites de notre connaissance du monde des signes de MIRO
Comme KLEE, MIRO donne le ton pour créer un vocabulaire de signes picturaux aux résonnances magiques mais il n’y a pas de symboles appropriés si une signification persiste, les symboles de MIRO bénéficient de la liberté car ils ne proviennent d’aucun code et ne sont soumis à aucune syntaxe ou relation particulière.
D22 ‐SIGNATURE , DATE DU TABLEAU FYL et CONTRADICTIONS
On peut considérer que dans ce tableau, il y a 2 signatures résultants de points de vue antinomique de MIRO, à un conflit entre la célébration de l’individualité anonyme et la compulsion narcissique. Il disait : « je ne m’intéresse à aucun artiste ( dans la peinture), seul l’art anonyme m’intéresse » d’où son intérêt pour les fresques et les peintures rupestres destinées au public.
la première signature en bas à droite dans le premier plan , minuscule comme toutes les signatures de l’époque ( figure 71 page 123) mais encore plus significative dans la petitesse vu la dimension minuscule de l’œuvre. Il faut se rappeler que MIRO aurait préféré comme les peintures de l’art pariétal, comme les anciennes peintures murales et fresques ne pas signer ses œuvres pour signifier leur universalité mais aussi il aurait souhaité leur disparition dans un désir pur et simple de se débarrasser de l’identité sociale qui est source de spéculations financières et commerciales
Quand Georges LE CHARBONNIER lui pose la question « Que souhaitez-vous ? », il répond « je souhaite un contact physique avec les gens, avec le peuple avec les hommes jusqu’à un art collectif anonyme comme les grandes époques ». Sa quête d’anonymat, « un anonymat à la fois collectif et éminemment personnel peut réussir selon lui, en atteignant la liberté absolue, une liberté conceptuelle et pratique dépourvue jusqu’à un certain point de toute…école, mouvements artistiques… » (Victoria Noel-JOHSON)
Ce sont ses marchands, ses collectionneurs et les galeries qui l’exposaient qui l’ont contraint à signer pour un aspect purement commercial qu’il réprouvait. Pour MIRO , les interrogations sur l’achèvement d’un tableau ont bien peu d’importance pour l’artiste qui a toujours été pour une résonnance globale que pour les fonctions anecdotiques de la signature ou de la date de création( Figure 71page 123)
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On trouve des signatures similaires dans « peinture » de 1927 avec signature comme minuscule point d’aiguille au centre du tableau , de même pour le tableau « Paysage animé » de 1927.
Ce conflit entre art personnalisé de l’artiste et art anonyme et donc collectif était au cœur de sa nature
En ce qui concerne l’anonymat il disait : « Pour devenir vraiment un homme , il faut se dégager de son faux moi. Dans mon cas il faut cesser d’être MIRO , c’est-à-dire un peintre espagnol appartenant à une société limitée par des frontières dans des conventions sociales et bureaucratiques , en d’autres termes il faut aller vers l’anonymat. L’anonymat a toujours régnié dans les grandes époques et aujourd’hui on en éprouve de plus en plus le besoin mais en même temps, on éprouve le besoin d’un geste absolument individuel tout à fait anarchique du point de vue social, pourquoi ? parce que un geste profondément individuel est anonyme, il permet d’atteindre l’universel, j’en suis persuadé, plus une chose est locale, plus elle est universelle……l’anonymat dit‐il « me permet de renoncer à moi‐ même mais en renonçant à moi‐ même , j’arrive à m’affirmer davantage »
Conscient de ses contradictions sur le plan extérieur entre le besoin de faire et la répulsion provoquée par ce besoin même et sur le plan intérieur entre l’exaltation de la subjectivité et la volonté de sa dissolution dans l’anonymat .Dans les deux cas ces contradictions établissaient un écart entre les œuvres et la vie . il n’a pas cherché à les résoudre mais au contraire à les rendre fécondes. Ainsi les représentations figuratives ou les produits de l’imagination du peintre font appel à des généralisations ;
Dans FYL volet 1‐bestiaire, il prend l’art préhistorique et les cavernes rupestres comme sujet de peinture et dans le volet 2 il intériorise la création d’un nouvel homme qui représente l’humanité toute entière à l’esprit purifié dans un nouveau monde
.Quant à La deuxième signature gigantesque sous forme calligraphique ou calligramme au deuxième plan elle a la particularité de former également les éléments qui composent la tête de l’oiseau dont on peut voir le M de Miro ( figure 6 page 12)et entre les deux jambages du M calligraphié un O qui est aussi un œil, l’œil de MIRO et plus précisément avec un peu d’imagination on peut lire le nom MIRO comme il existe beaucoup d’exemple dans ses œuvres.
Ce genre de calligraphie est à rapprocher des calligraphies créées par APOLLINAIRE , les calligrammes Par cette calligraphie du nom MIRO , il s’immerge lui‐même dans l’œuvre et le O de MIRO. Le nom MIRO est placé de telle façon qu’il forme la tête de l’oiseau, c’est comme un autoportrait. L’oiseau c’est la femme , l’homme et MIRO en particulier.
On peut imaginer aussi un rapprochement avec l’autoportrait de 1937. La tête de l’oiseau serait la tête MIRO , L’ETNA serait le corps de MIRO avec le même feu intérieur , la même force apocalyptique qu’on devine dans l’autoportrait de 1937, ce que l’on trouve dans l’œil à droite de l’autoportrait de 1937 , flamme avec étincelles en forme d’étoile qui traverse l’œil on le retrouve dans l’ETNA ou le corps de MIRO imaginé. Dans ce cas de cette hypothèse imaginé, MIRO se pose en position de panthéisme démiurgique. Dans ce cas MIRO se place lui‐même dans la position de EMPEDOCLE et de l’humanité , purifié par le feu. –
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On pourrait peut‐ être aussi considérer comme signature une autre calligraphie, signe graphique du tableau en bas à gauche de couleur blanc crème . En effet elle se compose de la réunion de 3 éléments du vocabulaire des formes basique de MIRO qui a aussi une signification dans l’alphabet phénicien ou grec antique comme indiqué dans le paragraphe des calligraphies et qui ressemble aussi au premier coup d’œil à un symbole chinois ( figure 42 page 66)
Sous la signature et aussi dans un esprit créatif il y a une date, Le 3 mai 1935 ( figure71page 123). En ce qui concerne le jour, le i de mai est commun avec le 1er jambage du M de MIRO et l’année se trouve à partir du R de MIRO . Cette manière de jouer avec les lettres on le retrouve dans le tableau« Escargot, femme, fleur, étoile » de 1934 ou miro passe d’un mot à l’autre avec des effets de traits .
Il a noté l’année et le jour sur le tableau et pourtant le temps ne compte pas, a i m e t’il à dire,« J’appartiens au jour ». Il date généralement ses dessins de ses carnets non pas pour mesurer les distances, attester des progressions mais plutôt pour garder la trace de cette activité incessante… parce qu’il arrive que la forme notée tel jour , retrouvée longtemps après provoque une autre forme, parce qu’il apparait après coup que cette idée semble s’emboiter dans celle qui l’a précédé de dix ans ou 20 ans‐ la date fait la preuve que l’imagination enjambe le temps , que la création est l’ellipse du temps .
Généralement il ne date pas ses compositions picturales alors pourquoi FYI est daté . A mon sens ce qui pourrait être une explication c’est que ce tableau aurait été fait en deux temps. D’abord le volet 1 du plafond de la grotte d’ALTAMIRA qu’il a laissé non fini comme nombre de ses tableaux . Il l’a laissé en attente d’une idée qui à partir de ce tableau pourrait être le point de départ d’un autre tableau Il l’aurait donc daté pour le classer avec l’idée qui lui viendrait plus tard d’un point de départ pour un autre tableau, comme il l’a fait pour l’autoportrait de 1937 ,une nouvelle création en 1960 sur la même image mais superposée à la création de 1937 ,aussi dans le tableau FYL de la grotte rupestre,il aurait superposé un autre tableau apparemment sans rapport avec le tableau précédent , il s’agit donc du 2eme volet avec l’ETNA
D23 ‐TITRES
Dans FYL il n’y a pas de titre mais peut être pourrait‐ on lui en donner un ,le symbole graphique phénicien accompagné des trois lettres FYI en bas à gauche du tableau ! ( figure 24 page 125)ces 3 lettres je m’en suis servi pour donner le titre au tableau car dans des tableaux certains titres sont empruntés aux phrases poétiques ou aux mots qui figurent sur la toile.
Ce tableau est sans doute parti d’une tache ou d’un point pris ( figure 5 page 11par le plus grand des hasards et comme dit MIRO dans ce cas précis « J’ai beaucoup réfléchi à la question des titres, je dois avouer que je n’en trouve pas pour ceux dont je pars d’abord d’un hasard quelconque pour aboutir à un fait réel » d’autre part en 1935 date de l’exécution de FYI ,MIRO marque son désintérêt pour les titres .Dans un courrier à MATISSE ils les laissent au choix de MATISSE bien qu’il lui souligne de ne pas utiliser des titres comme « composition » qui suggèrent des affinités avec les peintres abstraits qui utilisent souvent ce titre et des titres littéraires tels qu’ils apparaissent chez les surréalistes.
En règle générale ,le peintre récusait les titres couramment utilisé par les artistes car ils lui paraissaient trop évidents et trahissaient et vulgarisaient l’œuvre qu’ils identifient
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Selon PENROSE, Dès ses premières œuvres, MIRO n’accorda que très peu d’intérêt aux titres, il pensait qu’un tableau devait parler par lui‐même
Si malgré tout on prenait le titre ,FYI ,des inscriptions du tableau , ce titre pourrait alors suggérer la mise en relation de deux civilisation .
A gauche la civilisation phénicienne ou grecque ancienne(dont ce symbole graphique signifie dans le vocabulaire phénicien taureau) . Si on dissèque les 3 traits qui forment ce symbole on peut remonter alors à la période des cavernes rupestres ou ces trois traits font parties des signes possibles de l’art pariétal , c’est aussi les signes basiques du vocabulaire MIRONIEN ( voir chapitre )
. A droite séparé par une barre transversales les 3 lettres correspondent à l’alphabet depuis l’époque romaine à aujourd’hui. Et donc l’un et l’autre correspondent au volet 1 et volet 2 du tableau
D24 ‐LANGAGE PICTURAL
Dans FYI , le peintre nous livre son langage pictural riche en signes et en symboles mais qui tend vers une épuration des formes et des couleurs, ce qui l’amène à ne garder que des formes et des couleurs simples et pures tel que les yeux ( ronds ou ovales) serpent (trait linéaire pour corps et calligraphie en forme de Y pour la gueule), 3 cotés géométrique pour le mur, simples lignes concaves et convexes pour éléments de corps démembrés, calligraphie et lettres construits a partir d’associations de traits et signes du vocabulaire basique MIRONIEN De même pour les couleurs dont la palette est limitée au bleue, vert, blanc, ocre, noir sans éclats excessifs
Cette économie de moyens , cette légèreté dans la composition tout en suggérant le maximum de choses, il s’en est inspiré de l’art pariétal mais aussi de l’art japonais ,chinois et miniatures persanes ( d’origine de MONGOLIE) qui l’ont fortement influencé . Il y puisera notamment la calligraphie la conception des vides et de l’espace, la juxtaposition de la peinture et de la poésie, les matériaux , les outils et la spontanéité constituant une qualité intrinsèque
Le peintre renonce à tout calcul esthétique mais s’exprime par la simplicité pour transmettre une quête de pureté quasi religieuse et ascétique en rapport avec l’idée qu’il veut transmettre secrètement, l’évocation de la légende d’EMPEDOCLE par son suicide et création d’un être nouveau avec l’âme purifié symbolisé par l’oiseau crée et nourri du feu de l’ETNA pour retrouver l’âme pure des hommes des cavernes rupestres
Il est toujours étonnant d’observer chez MIRO comment avec une grande économie de moyens il parvient à faire surgir une multitude d’effets et de messages picturaux et FYI en est un cas très représentatif.
Dans FYI volet 1‐BESTIAIRE En bas à gauche de couleur blanche , cette calligraphie composée de 3 signes basiques du vocabulaire Mironnien peut être vu dans les peintures rupestres comme un symbole de la chasse , qui représente un arc et sa flèche à coté posée à la verticale) . Dans la masse centrale qui fait figure de BOVIN MIRO emprunte les même signes de base de l’art pariétal composées de droites , de courbes, d’empreintes de main ( Traces de doigts dans FYI), de points noirs ( œil du bovin) de courbes ouvertes, de traits ondulés en zig zag ( naseaux et bouche du bovin)
Dans FYI ,volet 2 – ETNA, cette calligraphie se rapproche du vocabulaire de la Grèce antique et phénicien qui signifie « taureau ». Dans ce même volet 2‐ETNA on remarque à l’intérieur de la masse volcanique au milieu en transparence des lignes courbes ouvertes qui se replient d’un cercle détachées éparpillées dans cette masse qui semble vouloir se rapprocher pour reconstituer un cercle fermé et reconstituer un être c’est le message que MIRO veut nous faire passer et qui est en rapport avec son message de destruction et reconstruction d’un être pur , le cercle refermé représente l’être reconstitué
Depuis la fin du XIX éme siècle , des chercheurs ont analysées de manière à la fois historiques et mystiques tous les symboles éternels de l’art dont certains sont évoquées ci‐dessus et MIRO recueille donc les fruits de cette recherche et en place dans ses tableaux et notamment dans FYI
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Si ses compositions ne sont pas facile à analyser dans le cadre des méthodes traditionnelles de l’art contemporain, en revanche en utilisant les méthodes de l’art préhistorique , primitif ou la créativité des enfants, leurs interprétations semblent plus proches de représenter le monde tel qu’il est dans sa simplicité
Prenons d’autres exemples que FYI pour confirmer cette méthode empreinté à l’art pariétal à partir du tableau « Femme dans la nuit » ( figure 74 page 126). Dans l’enchevêtrement de lignes courbes élémentaires au centre du tableau émergent trois cercles ouverts irrégulier. Sans vraiment les représenter, ils peuvent suggérer les formes d’un corps féminin avec ses rondeurs, ses deux seins et peut être le ventre de femme enceinte … ( Dimitri OZERKOV)
.Dans un tableau sans titre de 1975 ( figure 76 page 126) on retrouve les mêmes signes du vocabulaire MIRONIENS et primitifs que dans FYI c’est‐à‐dire les compositions de l’oiseau , de l’œil du triangle qui représente la montagne avec son pic au sommet, des formes géométriques pleines pour équilibrer le tableau
FIGURE 76
D25 ‐ SIGNES INTERCHANGEABLE D’UN VOLET A L’AUTRE, SIGNICATIONS DIFFERENTES
La présence de signes figuratifs reconnaissables nous aide à déterminer la signification des images mais MIRO utilise depuis les années 20 un vocabulaire chargé de symboles fondamentaux et ses œuvres renvoient systématiquement à des thèmes de prédilection ; la femme, l’oiseau, le soleil, la lune , l’étoile, le serpent . Cette riche iconographie comprend des habitants du monde terrestre mais aussi des thèmes plus aériens comme la femme‐oiseau. Des personnages se répètent inlassablement en une vaste galerie de figures qui semblent se poursuivre à l’infinie.
On doit utiliser des clés car les images ont souvent rien à voir avec la représentation du visible empirique. Et comme dit René CHAR pour ses poèmes qui peut s’appliquer aussi aux Poèmes de RIMBAUD ou MALLARME et aux tableaux de MIRO notamment ce tableau FYI « Il faut sauter au dessus des conventions pour voir autre chose, transcender le pur registre empirique des choses »
L’oiseau c’est souvent la femme ou l’humanité dans son ensemble, le serpent le symbole de la terreur, le ciel c’est la liberté, la montagne un être animé, le volcan un champs d’énergie libérée le paysan catalan l’homme dans toute sa simplicité ,sa fraicheur loin des vicissitudes de la vie moderne , le bovin c’est la douceur, la bienveillance, C’est ainsi dans le tableau FYI.
Les formes principales et accessoires de FYI volet 1‐bestiaire permettent d’établir l’autre tableau FYI volet 2‐ Etna . Le bovin se transforme en montagne ETNA, Le mur de la caverne rupestre se transforme en mur de la tour du philosophe EMPEDOCLE .L’oiseau qui sortait de la tête du bovin, rentre dans le cratère du volcan. Le plafond Sali couleur ocre délavé de la caverne rupestre se transforme en ciel poussiéreux fuligineux des rejets du volcan.
Intéressant également de ce point de vue est le signe graphique, calligraphie ou idéogramme en bas à gauche qui a plusieurs significations ,ca peut être signe du vocabulaire MIRONIEN ( on le retrouve partout dans son œuvre et particulièrement dans son œuvre graphique, il a d’ailleurs été repris comme logo de la fondation MIRO de BARCELONE ( figure 42 page 66))cela peut être une lettre de l’alphabet phénicien qui d’ailleurs veut dire taureau ! et donc bien adapté au volet 1 de FYL ou la forme principale du tableau est le bovin, c’est aussi une lettre de l’alphabet grec ancien et cela ressemble bien entendu à un idéogramme chinois donc ce signe peut être lu à plusieurs niveaux et renferme des idées multiples
Pèle ‐mêle nous trouvons une multitude d’éléments qui semblent indépendants et c’est au spectateur de mettre de l’ordre dans tout cela et de déterminer sa signification car MIRO ne donne pas d’explication
D26‐SUPPORTS
Miro a dessiné et peint sur toutes sortes de supports, toiles, papiers, cartons, bois, céramique, galets, tissus, murs. Le support utilisé pour FYI est un papier cartonné de couleur ocre terreux qui a été déjà utilisé sans doute pour le nettoyage des pinceaux . Ceci est surtout visible sur le dos du tableau ou l’on remarque des taches de peintures mélangées à de l’essence . Miro avait horreur de travailler sur des surfaces vierges et propres, il préfère travailler sur des supports déjà utilisés ou des fonds ayant subis des taches volontairement ou involontairement qui deviennent pour lui comme un vieux mur plein de taches, à l’exemple de « mur de la lune »ou de « femme oiseau »
S’il était amoureux de toutes les matières, sa passion pour la richesse infinie des papiers est sans doute la plus constante et la plus vive . Le tableau FYI est fait sur papier cartonné de couleur sable ou terre ocre. Ce tableau à la particularité d’être de petite taille mais ce n’est pas exceptionnel, en 1955 il exécute une série de petits tableaux dans sa manière miniaturiste et malgré cet aspect on y trouve la plupart de ses signes les plus importants : la femme, le soleil, l’oiseau. Ces formats réduits expriment aussi sa méfiance de la peinture de chevalet et sont dans une longue tradition Mironiene tout est bon pour éviter la peinture de chevalet.
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D27‐COULEURS ET TRAITS
En 1934 PENROSE nous dit « MIRO renonce à la discipline de la couleur et des aplats, il accentue les rondeurs à grand renfort de dégradés et de traits acides »
Le période 1934 notamment à partir de l’automne MIRO abandonne les couleurs pures , FYI de mai 1935 est déjà dans cette optique
D’autre part on peut remarquer comme le dit CIRICI que « l’analyse de la gamme des couleurs de MIRO révèle qu’elle n’est pas la gamme optique issue de la tradition scientifique européenne , mais une gamme née d’une pratique professionnelle . Elle ne provient ni de la contemplation de l’arc en ciel ni du spectre produit de la décomposition de la lumière blanche traversant un prisme ; elle est le témoignage d’une expérience pratique, des problèmes et des découvertes d’un homme qui peint sur un support toile ou papier. C’est ainsi que son schéma fondamental de couleurs correspond au schéma japonais.
Comme indiqué ci‐dessous le tableau FYI est divisé en 3 plans
1- Le Fond
Miro a horreur de travailler sur des surfaces vierges il préfère travailler sur des supports déjà préparés qui deviennent comme de vieux murs plein de taches, ce qui correspond tout à fait au fond de FYI
Dans FYI, Le fond est monochrome, non peint, il se confond avec le support, couleur ocre terreux, sableux de la couleur du papier cartonné parsemé de traces de doigts, de saleté et de poussière et sans doute aussi de traces laissées par nettoyage des pinceaux sur ce support carton .
Ce fond semble s’ouvrir sur le vide et comme dit MIRO pour ses fonds ; « je voulais que les tâches semblaient s’ouvrir comme disponible devant l’attrait du vide, j’étais très intéressé par le vide, cette vacance parfaite, je la mettais dans des fonds délavés et brouillés… »
Ce vide permet d’avoir un fond parfaitement libre à l’imagination et à ses interprétations illimitées.
Ce fond non peint de FYI, avec éparpillé de façon anarchique des traces de saleté, d’huile de nettoyage des pinceaux sert principalement à provoquer l’étincelle initiale et à fournir des motifs essentiels après quoi comme l’explique MIRO « la deuxième étape » est soigneusement calculée ainsi dans FYI il explore L’étape 1 de l’art pariétal avec la grotte ALTAMIRA imaginé par lui avec le bovin, les traces de doigts, le mur de la caverne, le plafond de la grotte dont la couleur de fond correspond tout à fait sans réaliser des jeux de couleurs qui correspondent à la grotte , c’est le papier sali qui a fait tout le travail préliminaire
Il est alors aisé de trouver des interprétations pour les volets 1‐bestiaire et 2‐Etna tout cela pour représenter d’une part dans le volet 1‐bestiaire, l’aspect du plafond de la grotte rupestre paléolithique d’ALTAMIRA marqué par des siècles de présence et d’humidité par la présence de l’eau et les poussières des rochers en suspension dans l’air.
Dans le volet 2 le fond c’est le ciel volcanique fuligineux des poussières et des gaz du volcan qui donne cet aspect ocre terreux
Ce fond permet le dialogue entre le volet 1‐bestiaire et le volet 2 ‐Etna de FYI
Ce résultat correspond à ce qu’en dit MIRO lui‐même : « la plupart du temps mes fonds viennent du jus produit quand je nettoie mes brosses, il partent de là ,tout ce qu’il y a sur mes brosses »
Cette façon de travailler un fond , on le retrouve dans d’autres tableaux comme « Naissance du monde » ( (figure )et comme l’indique son titre MIRO explore l’idée universelle de la création à partir du vide un seul grain de poussière suffit à enclencher l’étincelle du MIRO demiurge.
Alors qu’il peignait « le carnaval d’arlequin « il avouait être obsédé par une seule idée « il me faut conquérir le monde » et il déclarait aussi plus tard : « le tableau doit être fécond, il doit faire naître un monde » Quoi de plus créateur de reprendre l’humanité à son origine dans le volet 1 de FYI avec la représentation de l’art pariétal selon MIRO à la place de DIEU et dans le volet2 alors que selon MIRO le monde va à sa perte , il prend son bâton de destructeur et de créateur pour une opération de purification en détruisant l’homme dépravé, par le feu du volcan ETNA pour recréer un homme nouveau avec un retour à l’origine du monde et ainsi dans FYI , la boucle est bouclée .Toute l’histoire de l’humanité selon MIRO est représenté dans ce tableau FYI. L’acte de faire ce tableau « FYI » est donc littéralement « la mise en œuvre du MIROMONDE , le peintre prenant la place de DIEU comme « intelligence » qui fonde le nouvel univers . » (Victoria Noel‐JOHNSON)
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‐2– Le plan intermédiaire
Ce 2eme plan correspond au ¾ du tableau, c’est-à-dire à cette Masse diffuse sombre au clair obscur qui crée une ambiance inquiétante et troublée dont le contour n’est pas strictement délimité et suffisamment flou pour ne pas détailler un objet en particulier. Encore une fois le peintre laisse au spectateur le libre choix dans l’interprétation de cette masse. Cela donne l’aspect de spontanéité comme si le peintre s’était abandonné en toute liberté à sa seule inspiration en faisant abstraction de tous ses acquis en peintures à la manière d’un enfant qui découvre le dessin et la peinture
Dans l’optique du volet 1 -bestiaire on peut y voir la forme d’un Bovin aux contours indécis ( Figure 2 page10)et dans le volet 2 la forme de la MONTAGNE ETNA( Figure 3-4 page 10-11)) , Les couleurs peuvent s’adapter à l’une ou à l’autre
Si on regarde le tableau à une certaine distance on a l’impression que la masse centrale n’a qu’une seule couleur sombre dégradée de bas en haut et difficile à déterminer entre le noir et le marron or ,quand on s’approche de près, on s’aperçoit que la couleur verte est dominante avec plusieurs teintes.
En haut au niveau de la tête de l’oiseau ,il s’agit d’un vert peint à l’huile semblable au vert Viridian et sous la tête un vert foncé bleuté. Ce même vert foncé bleuté se retrouve aussi en bas de la masse et remonte le long de la paroi jusqu’à l’oiseau. En allant vers le haut par la gauche de cette masse ce vert bleuté se transforme progressivement en vert marron pour être de plus en plus fluide jusqu’à disparaitre et retrouver le papier directement , A cet endroit la peinture semble avoir été grattée jusqu’au papier.
Une autre teinte de vert entoure la masse de façon désordonnée, sous forme de traits discontinus coté mur et sous forme de halo vert de l’autre côté. Il s’agit d’un vert tendre qui ressemble à du cadmium foncé
En ce qui concerne la composition de cette masse centrale elle semble un mélange de peinture gouache , d’essence et d’eau, les mélanges étant différents en haut et en bas de cette masse, le haut étant beaucoup plus fluide, une partie du marron en haut a été gratté jusqu’au papier, là aussi le peinture semble avoir été mélangée à de l’essence et probablement à de l’eau dans la partie haute qui se présente comme la représentation dans le volet1-bestiaire du plafond de la grotte un endroit de la peinture rupestre ou il y a eu des infiltrations d’eau du ruissellement du à l’humidité de la grotte
Par cette différence de fluidité et de clarté de cette masse et le halo de vert tendre sans doute le peintre à voulu marquer la période horaire de cette peinture. Il s’agit probablement de l’aube à la levée du jour qui se profile , le soleil commençant à éclairer à partie haute alors que la partie basse est encore dans la pénombre. La couleur verte correspondant bien à la couleur naturelle de la levée du soleil
Une remarque importante est que lorsqu’on regarde une série de peintures « Les constellations » faites quelques années plus tard, on remarque une grande similitude dans l’aspect de la peinture FYI avec cette série des constellations à partir de 1941 .En prenant l’ exemple de la peinture nommée« réveil au petit matin » on remarque que de l’essence de térébenthine a été additionné dans les mêmes proportions à de la gouache en haut de la masse de FYI ,l’aspect des deux peintures semblent identiques ( fig 56 page96 ).
MIRO ETOILE DU MATIN
FIGURE 77
Dans une autre constellation comme « Etoile du matin » ( FIGURE 77 page 129)° toujours le même fond de gouache et d’essence donne la même fluidité de la peinture . Le fond du tableau « étoile de matin » est en 3 parties de couleurs pales comme le pastel, faites de rouge, vert jaune .
De ce point de vue FYI est composé de 3 couleurs également mais dégradées qui vont du bleu vert foncé à partir du bas pour passer au vert puis au marron vert clair en haut.« Etoile du matin » comme FYI situent à la levée de soleil hivernal . Ces deux tableaux expérimentent des textures complexes.
En effet on remarque une caractéristique présente dans l’un et l’autre , il s’agit sans doute d’un effet qui résulte de peinture mélangée à de l’essence et de l’eau c’est ce qu’on appelle l’effet peau de crocodile . Ce type de peinture avec des rides , peau de crocodile ou cratère est très fréquent chez un peintre qui a été inspiré par MIRO, :WILLEM DE KOONING et d’après les études sur le tableau « étoile du matin », il semblerait que le point de départ serait des traces laissées par le nettoyage des pinceaux , ce qui serait aussi probablement le cas de FYI
Pour MIRO l’importance d’un tableau ne s’exprime pas à l’importance de ses dimensions ( les constellation ne font que 38x45), par des couleurs et formes flamboyantes qui étincellent mais à ce qu’il suggère dans l’esprit des spectateurs et aux germes qu’il laissera . Voici ce que MIRO pense des constellations dans un courrier à Pierre MATISSE
« Je crois que c’est une des choses les plus importantes que j’aurais faites et quoique de petits formats elles donnent l’impression de grandes fresques….Je travaille à ces toiles en tenant compte que fort heureusement elles m’incitent à concevoir d’autres œuvres.. »
FYI montre que de déjà en 1935, il y avait les prémices de ce que seront les constellations en 1940 , par la façon de commencer un tableau ( taches suite à nettoyage de pinceau)par la texture des couleurs de fond, l’emploi de l’essence avec la gouache , la taille des tableaux, la présence du cosmos, de la préhistoire , le procédé propre à MIRO dans lequel un tableau en appelle un autre sans avoir de rapport direct avec le précédent, à chaque fois une nouvelle approche est explorée , dans une humilité de technique et de dimension .
Comme les constellations on peut voir FYI comme un cri poignant de l’âme ,les balbutiements d’un nouveau monde et d’une nouvelle humanité qui se lève sur des ruines de l’ancienne en soulignant la nature précaire et illusoire de notre existence .
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2- Le premier plan
Dans le cas du 1er volet- bestiaire ,il correspond à la partie délimitée par le mur de la caverne rupestre et la terre à l’extérieur de la caverne
Dans le 2eme volet -Etna c’est le mur du philosophe (EMPEDOCLE) ( figure 4 page 11) et la terre avec en sous - entendu les profondeurs de la terre symbolisées par le serpent
Dans ce 1er plan ( figure 2page 10) sur une surface au fond non peint directement sur le carton brut ont été rajouté quelques touches de bleue, qui semble être le bleu qu’utilisait fréquemment MIRO dans les années 40 , le bleu CERULEEN , de blanc et de vert diffusés très légèrement dans des tons clairs presque transparents laissés de manière irrégulière et laissant apparaitre directement le carton sur une bonne partie de ce premier plan. Cette transparence vient peut -être du fait que le peintre a peint cette partie teintée de bleue de blanc et vert avec ses doigts ou comme il le faisait aussi régulièrement avec une poignée de paille. D’ailleurs des traces de 2 doigts sont visibles en couleur marron-noir entre le mur et le volcan( figure 59 page 101)
Des personnages sont visibles en transparence ( la paysan catalan et le serpent)( figure 52-53 page 83-85). Un tout petit point rouge ( figure 85 page 137) au milieu du mur est disposé là sans raison apparente. Des lignes discontinues de vert de blanc très floues délimitent le premier du second plan . On peut rapprocher cette surface au fond de « naissance du monde » fait aussi de fond ocre sur carton sale de taches sombres sur lequel des aplats de couleur surnagent
En règle générale et au fil du temps MIRO diminue le nombre de couleurs, il dit « Peu a peu je suis arriver à ne plus employer qu’un petit nombre de formes et de couleurs, ce n’est pas la première fois que l’on peint avec une gamme réduite de couleurs, les fresques du X éme siècle sont peintes ainsi. Mes personnages ont subi la même simplification que les couleurs »
Dans ce 1er plan de FYI les couleurs sont éthérées, fluides, diluées et rappellent les fresques des peintures romanes catalanes en offrant une transparence , car rajoutés avec de l’essence de térébenthine .Dans cette partie du tableau FYI , les couleurs sont le bleu, le vert, le blanc, le marron-noir qu’il utilisait fin des années 30 début 40 et la couleur ocre du papier
La couleur dominante de ce premier plan sur ce fond ocre couleur du papier cartonné est le bleu
Miro a une affinité naturelle avec le bleu c’est notamment sa couleur qui favorise la libre circulation del’imagination. Dans le folklore Catalan le bleu a toujours eu une signification particulière. Dans les villages, les maisons ou les portes et chambranles d’époque anciennes étaient peintes de bleu comme dans son village d’enfance à MONT-ROIG, le bleu était aussi dans les croyances, une protection contre les mauvais esprits. C’est aussi la couleur des poètes qu’il aimait, le poète Ruban DARIO avec son premier recueil « AZUR » ou le bleu transpire à travers ses pages et le poète MALLARME dont le bleu signifiait à la fois l’inaccessible immensité métaphysique et l’abime. C’est aussi une couleur qui est partagée par tous les peuples, il est à la fois cosmique et sacré. Cela donne déjà un sens spirituel a ses tableaux.
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Dans FYI le bleu se trouve au niveau du mur dans la partie haute et sur le bordsdu mur, Ce bleu du mur est très fluide presque transparent car il semble mélangé à de l’essence de térébenthine Il apparait comme des taches sur le fond ocre du papier. Il se trouve aussi présent dans les yeux de l’oiseau au plan intermédiaire mais ici c’est de l’huile pure sans essence
Entre le mur du 1er plan et la masse centrale du 2eme, on remarque des traces de doigts , les doigts du peintre, de couleur marron-noir
Quelques taches de blanc sont présentes au niveau du serpent( Figure 35 page 60) .Blanche aussi la calligraphie et les lettres FYI et quelques traits blancs oscillants au dessus de la tête du personnage, C’est un blanc gris comme celui qui contient du blanc de titane
On remarque aussi un minuscule point rouge( figure 85 page 137) comme une infime étincelle lumineuse perdue au milieu du mur et qui ne semble pas avoir de raison d’être. Peut être est ce juste à clin d’œil à un tableau hollandais dont il parle dans un entretien avec DORA VALLIER en1960 : « lors de mon voyage en Hollande , ce qui m’a vraiment impressionné, c’était une nature morte dans laquelle on pouvait voir même les objets pas plus grands qu’une puce. J’ai été séduit par cette capacité des peintres Hollandais de faire ressortir des points minuscules comme des grains de poussière et de concentrer l’attention sur une petite étincelle au milieu de l’obscurité. C’est là le plus grand pouvoir de fascination »
En définitive les 3 plans peuvent être regroupés en deux plans. Le 1er plan et le plan intermédiaire ne font qu’un. En effet entre le 1er plan et le plan intermédiaire non seulement n’y a aucun espace mais le peintre les a collé avec les traces de ses doigts qui font la soudure entre les deux plans le restant du tableau formant le fond brut exempt de peintures . Seuls restent des traces de saleté et de restes de peintures à nettoyer sur le pinceau étalées sur la totalité du fond et dans ces deux plans regroupés les figures se confondent. En bas le paysan catalan et le serpent se trouvent en transparence avec la couleur du sol . Le bas du mur et le dos du serpent sont reliés par une ligne commune. Il n’y a pas de différence de couleur , de structure entre le sol et le mur.
Dans le plan intermédiaire la masse sombre fait bloc avec l’oiseau , dans le volet 1 il y a interpé- nétration entre les deux.
Roselind KRAUSS écrit que dans les œuvres peintes après 1924, il y a confusion entre figures et fond ,dissolution de la linéarité dans la présence picturale
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D28 ‐LIGNES , TRAITS ( figure 81 page 132)
La ligne est essentielle dans l’art de MIRO . Il a souvent été écrit que l’art de MIRO est puissamment un art des signes ,de la calligraphie des idéogrammes dont la base est la ligne. Cet élan triomphal de la ligne débute au milieu des années 20. Les lignes sont alors dépris de leur fonction de circonscription et par là même dotées d’une capacité d’autoréalisation qui leur permet de fonctionner à l’écart, de circuler librement dans les surfaces de manière errantes fragmentaires, ouvertes, géométriques , ondulantes ,électrisées. Les lignes cessent d’’être des contours, elles peuvent devenir des lettres qui cessent de devenir des mots. Ce sont donc plus que des contours, une détermination de surface ou un profil des choses, une existence qui se suffit à elle-même parce que son sens est accompli..
Dans FYI les lignes à l’intérieur de la masse centrale ne sont pas des contours de formes ou d’objets, elles ont une vie autonome et se métamorphosent quand elle passe du volet 1 au volet2 et vice et versa. Les lignes noires dans le volet 1 n’ont pas de fonctions alors que dans le volet 2 elles symbolisent la destruction des membres des corps et de leur reconstructions alors que les lignes blanches symbolisent des éléments de la tête du bovin; naseaux et bouche alors qu’elles ne semblent pas avoir de signification dans le volet 2.
FIGURE 78 et 79
En bas à gauche des lignes blanches sont agencées pour former un symbole graphique sous un aspect d’idéogramme et des lettres indépendantes ( figure 80 page 131).
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TRAITS ET LIGNES DE FYI
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Toutes ces lignes font partie du vocabulaire de base MIRONIEN avec des variantes car ce vocabulaire n’est pas figé, il est souple et s’adaptent dans les différents tableaux.30 ans plus tard ,FYI (1935) dans « l’espoir d’un condamné à mort » chaque élément du triptyque ne comporte qu’une seule ligne à la fois fonction et forme qui donne au tableau son expression dramatique .La ligne, moteur central du motif agit alors comme manifestation graphique et figure abstraite de la pensée.
CIRICI qui a bien étudié la ligne de MIRO nous explique que fréquemment la ligne tourne doucement mais rarement en une seule courbure ; l’artiste fuyant la facilité, la torture légèrement et lui impose de temps à autre des changements de direction ( c’est ce qu’on peut remarquer dans les lignes du tableau FYI, lignes noires au milieu de la masse centrale ,lignes blanches en bas à droite de cette masse centrale). Ce contrôle des lignes fait qu’elles cessent de jouer le rôle d’éléments d’une technique figurative pour pouvoir jouer celui de signe, bien que leur point de départ soit , par exemple un motif organique ( dans FYI ;ligne blanche naseaux et bouche du bovin) , une forme vivante , tirée de l’expérience visuelle… Miro ne trace pas une ligne sous l’effet de l’inspiration dans un geste spontané du bras , geste cursif et dû au hasard : au contraire , pour déterminer toute trajectoire il dispose lentement , l’un après l’autre de petits segments de lignes de 4 ou 5 millimètres. Cette méthodologie lui assure une limpide précision dans le résultat » ( dans FYI idéogramme en bas à gauche formé de petits traits du vocabulaire de MIRO)
CIRICI nous dit également en ce qui concerne la ligne, « L’artiste ne laisse pas les lignes procéder à leur fantaisie et pourtant ce n’est pas sa décision volontaire mais son état d’esprit , son reflet subconscient qui cherche à les dominer, leur champ est toujours un domaine dominé »
La ligne chez Miro c’est donc sa signature , c’est sa sensibilité dans la manière dont elle se livre , par sa densité, sa simplicité , sa concision.
Dans FYI ,le peintre ne fait aucune attention à l’esthétique et à la précision de la ligne et comme le dit TAPIES " MIRO nous montre dans ses tableaux, l’innocence des premiers jours, la pureté des premiers dessins primitifs et ainsi retrouver les sources limpides si nous ne voulons pas nous perdre dans une société pernicieuse pleine de fausseté et de mensonges »TAPIES comme MIRO n’ont jamais utilisé le dessin pour imiter un modèle mais pour le déformer et atteindre sa propre signification dans une irréalité expressive"
Dans cette même mouvance de la ligne des œuvres de MIRO,le tableau FYI comporte quelques lignes noires ouvertes dans la masse centrale du tableau, lignes noires concaves et convexes dont deux à l’opposé l’une de l’autre ( figure 81 page132, qui n’ont pas d’explications figuratives mais dont on peut imaginer que dans le volet 2 ces traits représentent en transparence à l’intérieur du volcan les éléments de démembrements des corps pour leur destruction ,avant recréation pour purification des âmes et des corps dans l’optique de la légende d’EMPEDOCLE
En dessous des lignes curvilignes, il y a deux lignes blanches oscillantes ont leur place dans le volet 1 - bovin , ce pourrait être pour l’une les naseaux du bovin et pour l’autre la bouche de l’animal là aussi une simple ligne suffit ( figure 81 page 132)
Pour en revenir aux lignes noires curvilignes de FYI volet 2-Etna, Ces lignes ouvertes noires vont par la suite se refermer dans leurs mouvements pour former un nouvel être en phase de création .Ces lignes courbes sont faits de traits plus ou moins épais et irréguliers ( figure 81 page 132)
Quand aux deux traits blancs sans doute faits nerveusement car tremblants , l’un sinusoïdal ondulant très fin , l’autre changeant brusquement de direction pour remonter sur le bord de la masse sombre . Cet aspect tremblant permet une meilleure intégration dans le tableau
Au même au niveau du mur , des lignes tremblantes et discontinues délimitent le mur afin de donner une apparence de liaison entre le mur et L’ETNA..
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Tout autour de L’ETNA ( ou BOVIN) , du mur et de l’oiseau on trouve sous des couleurs vertes des lignes, des halos de peinture qui palpitent, posées de manière irrégulières pour bien marquer les changements et les procédés de couleur ( on retrouve ce même halo dans te tableau figure 82 page 134 … )
Pour MIRO chaque ligne exprime une attitude
Les traits noirs auraient leur application dans le volet 2 de l’ETNA, les traits blancs dans le volet 1 Bovin Ces traits ne semblent pas avoir été faits avec les mêmes instruments de peinture .les courbes noires crée auraient été appliquées avec un pinceau très fin alors que les traits blancs pourraient avoir été appliqués avec du bambou japonais qui est plus vif à réagir au mouvement de la main, et amplifie les moindres impulsions ou pourquoi pas un cure dents qu’il utilisait aussi pour ses peintures . Miro utilisant fréquemment l’un et l’autre des instruments pour ses dessins
En ce qui concerne les lignes ouvertes MIRO disait :« J’ai horreur de la ligne fermée, qui ne fait que ramener à elle-même
D’autres lignes intéressantes sont présentes dans FYI. En bas du tableau ,une simple ligne noire nous indique à la fois le dos d’un serpent, la ligne inférieure du mur et une ligne qui donne une structure géométrique de 3 axes que font , le pan vertical du mur, la ligne du dos du serpent et la ligne supposée entre le volcan et la terre . Ces 3 axes donnent un aspect tridimensionnel du mur. Dans la simplicité et la concision on ne peut faire mieux ! Une seule ligne suffit pour le dos serpent et la limite inférieur du mur et comme dit MIRO « pour moi , conquérir la liberté c’est conquérir la simplicité alors à la limite une seule ligne suffit à faire un tableau »
Des lignes aussi délimitent les contours du mur , mélanges discontinus , fragmentés de vert de noir de blancs apposées de manière brutale sans délicatesse sans doute pour marquer l’aspect usé , vieilli du mur qui a essuyé des intempéries des siècles passés ( humidité, éruptions, tempêtes etc)
Enfin ce qui peut être considéré comme des traits également dans FYI ce sont en bas à gauche de couleur blanc-gris cadmium un idéogramme ,un trait vertical suivis de 3 lettres FYI ; Tout cet ensemble se décompose en traits , lignes qui font parties du vocabulaire , symboles et signes basiques de MIRO dont il a été fait un état ( fig 41 page 65) ) l’idéogramme comporte 3 signes basiques ( fig ) et FYI (42 page 66) répétition de même trait) . Ce signe graphique est a rapprocher d’un idéogramme chinois ancien mais aussi de l’alphabet phénicien et grec ancien
Chez MIRO la ligne évolue avec le temps., il disait :, « A une certaine époque , je dessinais des lignes très minces presque exclusivement. par le suite instinctivement j’ai élargie ma ligne jusqu’à dessiner avec les doigts ». Dans FYI on remarque une alternance de traits brutaux et traits très fins ,lignes très fines blanches ondulées pour bouche et naseaux du bovin-bovidé, lignes plus épaisses sur ,les bords du mur
L’expression autonome du trait, de la ligne est un fait fondamental. A travers le dessin son rôle n’est pas d’imiter le modèle dessiné mais de le déformer pour atteindre sa propre signification dans une irréalité expressive
On peut remarquer aussi dans FYI que la plupart des traits du tableau sont orientés vers le haut sauf le trait du serpent, c’est sans doute le signe que tout aspire vers le ciel vers la purification , seul le serpent rejoint son royaume des ténèbres souterrains
Si la sensualité d’un artiste se révèle dans ses peintures , dans sa manière dont il caresse le pinceau onctueux, les aplats de couleurs, sa sensibilité se perçoit mieux lorsqu’il se livre à des exercices plus graphiques, la courbe d’une ligne, sa densité, sa finesse sont la signature d’un artiste.
On se souvient de l’anecdote rapportée par PLINE où APELLE, passant à l’atelier de PROTOGENE à RHODES et le trouvant vide, laissa une simple ligne sur un panneau.
A sa délicatesse, PROTOGENE une fois rentré sut l’identité de son visiteur et traça une ligne plus fine encore. APELLE revint et refendit de nouveau les deux lignes par une autre qui ne laissait place à rien d’autre de plus fin. PROTOGENE s’avoua vaincu et conserva le panneau pour l’édification des peintres et PLINE d’ajouter, « j’ai vu jadis cette planche, elle ne contenait rien sur sa vaste surface que des lignes qui échappaient à la vue au milieu de beaucoup d’ouvrages remarquables. Elle paraissait vide mais par cela même elle attirait le regard et devint plus célèbre que tout autre morceau.
MIRO disait dans un entretien « Pour moi conquérir la liberté, c’est conquérir la simplicité alors à la limite, une ligne, une couleur suffisent à faire un tableau »
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D29 ‐GRATTAGE
Dans le tableau FYI on remarque des traces de grattage à 2 niveaux. En haut à gauche dans la masse centrale, la couleur a été grattée pour remettre le papier à nu ( figure83 page 135). La raison est est sans doute pour donner plus de réalité à la représentation du bovin du plafond de la grotte ALTAMIRA et ainsi donner l’impression réelle de la présence des siècles passées et l’aspect vivant de la grotte qui par les eaux de ruissellement ont terni ou supprimé par endroit la peinture
Au niveau de l’oiseau sous l’œil en amande à gauche la peinture a été grattée et a laissé quelques traits de grattage sans doute pour enlever un peu d’épaisseur et les traces de vert restantes
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D30‐ MIRO et l’ASIE
la phrase de TAILLANDIER prend ici tout son sens, je vous la rappelle
« Miro évoquait non seulement les anciens chinois mais les Présocratiques, notamment par l'importance qu'ils donnent au feu sous l'aspect de l'étincelle »
Cela en une phrase seulement , résume exactement ce qui est évoqué dans ce tableau avec la purification par le feu , l’image de l’étincelle est visible extérieurement alors que le feu est intériorisé dans le tableau .
La Chine antique de TAO et la Grèce antique des présocratiques sont présents et essentiels dans ce tableau FYI .La philosophie de EMPEDOCLE et des autres présocratique sont très proches de la philosophie de CONFUCIUS et de TAO.. Les deux philosophies font une grande place à la nécessité de la purification, Comme EMPEDOCLE ( voir chapitre ci-dessus) , Les Chinois anciens croyaient aussi à la pluralité des âmes dans le corps ainsi que leur transmigration élective après la mort de l’individu.
C’est l’image même extérieure et intérieur du volet 2 de FYI
En bas à gauche ,le signe calligraphique ,CHINOIS ou idéogramme qui est aussi un signe de l’alphabet grec ancien ( correspond à notre A et qui signifie aussi taureau) est donc le pont entre les deux , un pont entre la philosophie chinoise de Confucius et de Tao et la philosophie de EMPEDOCLE et des autres présocratique qui sont très proches..
Miro s’est intéressé très tôt à l’Orient en raison de la contemplation de cette civilisation . Il l’a d’abord rencontré à travers des estampes japonaises qu’il a commencé à aimer dans sa jeunesse à BARCELONE au point de les intégrer dans ses tableaux vers 1917 et dont il avait reconnu qu’il avait influencé ses tableaux détaillistes .
Avec le peintre MASSON ,il partage son enthousiasme pour l’Orient ,enthousiasme qu’il partage aussi avec le critique et écrivain d’art Georges DUTHUIT spécialiste de l’art BYZANTIN et CHINOIS ( Mystique chinoise et Peinture moderne, Byzance et l’art du XXII eme siècle), de Henri MATISSE son beau père et de l’art CHINOIS entre autres.
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En 1936 DUTHUIT écrira sur MIRO dans Cahiers d’art ( N°8-10) et plus tard sous forme d’entretien« "Ou allez- vous MIRO ". Ils s’aperçoivent très vite qu’ils ont beaucoup de choses en commun dans leur regard sur l’art, la peinture, la poésie et plus largement sur la vie sociale et politique
Cette résurgence de la référence extrême orientale partagée par MIRO et MASSON dans la moitié des années 30 doit beaucoup à Georges DUTHUIT et à son livre "mystique chinoise et peinture moderne"
En 1935 et 1936 DUTHUIT et MIRO se verront souvent chez MASSON à BARCELONE et MIRO sera très impressionné par le livre de DUTHUIT « mystique chinoise et art moderne » et presque immédiatement, Miro a repris textuellement le discours de DUTHUIT ,en évoquant à PIERRE MATISSE en décembre 1936,des poèmes qu’il était en train d’écrire en lien avec des images,« comme faisaient les maîtres japonais ou chinois d’autrefois ». Il faut dire que DUTHUIT, plaçait MIRO à la pointe d’une lignée de peintres occidentaux modernes qui avaient établi des ponts entre leur conception de l’œuvre et celle des peintres chinois
Dans ce livre on remarque de nombreux points communs entre DUTHUIT et MIRO facilité par leur amour réciproque de l’art CHINOIS En règle générale pour les deux, l’écriture , la poésie, la peinture sont inhérent à l’artiste peintre chinois et à la peinture pratiquée par MIRO. Les affinités de MIRO avec l’esprit chinois sont telles qu’il lui arrive de dessiner des calligraphies chinoises dans son œuvre , s’approchant ainsi de l’effet obtenu par des peintres chinois qui en extrême orient inscrivent leurs impressions poétiques sur des rouleaux de maître .
La calligraphie, idéogramme chinois ,c’est en premier lieu , la commune origine de la poésie et de la peinture. Le chinois peut attacher une grande valeur littéraire au tableau au point de paraitre confondre lorsqu’il parle de celui-ci, peinture et poésie. Dans FYI la calligraphie chinoise est là et le tableau FYI ( volet 2) peut être regardé comme une poésie de CHAR ou de HERACLITE due à la fragmentation de l’image pour la reconstituer et lui donner un sens( voir paragraphe sur HERACLITE ET CHAR)
En associant peinture et poésie Miro retrouve instinctivement la tradition orientale qui ne distingue pas le peintre et l’écrivain, les associent tous deux dans la figure du lettré, cet érudit imprégné de culture classique qui est au cœur de l’élite intellectuelle de la chine ancienne. Cette fusion peinture écrits poétique ( par des mots inscrit dans la toile) se manifeste pour la première fois dans ses tableaux des années 1924-1927.
Dans FYI les lettres et le signe calligraphique en bas à gauche peuvent être posés comme une référence à l’Asie mais aussi à la Grèce antique ( le signe calligraphique signifie taureau dans l’alphabet grec ancien ou phénicien)
J’ai émis l’hypothèse ci-dessus que MIRO aurait pu offrir le tableau FYI à DUTHUIT entre autres pour information. C’est écrit FYI ( For your information) en bas à gauche du tableau, alors que le livre « mystique chinoise et art moderne » était encore sous forme de projet en mai 1935, le livre sortira Aux éditions des chroniques du jour en 1936)
L’orient c’est aussi la miniaturisation de la vision des tableaux et miniaturisation des objets et peintures de la chine ancienne( miniatures perses de Mongolie) , je vous rappelle les dimensions minuscule de ce tableau FYI qui en dit tant sur un si petit tableau !
Le tableau a aussi un rapport à ce que disait André BRETON de l’ORIENT :
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« Orient bel oiseau de proie et d’innocence »
En effet l’oiseau au sommet de l’ETNA représente un oiseau ( hibou ou chouette) considéré comme un rapace et donc oiseau de proie dont MIRO veut le retour à l’innocence de premiers Jours . Cette phrase de BRETON ferait un merveilleux titre du tableau FY I volet 2 .
Cette phrase est tellement bien adapté au tableau FYI qui aurait pu faire l’objet aussi d’un don à BRETON
Autre point de FYI qui découle de l’art CHINOIS est que la peinture chinoise ne rejette la vie pour se perdre dans un abime sans fin de rêverie comme FYI , on y rêve certes avec le désir de pureté retrouvé des hommes comme au temps des hommes des cavernes situé en haut du tableau FYI mais simultanément la réalité de la terre est toujours là avec l’agressivité du serpent en bas du tableau
Les affinités de MIRO avec l’esprit chinois sont devenus tels que comme dans FYI il lui arrivait de tracer des lettres ,des calligraphies comparables à celles pratiquées par les chinois s’approchant ainsi des peintres chinois qui inscrivaient leurs impressions poétiques directement sur les rouleaux
En résumé , MIRO malgré son désir de détruire la peinture et le monde en conséquence exprimé dans ses tableaux , « il est fasciné par le primitivisme , l’art d’asie ,qu’il soit japonais ou chinois , il a un profond respect pour certaines périodes de l’art et certains artistes avec qui il entre parfois en dialogue direct. Il est clair cependant que son but est d’en extraire la pure essence poétique plutôt que pictural, Il prend ce qui lui convient et le soumet à son propre processus de transformation afin d’aller au-delà de la peinture » ( Victoria NOEL-JOHNSON)
Dans FYI ,Volet 1 , l’origine , le point de départ du tableau vient peut être d’une photo d’un magazine représentant la grotte d’ALTAMIRA quand au volet 2 , une autre photo ou carte postale de L’ETNA à rapprocher de la légende d’EMPEDOCLE et des présocratiques, très proches aussi des Taoïstes dont il avait entendu parler chez MASSON rue BLOMET lors de réunions de poètes, de philosophes , d’ethnologues
D31 ‐MIRO ET LA CULTURE HINDOUE, LE CHAMANISME
Comme indiqué précédemment, l’oiseau pourrait être selon la légende d’EMPEDOCLE , le philosophe sortant du volcan purifié par le feu du volcan et s’envolant vers le ciel , vers la félicité. Pour MIRO dans son tableau l’oiseau c’est la femme, l’homme, l’humanité, Miro lui- même ( l’oiseau est constitué par le calligramme comportant le nom MIRO), L’œil rond de l’oiseau n’est t’il pas l’œil de MIRO placé dans le creux de la lettre calligraphié du M de MIRO
Dans toutes les cultures primitives ,les aspirations traduisent le besoin de se libérer des liens qui nous rattachent au monde matériel .Ces cultures de conception primitives recoupent les croyances de MIRO, imaginées dans FYI en la nécessité d’une métamorphose, d’une transcendance.
Dans la culture Hindoue dont MIRO a été initié par son ami le poète ARTAUD et ses vues animistes, l’envol est un symbole de la libération vers la purification comme le présocratique EMPEDOCLE et de ce point de vue on peut faire aussi le rapprochement entre le tableau FYI et les rites Chamaniques, dans l’idée que le chaman soit porté par des ailes ( les ailes de l’oiseau de MIRO) et s’élève au-dessus de la terre par le truchement de l’arbre, ou grimpe au piquet comme en SEBERIE ( ici la Montagne ETNA de MIRO) et soit en mesure de visiter le Paradis , de rapporter en détail ce qu’il voit et ce qui s’y passe .Miro dans son tableau pense comme le chaman que la purification des âmes et des corps est le passage obligé pour le paradis et que le Chaman comme l’oiseau de MIRO nait 2 fois, FYI nous montre qu’il nait une deuxième fois après le passage du feu du volcan
D32‐ LES VIDES ET LES PLEINS
Dans l’importance des vides et des pleins dans FYL, on peut voir également une influence chinoise sur le tableau dans la façon de peindre c’est-à-dire une peinture faites de quelques taches avec un minimum de peinture . FYI est peint sur un fond brut non peint et un premier plan fait de taches claire diffuse ( mélange gouache + essence) sur fond brut sans peinture.Autrement dit , le plein se trouve ancré dans le vide. Dans le 3eme plan du tableau, le vide est provoqué par le brouillard du ciel poussiéreux des fumées du volcan. Dans le 2eme plan se situe le plein du volcan entièrement recouvert de peinture hormis une petite partie grattée en haut à gauche le premier plan étant En fait FYI est un assemblage de peintures et de vide .
Il faut dire que le thème du vide avec la leçon de l’orient a été utilisé d’une façon dont on est en droit de penser qu’elle fait écho à des années de discussion, d’allusions ferventes entre les amis MASSON, LEIRIS,DUTHUIT, BATAILLE
- D33‐FYI et LA RELIGION
MIRO a été élevé dans le christianisme mais il s’est intéressé a beaucoup de religions dont celles qui sont évoquées plus moins explicitement dans ce tableau . Les dieux de la Grèce antique qu’il a découvert avec les présocratiques ainsi que le Bouddhisme, Taoïsme et les religions d’Asie ,qu’il a découvert avec les surréalistes, A cela vient s’ajouter la dimension mystique du tempérament Catalan. Parmi ses poètes et lectures préférés il y avait les mystiques Saint Jean de la Croix, Sainte Thérèse d’Avila, Castillane de San Juan de la Cruz
Fort de toutes ces influences la religion personnelle de MIRO était une fusion du christianisme mystique et ascétique, de panthéisme et animisme , une sorte de syncrétisme paysan et catalan
« Si nous n’aspirons pas écrivit MIRO en 1939 à découvrir l’être religieux, le sens mystique des choses, nous ne ferons qu’ajouter aux sources d’asservissements qui sont largement offerts aux hommes. »
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Cette vue animiste s’allie dans les tableaux tels que « carnaval d’Arlequin » et dans certaines œuvres comme FYI ,il s’abandonne totalement au fantastique et l’imprévisible et c’est dans cette attitude animiste qu’il crée son monde de signes élémentaires mais rempli de sens. Par ce tableau FYI, il met en image l’enseignement religieux de EMPEDOCLE qui fait grande place à la nécessité de la purification , à la transmigration des âmes et conçoit le cycle des existences comme expiation. Pour EMPEDOCLE si jamais une des âmes a suivi la haine et s’est parjuré elle doit errer 3 fois 1000ans loin des demeures des bienheureux , naissant dans le cours du temps sous toutes sortes de formes mortelles et changeant un pénible sentier de vie contre un autre. On peut ainsi l’imager dans le tableau FYI dans un sens un peu différent l’oiseau qui nous est présenté et qui rentre dans le cratère soit son âme n’a pas pu être purifiée à cause de son attitude dans sa vie et il redescend sur terre ou l’attend le serpent soit il est en état d’être purifié et il s’envole vers la félicité
D34‐MIRO DEMIURGE, DIVINITES , RELIGION
Miro reçoit une éducation religieuse mais le christianisme de MIRO était toujours plus enclin au mysticisme qu’à la raison théologique.
ROWELL souligne que la religiosité de MIRO était une fusion du christianisme mystique et ascétique avec un sentimentalisme panthéiste en ce qui concerne la nature
ll est aussi influencé par la dimension mystique du tempérament CATALAN caractérisé par la foi , la conviction, le brillant éclatant , l’austérité des fresques romanes catalanes et aussi les exercices exacerbés de Sainte- Thérèse DAQUILLA et Sant Jean DE LA CROIX.
Les aperçus divins sont sensibles dans FYI par :
-Le panthéisme du volcan , demiurge qui se fait destructeur et créateur de nouveaux êtres
-Le serpent symbole du pêché originel chez les chrétiens
-Les Dieux de la mythologie grecque avec EMPEDOCLE et sa légende qu’il met en image dans le volet 2 de FYI et aussi rapprochement au taoïsmes de Confucius proche de EMPEDOCLE
-Le chamanisme. Comme le Chaman, Miro dans FYI fait comme s’il savait que la purification des âmes amènerait à la félicité et la mort par le feu de L’ETNA permettrait cette deuxième naissance et la purification des âmes
Le but de l’évocation de ces religions dans le tableau vont tous vers le même objectifs sous forme de parabole, la recherche d’un monde meilleur.
Dans FYI ; Si le Volcan est un être vivant demiurge qui détruit et crée, le peintre lui-même joue un double rôle de démiurge et de prophète
MIRO demiurge en tant qu’intermédiaire entre l’humain et le divin ,dans le tableau il crée L’ETNA en demiurge également et par son imagination délirante , il en fait créateur d’une nouvelle humanité purifiée par le feu de son cratère , créateur d’ un Nouvel être qui monte vers la félicité après avoir subi la destruction les souffrance du feu , la mort ,pour renaitre purifié en homme originel à la manière des premiers hommes des cavernes .Lui même le peintre se présente donc aussi comme demiurge, créateur d’un nouveau monde, prophète ou prêtre, chaman , révélateur du monde caché
Il existe une similitude entre la pensée de KLEE et la pensée de MIRO qui a dit à propos du monde inventé par l’artiste : « l’art est le stimuli de la création » , « aujourd’hui , nous révélons la réalité derrière les choses visibles, exprimant ainsi la conviction par le monde visible que le monde visible est simplement un cas isolé par rapport à l’univers et qu’il y a beaucoup d’autres réalités latentes » et puis il précise et remarque l’extraordinaire similitude entre sa pensée et celle de MIRO.Klee fait sortir ce qui ne se voit pas en profondeur comme la racine de l’arbre et le transmet , il n’est donc pas étonnant de voir chez MIRO comme KLEE les influences religieuses dans son œuvre qui inventent continuellement ce monde.
MIRO nous dit que nous devons essayer de découvrir de nouvelles choses dans un tableau à chaque fois que nous le regardons et l’œuvre sera un véhicule privilégié de cette création permanente et cette passion par la dialectique créative, ce qui explique sa passion pour les anciens mythes orientaux la poésie grecque archaïque et la philosophie présocratique C’est exactement ce qui ressort de ce tableau comme mon étude essaye de le montrer
Le thème de la création divine a fasciné MIRO comme aussi bien d’autres générations d’artistes et de poètes modernes et contemporains comme les surréalistes BRETON, SOUPEAULT en transformant le pouvoir créateur de Dieu à l’homme, au génie de son travail littéraire et artistique .
L’univers symbolique de MIRO, le jour, la nuit, la mer, la terre, le ciel, les oiseaux, les serpents ressemble à l’univers biblique de la genèse dans son premier chapitre ,il instaure une cosmologie magique à travers son monde subconscient qui serait lié à la mémoire millénaire qui réside dans l’inconscient collectif selon le penseur et psychologue JUNG.
Les preuves de la croyance de MIRO dans la condition de l’artiste en tant que prophète ou demiurge sont innombrables dans ses déclarations, interview correspondances, notes. Celles des années du tableau FYI de 24 à 41 sont bien connues et étudiées en historiographie.
Encore dans ses derniers documents de 1980, il écrivait son intention d’être un prophète qui annonce un nouveau monde fondé sur une inspiration primitive
L’approfondissement de ce milieu de motifs planétaires façonnés comme de petits univers lui fit dire :
« L’approfondissement du milieu amena dans mon esprit la notion de fantastique, alors je ne subissait plus le rêve , je l’accomplissait en peignant)
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D35‐ FYL : PEINTURE THAUMATURGE
Dans son livre « un feu dans les ruines « Remi LABRUSSE » évoque MIRO sous l’angle de la peinture thaumaturge que je reprends ci-dessous car elle s’adapte parfaitement au tableau FYI volet2 .
« Dans une enquête de George DUTHUIT mené pour les cahiers d’art sur le sujet du lien de la création avec le temps historique ,MIRO avait précisé sa pensée reconnaissant que le monde extérieur, les événements contemporains ne cessent d’influencer le peintre » mais que son engagement du à cette influence ne se portait pas sur le même plan que la réalité historique mais qui visait à s’évader de la réalité présente pour découvrir et faire découvrir l’essence religieuse, le sens magique des choses. Et donc à la peinture cauchemardesque de l’histoire qui environnait MIRO depuis ce 1er tiers du XXéme siècle ,s’est donc mêlé dans l’esprit de MIRO ,la notion de peinture thaumaturge comme celle de la peinture étudiée FYI
On a pu reprocher à MIRO son dualisme préférant le rêve à la réalité et se cantonnant de ce fait dans une sphère de légère irresponsabilité, de terreurs enfantines…. qui ne saura rendre compte de sa position face à l’histoire. Maintes fois il a affirmé son pessimisme dans sa vision de l’histoire et de son regard sombre de la situation des hommes dans le monde. Mais ce pessimisme loin de susciter en réponse une mélancolie rêveuse dans ses peintures, s’ouvre sur des désirs de transformation par la mise en valeur du sens magique des choses . Pour MIRO l’œuvre d’art permet de dissiper la chaos macabre du monde, les récits historiques déprimants pour proposer un monde nouveau avec des hommes nouveaux purifiés .Pour cela ne pouvant intervenir directement dans l’histoire qui se fait avec son lot de désastres, n’ayant pas de prises sur la réalité, il pense que L’intériorité créatrice doit précéder la réalité et la dominer
Ce que nous dit René LABRUSSE ci-dessus est tout à fait applicable dans FYI . Ce que MIRO semble nous dire c’est qu’il veut nous sortir des catastrophes qui ont eu lieu et celles qu’il prévoit comme un prophète et des ruines qui sont encore les conséquences des guerres précédentes. Miro à ces cataclysmes , à ces misères, il s’est assigné la mission miraculeuse de libérer la société de tous ces maux par la purification des âmes, par l’élévation des cœurs , de l’esprit . Changement de l’homme non pas par la révolution, l’évasion mais au nom de l’élévation, il mise sur la transformation des âmes et se donne comme modèle le retour dans l’esprit de l’homme des cavernes de l’art pariétal.
Il préfère le sens magique des choses à la réalité . Dans la réalité c’est un pessimiste, il a une vision noire de la situation de l’homme dans l’histoire. Il dit : « je suis pessimiste, tragiquement pessimiste » ou bien encore « un monde où on ne s’entre-dévorerait plus ça me parait difficile » mais ce pessimisme dans FYI ouvre une transformation pour un être nouveau dans un monde nouveau à l’image de ce qu’il considère l’art pariétal comme le sommet dans la pureté de l’art et que par analogie il transforme en sommet , la pureté de l’âme .Pour cela il reprend la légende miraculeuse de EMPEDOCLE qui transforme et purifie par le feu les âmes des humains et apporte la félicité venue du ciel.
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D36‐SEXUALITE DANS FYI
La sexualité dans les tableaux de MIRO est essentielle pour comprendre les peintures de l’artiste dotées de liberté et de grâce , inspirés par une authentique libération sexuelle sans culpabilité
,sans honte et avec humour. Les formes sexuelles apparaissent en abondance et constamment dans son travail, exposés avec une liberté de création totale. La sexualité est rarement explicite bien qu’elle ne soit jamais confiné, ni frustrée mais émerge comme une suggestion subtile dans un couplage vertueux qui cherche à réconcilier l’érotisme et l’intellect. Miró dit : « le sexe féminin c’est comme les planète ou les étoiles filantes, ça fait partie de mon vocabulaire » et « Pour moi quand je fais un grand sexe de femme, c’est comme une déesse, comme la naissance de l’humanité »ou aussi « Ce que j’appelle femme, ce n’est pas la créature femme, c’est un univers » Pour MIRO , le sexe est résolument sacré, situé par lui sur un plan mythologique impersonnel, c’est une version anthropologique du thème sexuel, ancré dans une pensée du mythe qui rayonne dans l’œuvre de MIRO
Plus que de sexualité il faudrait parler de source de procréation
Selon CIRICI , il explique en 1977 que MIRO présentent l’homme et la femme selon deux schémas, l’un frontal ( féminin) , l’autre latéral ( homme) de signification sexuelle claire, présentant ainsi de la manière la plus expressive et la explicite leurs organes génitaux et d’autres éléments corporels comme les yeux. Pour la femme les caractéristique du schéma frontal peuvent être étendu à ce qui se passe avec les attributs fondamentaux du visage . Les yeux, souvent énormes obtiennent un rôle prépondérant dans le visage féminin dans lesquels , ils concentrent leur expression puissante et sont en réalité les dépositaires d’un pouvoir d’attraction.
Le sexe féminin est modulé de mille façons parfois auréolées de flammes. Il se fait souvent menaçant et hostile surtout à partir de 1934 dans la période sauvage de MIRO. Quand au sexe masculin il apparait toujours avec des testicules et représente pour MIRO quelque chose de sacré.
« Ce n’est pas érotique » dit-il, « c’est comme la graine d’un arbre qui pousse sous la terre, la pluie fait pousser la graine et ça fait un arbre, c’est la naissance d’un arbre, Par cette naissance, c’est le sexe qui arrive chez moi le plus spontanément…. »Le sexe masculin a en général une attache tandis que le sexe féminin semble errer.
Les tableaux de l’année 1934-1935 sont particulièrement des tableaux avec des personnages sexués clairement phalliques ou vaginal à l’exemple de « les amoureux » 1934, « tête d’homme » 1935, personnage 1935 ou en 1936 dans « personnages, montagnes, étoile »une montagne en forme de tête d’un être indéterminé avec un sexe masculin à la place du nez
SOBY dit des peintures sexuées de MIRO de 1934 : « En 1934, il a également commencé avec succès des pastels dont certains, il faut bien le reconnaître sont souvent scatologiques, Miro a souvent utilisé les organes génitaux comme symboles de son art. Encore que son attitude pour le sexe est fondamentalement innocent et loin d’être vicieux. Il procède d’une curiosité et d’une joie enfantine. Il est honteux et franc plutôt que salace »
CIRCI nous dit aussi « Aucun des éléments de contact du corps humain n’a l’importance prépondérante accordée aux yeux et au sexes, très souvent isolés dans l’espace , sans corps qui les soutienne, comme des êtres vivants entièrement autonomes … »
Dans FYI, un sexe féminin est situé entre les deux yeux de l’oiseau( figure51 page 80) à la place du bec, il semble agressif avec un crochet. Les éléments de la tête de l’oiseau comme le sexe féminin ne sont pas fixés, ils errent, et n’ont pas encore trouvé leur place, la phase de purification n’est pas encore terminée comme je l’ai indiqué dans le chapitre sur EMPEDOCLE.
On peut aussi envisager que la tête de l’oiseau soit remplacé par une sexe masculin, on retrouve aussi des êtres bisexuées dans d’autres tableaux comme « le fermier et son épouse » ou seul le personnage de gauche réuni bizarrement en lui les caractères male et femelles. Dans ce cas précis le sexe masculin à la place de l’oiseau serait attaché à l’ETNA comme une sorte de TOTEM
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D37‐ ALTERNANCE DE PESSIMISME ET OPTIMISME
L’essentiel de l’œuvre de MIRO c’est une lutte contre le pathétique de la destinée humaine qu’il veut changer avec ses armes à sa disposition, l’imagination pour créer un monde meilleur et la poésie qui rend heureux . Il veut retrouver le paradis perdu c’est-à-dire un retour à la préhistoire du temps de l’art pariétal qui est pour lui la référence du bonheur sous le signe de l’enfance le seul respirable à ses yeux
Quand on reprend les écrits et les œuvres de MIRO dans son ensemble, on remarque parfois des contradictions ou pessimisme et optimisme s’affrontent et il dit lui-meme, « c’est souvent ce pessimisme qui m’a rendu optimisme » Ce qui le rend pessimiste c’est qu’il est déçu par le modernisme, la technique, la science qui peuvent aussi aliéner l’homme .Déjà en 1934 , il avait connu la guerre de 14 et était très inquiet pour l’Espagne avec les grandes grèves sanglantes et la guerre civile qui s’annonçait
Comme il s’est rendu compte que le monde extérieur ne l’inspirait pas et que par nature il était pessimiste, il disait : « quand je travaille , je peux m’évader de ce pessimisme » il s’est trouvé une nouvelle source de création dans la recherche de mondes parallèles et ainsi retrouver un peu d’optimisme mais malgré tout, le pessimisme est toujours là sournois et comme il dit « je suis d’un naturel tragique et taciturne… Dans ma jeunesse , j’ai connu des périodes de profondes tristesse, maintenant je suis assez équilibré mais tout me dégoute, la vie me parait absurde, ce n’est pas le raisonnement qui me le montre, je suis comme ça !, je suis pessimiste, je crois que tout va toujours aller très mal » Il a très bien exprimé sa fragilité de sa situation dans son autoportrait de 1937 , dessin qui constitue de véritables confessions métaphysique de ses états d’âme
LEIRIS voit malgré tout des lueurs d’optimisme chez MIRO il disait « Il y a une joie et un avenir lumineux chez MIRO, c’est ça , oui ! un optimisme que je veux communiquer ! Si MIRO parlait de son pessimisme il parlait aussi des aspects positifs « Sous mon apparence tranquille , je suis tourmenté, le surréalisme m’a ouvert un univers qui justifiait à apaiser mon tourment, il ma permis de dépasser de loin la recherche plastique, il m’a mené au cœur de la poésie, joie de découvrir ce que je fais après l’avoir fait…. »
. Contradiction aussi du fait qu’il se nourrit d’influences idéologiques diverses que ce soit religieuses avec le catholicisme, les religions d’Orient, les Dieux de la Grèce antique que ce soit les philosophes avec les présocratiques, les Boudhistes, la philosophie japonaise et des personnalités aussi différentes qui l’ont influencé que sont TZARA, BRETON, LERIRIS, René CHAR, BATAILLE, ARTHAUD.
Ces contradictions se trouvent dans le tableau FYL volet 2 avec cette dichotomie entre le ciel et la terre souvent présents dans les tableaux de MIRO. En bas la terre du serpent symbole des terreurs souterraines , des malheurs et en haut , l’oiseau en cours de purification pour la liberté, la félicité mais même là , l’optimisme n’est pas à son comble, le mur qui monte dans l’image et disparait est aussi là pour nous dire que l’oiseau en cours de purification n’est peut être pas encore sauvé et que ce mur comme l’échelle de jacob peut encore faire redescendre l’être vers le serpent qui l’attend en bas pour se retrouver prisonnier de cette terre dont il voulait s’échapper.
La trajectoire de MIRO est une réinvention constante comme si elle s’inscrivait dans un mouvement perpétuellement inachevé
Malgré l’optimisme de la finalité du tableau , le pessimisme est toujours latent. Dans une interview il disait « je suis un pessimiste, je pense que tout va toujours aller très mal. »
Ce tableau FYI peut être considéré comme une utopie, Il veut nous faire réfléchir sur la destinée humaine, il veut nous montrer que les chemins hasardeux pris par les hommes nous ont conduit à une impasse et qu’il nous faut revenir à l’esprit de l’homme originel pour reprendre un nouveau chemin
Dans d’autres tableaux de la période sauvage après octobre 1934 le pessimisme est de plus en plus prononcé du fait de l’environnement politique de l’Espagne et mondial qui se dégradent ,ainsi comme le dit CIRCI « toutes les prolongations organiques dans les tableaux se voient comme désespérés , dirigées inutilement vers le haut . Elles sont continuées par des trajectoires de la pensée , qui sortent des têtes ; par les flammes des pipes, les cris dessinés à partir des bouches, les rayons des regards, les liquides qui jaillissent des corps, du lait, du sperme, des pets, de l’urine, des excréments ..et parfois , directement de grandes flammes. En contrepartie de la volonté ou de l’acte de donner, qu’expriment les anthropoïdes , il n’y a aucun paiement,. L’opération est d’avance un échec.
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D38 FYI , LA MEDITERRANNEE , LA CATALOGNE
Pour MIRO la méditerranée est la représentation de son environnement naturel et culturel dans lequel il déverse sa vision du monde, sa conception personnelle du monde.
FYI fait ressortir dans le volet 1, l’origine de l’humanité méditerranéenne (grotte Altamira en Espagne ) et dans le volet 2 l’origine de l’art méditerranéen ( avec EMPEDOCLE et les présocratique)
Son amour de la Catalogne , de la vie paysanne de MONTROIG est symbolisé par le paysan catalan en bas à droite du tableau portant le béret Catalan « la barretina » (figure 38-39 PAGE 61)
Certains archétypes visuels méditerranéens ou Catalan l’ont fortement incité à pénétrer dans son subconscient et lors d élaborations successives réapparaitront de manière manifeste ou latente Dans le tableau FYI ce sont : la paysan catalan avec sa Barretina , le bovin, la montagne, le ciel, la terre
Miro reprend souvent l’idée Catalane des personnages ( voir ) dont la force jaillit et grandit par les pieds, née de la terre , transition entre de tellurique et le cosmique, d’où personnages avec des pieds très larges ou des corps en forme d’entonnoir renversé pour concentrer la force énergétique vers le haut, vers le ciel
Dans le volet 2 le volcan considéré comme être vivant canalise sa force énergétique du feu intérieur pour créer de nouveaux être dans l’optique d’une purification et les envoyer vers le ciel symbole de félicité
Il est probable à la vue du paysan catalan que la montagne fait penser à MONTROIG pour ensuite universaliser en se tournant vers l’ETNA et EMPEDOCLE pour la purification de l’humanité
La couleur bleu du mur ( figure 1 page 2) est aussi un signe au bleu de la catalogne recouvrant les murs de la porte d’entrée des maisons mais aussi au bleu utilisé par les poètes comme MALLARME. Dans une lettre au peintre majorquin FERRA, MIRO communiqua son identification viscérale avec le paysage catalan en terme d’échange poétique entre l’homme et la nature
D39‐ SOURCES D’INSPIRATION IMAGINATION
l n’y a pas de sources d’inspiration aseptisées d’objets dans les œuvres de MIRO. Il reflète l’esprit de son temps qu’il rejette valorisé par sa vision personnelle.
Il crée des œuvres uniques à travers des gestes répètes en apparence mais en essence unique en sorte que chaque travail est le résultat à un moment donné de l’évolution personnelle et artistique de son créateur
Il est guidé par la passion, la foi ,il dit « je change souvent de peintures à la recherche d’expressions » il va toujours vers l’inconnu , il ne fait jamais de copies de ce qui a déjà été fait. L’inspiration surprend souvent MIRO car même lui souvent ne sait pas ou il va . Démarrer une peinture est toujours une aventure pour MIRO car il ne sait pas ou cela le mènera. Il ne peint jamais un tableau que son imagination avait déjà pleinement exploré , pour lui ça n’aurait pas de sens car sa puissance d’imagination semble illimitée surtout quand il s’agit de trouver des signes , il ne peint jamais deux fois les mêmes signes de son vocabulaire basique dont la structure est identique car ils sont toujours agencées différemment.
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Il travaille en prenant compte des «éléments de la réalité » mais « il nous montre ce que nous nous ne sommes pas en mesure de voir,ce que nous n’entendons pas,ce que nous ne ressentons plus, il découvre, il observe ,il relate sans jamais s’écarter d’une analyse profonde et rigoureuse. A la manière d’un ethnologue ou d’un astronome il relève les réalités invisibles du monde , toujours à l’écoute de l’univers ».Malgré sa méfiance envers le système MIRO puise régulièrement son inspiration dans des réserves familières, les événements fortuits les ressources illimitées de la nature en font partie mais il garde aussi auprès de lui un stock d’objets riches de sens ainsi que des images découpées dans des magazines.
Dans FYI Il se peut que le volet 1‐ bestiaire, lui ait été inspiré par ses lectures sur la préhistoire et sur des reproductions de la grotte rupestre d’ALTAMIRA tandis que le volet 2‐Etna, par des reproductions de la montagne ETNA dont un des versants montre à la base une coulée de lave transformée en rochers qui ressemble à un serpent , au pied du cratère se trouve un mur le mur du philosophe EMPEDOCLE ( FIGURE )
A partir de ces cadres de base son imagination foisonnante a fait le reste car l’imagination est essentielle chez MIRO . Il est à la fois maître des puissances de l’imaginaire et glorifie l’image en tant que magistrale caisse de résonnance de la pluralité des mondes .Être imaginatif ,c’est être capable de voir ce qui n’existe pas mais est possible contrairement à la fantaisie qui est la faculté de voir ce qui ne se voit pas et qui n’est pas possible.
« La revendication de l’imaginaire chez MIRO comme système de travail le situe loin des classicismes sans envergure, des normes stéréotypées mais aussi de la fantaisie irresponsable qui a tant enthousiasmé » les surréalistes »
D’abord il faut savoir que miro travaille en prenant des éléments de la réalité ( figure , terre, ciel) pour spéculer jusqu’à obtenir pour résultat un autre monde. L’apparente confusion qui nous ressentions entre les êtres et les choses des tableaux de MIRO n’existe pas pour MIRO car pour lui les choses sont des êtres vivants au même titre que les choses, Pour MIRO un arbre est un être vivant. Ce rapport d’équité entre les êtres vivants et les choses font que ce même rapport existe dans la taille des choses et ne se rapporte pas à ce que nous voyons ainsi il agrandit et rappetisse les choses et les êtres pour que notre imagination reste toujours en éveil.
Dans FYL , le volcan ETNA est un être vivant qui malgré son immobilité extérieure vit intérieurement , la lave remonte la montagne jusqu’au cratère comme le sang dans les veines d’un être vivant , il chante ou crie comme les hommes. Dans le tableau FYI il est même un demiurge qui donne la vie. En ce qui concerne les éléments du tableau, il n’y a ni perspectives ni rapport de taille conforme à la réalité entre le bovin ou la montagne par rapport au mur à l’oiseau, au serpent ou au personnage
Comme indiqué ci‐dessus Miro a souvent l’habitude de commencer un tableau par une perception actuelle de la réalité qui le met dans un état d’extase non pas physique mais un état dans lequel la réalité donnée est complétement transfiguré par la réponse qui vient de l’esprit. Le monde ordinaire disparait pour être remplacé par un monde imaginaire composé presque exclusivement de fantasmes ,d’apparitions ,de rêves, de prophéties ,de révélations .
Au départ d’une œuvre, le hasard le lance sur la réalité et s’établi une relation ambivalente du monde de réalité et de transposition de la réalité par représentation à de fantaisie et au rêve reflétant un monde imaginaire qui disparait pour laisser place à l’imaginaire mais un imaginaire chez MIRO avec une discipline stricte dont la planification n’est pas toujours absente
Dans FYI , l’imaginaire se trouve essentiellement dans le 2eme volet , MIRO donne libre cours à son imagination avec l’oiseau qui est femme, homme, Miro , l’humanité elle‐même et dont il est difficile de savoir ou commence l’oiseau et ou finit la femme, l’homme , l’humanité . L’imaginaire se trouve dans les entrailles du volcan qui détruit les êtres pour en créer de nouveaux avec une âme purifiée. L’imaginaire se trouve dans les ténèbres de la terre représentés par le serpent prêt à dévorer le paysan catalan tétanisé à la vue de l’animal. L’imaginaire c’est aussi le mur qui monte jusqu’au ciel est fait la liaison entre la terre et le ciel
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D40‐ ALTERNANCE, ALLEGORIES chez MIRO et dans FYI,
L’alternative est toujours présent chez MIRO . Il alterne le positif et le négatif tout au long de sa vie de peintre. Il a en lui un fond pessimiste , il dit lui‐même « je pense que tout va toujours aller très mal » .Cela ne l’empêche pas d’employer très souvent l’humour, il y a toujours un fond d’humour dans ses œuvres et aussi une lueur d’espoir d’un monde meilleur et malgré tout il a foi en l’homme, dans sa force de se transcender.
Dans FYI on remarque aussi cette alternance de négatif et de positif.
En bas du tableau au niveau de la terre c’est le négatif, l’homme ( paysan catalan) prisonnier du serpent, En haut du tableau, c’est le positif, c’est l’oiseau qui se transforme en un être purifié et qui s’apprête à s’envoler vers le ciel, vers la félicité mais cette lueur d’espoir n’exclue pas que rien n’est gagné , l’oiseau peut aussi retourner vers la terre, vers le malheur, par le mur ( l’échelle de jacob), le serpent l’attend alors au pied du mur
MIRO utilise souvent des allégories dans ses tableaux ainsi dans FYI , la terre est représenté par le serpent et le paysan catalan, L’oiseau représente les symboles du ciel et de la liberté , la montagne ETNA, le demiurge qui détruit les êtres par le feu pour créer un nouvel être purifié , retour à l’être originel, Le Bovin symbole de la douceur et de l’être originel des cavernes rupestres
D41 ‐L’ŒIL ET LE DOIGT
L’œil est une chose très objective qui à la fois voit la toile et fixe le spectateur
Qu’il soit isolé comme un simple organe ou l’œil d’un personnage bien défini , l’œil de MIRO est parfaitement reconnaissable , délimité par une forme ronde immense ou en amande comme « Tête humaine » de 1931 avec 1 œil rond et un œil en amande comme FYI« figure » .
Les yeux de l’oiseau dans FYI ( figure87 page 146) peuvent être comparés aux yeux dans le tableau« ETOILE MATINALE » de 1940 pour leurs dispositions dans la tête
Dans « Etoile matinale »( figure 88 page 147) l’œil en haut à gauche a une forme d’amande avec la pupille noire comme l’œil à gauche de l’oiseau de FYI.
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ETOILE MATINALE
FIGURE 88
DANS FYI et ETOILE MATINALE, L'oeil gauche regarde l'oeil droit
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A la droite se situe un œil rond dans les deux tableaux mais ce qui est intéressant dans les deux tableaux c’est que si on change la perspective des deux yeux de gauche des deux tableaux en position latérales on a l’impression que les yeux de gauche regardent les yeux de droite et dans cette façon de voir les yeux dans FYI , la fascination est dans l’œil de droite qui accapare tous les regards celui du spectateur mais aussi celui de l’oiseau par son œil gauche, L’œil droit étant l’œil du créateur, l’œil de MIRO qui repose dans la lettre calligraphiée M , le M de MIRO
l’œil de l’oiseau du tableau est donc par métaphore l’œil du peintre dans lequel il s’identifie le plus ( dans le tableau FYI il se place dans le M de Miro) ,c’est le signe de leur quête commune, élever l’homme vers les hauteurs menant aux étoiles loin des bassesses de la vie terrestre contemporaine dont le signe dans le bas du tableau est le serpent
Toujours dans les comparaisons on peut aussi comparer l’œil à gauche de l’ « autoportrait »de 1937 avec l’œil à droite du bovin du volet 1 ,qui dans le volet 2 ‐ETNA au même emplacement montrent une éruption d’étincelles en forme d’étoile comme un geyser de feu . Dans« autoportrait » de 1937 et FYI ETNA volet 2 ces étoiles d’étincelles représentent le feu intérieur , c’est‐à‐ dire de ce qui se passe à l’intérieur du portrait et du volcan , que nous ne voyons pas ( figure 89 page 149)
Œil de l’autoportrait de 1937 FYI Etincelles en formes d’étoiles
FIGURES 89
Dans la mythologie grecque , les grands yeux ronds pénétrants ont leur personnification dans les divinités ( La méduse de GORGONE) , Ces yeux troublants et inquiétants on les retrouve dans les yeux de l’oiseau de FYI, notamment celui de droite
Chez BOSCH dont MIRO avait des cartes postales et dont il avait peut‐être vu les panneaux du « jardin des délices » au musée de MADRID, l’œil est aussi présent, défragmenté de la tête et désincarné, dans« l’enfer du jardin des délices « à coté de 2 grandes oreilles .
Autre métaphore complémentaire de l’œil de MIRO dans le tableau FYI, c’est ce qui se voit extérieurement. Dans le volet 1 de FYI ce qui se voit c’est la représentation de la caverne rupestre ALTAMIRA avec le bovin , dessiné sur le plafond de la grotte. Mais l’œil ne devient plus suffisant pour passer du volet 1 au volet 2 qui échappe brusquement à la réalité visuelle. On passe du monde extérieur au monde intérieur imaginé par MIRO Les yeux ne sont plus si utiles, et c’est le doigt de MIRO qui est représenté dans le tableau autre métaphore, signe pour représenter l’imagination ce qui ne se voit pas mais ce que veut nous faire ressentir MIRO dans l’imaginaire., le tactile s’ajoute à la vue. A l’œil répond la main ( le doigt dans le tableau),La pulsion tactile et la pulsion scopique s’entrechoquent entre volet 1 et volet 2
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Miro raconte une anecdote à ce sujet, en expliquant l’immense impact tout au long de sa vie qu’à eu les exercices imposés par son maître Fracesq GALI entre 1912 et 1915 ou il s’agissait de dessiner les yeux fermés après avoir palpé le modèle concerné : brusquement l’acte de tracer s’est trouvé détaché de l’acte de voir, l’intériorité du geste a pris le relai de la vision .Miro en a déduit que la vie se révèle en soi dans la nuit, c’est à dire dans une défection du regard
Au sujet de l’œil ,MIRO disait « L’œil m’a toujours fasciné, dans un de mes tableaux qui s’intitule,« terre labourée », se dresse un arbre qui possède un œil, l’œil qui voit tout ». Ses personnages ont des yeux partout , un œil sur la figure, un œil sur la jambe, un œil sur le dos, parfois le tableau est truffé d’ yeux comme « soleil rouge ronge l’araignée de 1948 »
L’œil , la main ou le doigt présent dans FYI sont des signes du répertoire MIRONIEN qu’il utilisera très souvent dans ses tableaux pour faire passer ses idées . Toute la complexité est d’interpréter les signes MIRONIENS car déjà rien que dans ce petit tableau FYI nous avons vu que l’œil et le doigt ont de multiples applications et interprétations qui se valent toutes . –
D42 ‐ASSOCIER L’INASSOCIABLE
BRETON disait que « associer l’inassociable , nul n’en fut aussi proche que MIRO. »
Dans FYL les éléments d’insociabilité sont très nombreux. D’abord ce qui semble inassociable au premier chef c’est superposer deux tableaux aux extrémités de l’humanité, le volet 1‐bestiaire pour la préhistoire, le volet 2‐ Etna pour l’époque grecque moderne et contemporaine.
Le même élément, le même signe peut avoir plusieurs fonctions, ainsi le bovin, c’est aussi la montagne ETNA ,l’œil du bovin à droite est aussi une fumerole étincelante du volcan le mur de l’entrée de la caverne rupestre est aussi le mur de le tour du philosophe, l’oiseau hybride avec un sexe féminin à l’endroit du bec devient un sexe masculin, le serpent et le mur sont liés l’un a l’autre par une greffe et dans tout cela il y a superposition et non juxtaposition
En ce qui concerne le signe calligraphique à gauche du tableau FYI, il est à le fois un signe phénicien qui veut dire taureau, c’est aussi un signe grec ancien, une calligraphie, idéogramme chinoise et la juxtaposition de 3 traits du vocabulaire de base de MIRO.( figure41 page 65 )
Pour hétérogènes qu’ils soient des lignes dans leur plus simple expression à l’intérieur de L’ETNA les unes concaves, les autres convexes dans la plus grande simplicité vont se réunir pour donner la vie, accouchant d’êtres purifiés
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D43 ‐PERSPECTIVES ‐MICROCOSME ,MACROCOSME
Une chose semble établie, MIRO n’utilise pas la perspective classique de la renaissance apprise dans les écoles d’art, il n’en tient plus aucun compte depuis son tableau « Terre labourée » le choix des plans ne se fera pas selon la perspective mais selon un choix affectif. Ses tableaux sont alors sans rapport avec la perspective de la réalité.
Le spectateur n’est pas astreint à considérer le tableau sous l’angle visuel déterminé par sa construction. Ce tableau FYI a un degré d’expression qui n’est pas lié avec laquelle la physionomie du monde se trouve reproduite. Le peintre s’affranchie de l’espace que ce soit dans le volet 1 – Bestiaire ou volet 2‐ Etna. La tête du Bovin, la montagne, l’oiseau, le serpent, la tête du personnage sont tous disproportionnés les uns par rapport aux autres et ne montrent aucunes perspectives. Le peintre s’est délivré des réductions de la profondeur et ainsi le dérèglement des proportions renforce la puissance suggestive des choses à l’inverse de ce qui se passe dans la réalité.
D’autre part MIRO ne veut pas établir de hiérarchies entre les êtres et les choses, entre la taille des choses qui l’entourent à l’encontre de la vision commune et de toute la tradition occidentale, De ce point de vue il se rapproche de la conception de la philosophie japonaise qui donne autant d’importance à un paysage qu’à un brin d’herbe et il disait à ce sujet : « A part les primitifs et les japonais presque tout le monde néglige ces choses divines »
L’homme pour MIRO « aux yeux de la création ne peut se prévaloir de sa supériorité sur l’arbre. La mer ne pèse pas plus que la goutte de rosée, la montagne n’est pas plus haute que le brin d’herbe, la parole du sage ne couvre pas le cri de l‘oiseau….Dans la nature toutes les créatures sont équivalentes, donc toutes sont infiniment précieuses mais aucune n’est irremplaçable. »
Comme l’exprime René LABRUSSE « Miro selon ses principes ci-dessus , refuse donc d’établir même une demi -mesure médiatrice entre la vision myope et l’extase cosmique sous forme d’un paysage classique. Son amour pour les réalités les plus générales ,les moins cantonnées dans une forme : la mer, le soleil ,le ciel, la terre ne se distinguent pas des choses minuscules à leurs échelles. Miro dit sa - joie d’arriver à comprendre dans un paysage un petit grain d’herbe….. aussi gracieux qu’un arbre ou une montagne…. De se soucier des cailloux d’un ravin. En 1928 Miro dit « cela n’a pas de sens de donner plus d’importance à une montagne qu’à une fourmi » en 1937 « chaque grain de poussière a une âme merveilleuse » »
Ces quelques phrases tirées d’écrits de MIRO et de René LABRUSSE peuvent donc s’appliquer au tableau FYI qui ne présente ni perspective ni rapport dans la réalité visuelle des choses.
Dans ce tableau tous les repères disparaissent du plus grand au plus petit , le temporalité disparait dans l’immédiateté , la préhistoire, la civilisation grecque antique , chinoises ancienne, notre époque moderne, contemporaine , tout cela sous le même plan en dehors de l’évolutionnisme.Également Sur le même plan ,les choses , les êtres qui sont tous animés d’une vie en mouvement et qui ont une âme et dont la taille ne reflète pas leur aspect visuel classique mais l’importance que leur donne MIRO.
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‐D44 ‐LE POINT ROUGE
Dans ce tableau , il y a un point de peinture rouge à l’huile pure positionné comme une goutte au milieu du mur pas plus grand qu’une pointe d’épingle ( figure 91 page 151)qui malheureusement s’est détachée du tableau en le manipulant ( ce point rouge existe sur la reproduction jointe) . Ce point ou cercle rouge se trouve dans de très nombreux tableaux à l’exemple de « composition » de 1927, « sourire de ma blonde», peinture sur fond blanc » 1927, le cheval de cirque 1927 etc
FIGURE 91
‐ Le cercle rouge
‐ La lune
‐ L’étoile »
Dans le tableau on trouve ces 3 formes dont 1 cachée qui sont ;
Le cercle rouge sous forme de point rouge, l’étoile sous forme d’étincelles étoilées et la lune qui est cachée par le ciel poussiéreux de l’aube
D45 ‐INTEMPORALITE
Le temps n’a pas d’emprise sur MIRO. Le temps n’existe pas , il travaille simultanément et sur de longues périodes à plusieurs œuvres Dans un carnet Catalan de 1940‐1941 il écrit : Ne pas s’occuper de quand seront réalisées ces œuvres, faire abstraction des années et du temps, qu’elles travaillent dans mon esprit
»Le temps n’existe pas dans le tableau FYI, il allie dans le volet 1‐bestiaire , te temps préhistorique qu’il superpose dans le volet 2‐ Etna avec le temps des philosophes présocratiques et notre temps moderne et contemporain et même le futur , il dit : « Ce qui compte , ce n’est pas l’œuvre comme objet, c’est l’empreinte qu’elle laisse et qu’elle sème » , il navigue de l’un à l’autre dans l’intemporalité ‐
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D46‐MYTHOLOGIE
Remi LABRUSSE relève dans son livre « le feu dans les ruines » les figures mythologiques dans l’œuvre de MIRO .Miro a voulu les créer pour lui‐même et pour sa génération . Il notait sa volonté de créer des êtres nouveaux et de leur donner vie et de créer un monde pour eux… Après‐guerre,il a aussi multiplié les sculptures totémiques.
L’idéalisme moderne servit de révélateur à cet appétit qui pris la forme d’un désir d’évasion contradictoire avec la réalité . A cette époque de MIRO chez ses amis se faisait sentir un besoin de création de mythes pour échapper à cette réalité de XXéme siècle de guerre , de changement technologique de misère humaine, ainsi s’effectua un afflux massif de mythes autour des images que MIRO offrait à cette époque
En somme il a laissé la grande rêverie mythologique de ses amis donner forme aux nœuds de ses propres expériences fascinées face à la puissance de l’être…..,figures fondées sur la métamorphisme animal ou végétal et suscitant chez le spectateur , par l’impérieuse fixité de leur regard et par l’étrangeté de leurs formes biomorphiques , à la fois fascination et la peur… Ce qui affleure dans les images de MIRO ne procède pas d’un programme conceptuel, pas plus que la marque primitive n’a suscité chez lui le réflexe d’imitation formelle , la science mythologique et les spéculations totémiques qui l’accompagnent n’ont été posément illustrées dans ses formes….Il a affirmé sa volonté de dépasser la sphère individuelle du rêve
, de passer de l’expression d’obsession s personnelles à celle d’une position mythologique partageable quoi que toujours indéterminée.
De ces années 30 riches en manifestations centrées sur le monde primitif, mais aussi par la montée de MIRO aux cours des années précédentes sur des paysages et portraits imaginaires… des figures fantasmagoriques s’y dressent fascinées l’œil fixe et rond sur un horizon réduit à la confrontation de grandes forces élémentaires, terre, mer et parfois un volcan….Ces formes donnent corps à un regard mythologique »
Ces phrases de Rémi LABRUSSE sur les figures mythologiques de MIRO ,sans rentrer dans tout le détail écrit par l’écrivain sur le sujet correspond parfaitement au tableau FYI notamment dans le volet 2 de l’ETNA
Dans FYI , le peintre a fait sienne une mythologie , il a joint deux mythologies du monde antique pour en créer une nouvelle adaptée à son monde et au monde contemporain d’aujourd’hui dont lui seul est le créateur mais dont l’inspirateur est le philosophe grec présocratique EMPEDOCLE
D’une part , le mythologie du volcan ETNA , évoquant une symbolique de la puissance de forces naturelles soumise à la volonté des Dieux et la douleur, la terreur dues aux manifestations de sa nature violente.
L’ETNA dans la mythologie Grecque ou Romaine a des liens directs avec les Dieux ZEUS ou JUPITER les maîtres du monde et avec le Dieu du feu HEPHAISTO ( Vulcain chez les romains) et aux cyclopes. L’ETNA dans l’antiquité à inspiré la terreur mais aussi a apporté la richesse par la fertilité de ses terres. D’autre part le feu du volcan suggère dans l’imagination collective le désir de changer brusquement de temps , de porter toute la vie à son terme et à son au‐delà et amplifie le destin humain .En effet certains êtres fascinés par le volcan entendent l’appel du bucher et pour eux la destruction par le feu est plus qu’un changement,, c’est un renouvellement, c’est ce qu’on appelle le complexe d’EMPEDOCLE
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‐D’autre part MIRO s’était intéressé à la philosophie présocratique de EMPEDOCLE et HERACLITE. Il connaissait la légende d’EMPEDOCLE ( voir paragraphe sur EMPEDOCLE) , son immolation par le feu dans le cratère de L’ETNA pour sa destruction par le feu afin de faire renaître l’âme purifié en accord avec sa philosophie
Dans FYI Miro en a fait sa mythologie personnelle, mythe d’un nouveau monde pour sauver l’humanité et retrouver la purification des âmes et des corps de l’homme originel après sa destruction car pour MIRO il ne peut y avoir que des mesures radicales pour sauver l’humanité , c’est son retour à l’esprit des hommes des cavernes rupestres afin de suivre un autre chemin que l’évolutionnisme dans le matérialisme qui a abouti à notre époque . MIRO veut donc nous faire passer son message par cette allégorie , parabole , illustrées de la philosophie de EMPEDOCLE pour purifier nos âmes, nos esprits et nos corps par le feu, ce qui veut dire que MIRO ne croit plus à l’évolutionnisme de l’homme qui court à sa perte et donc pour lui, l’avenir de l’homme c’est de se retrouver dans l’homme originel
Comme la plupart des figures mythologiques qui apparaissent dans ses tableaux font de MIRO un créateur de mythes .
MIRO se sert de la mythologie de EMPEDOCLE et sa légende pour créer sa propre mythologie dans FYI . on retrouve aussi dans d’autres mythologie la destruction et reconstruction d’homme nouveau comme celle de la légende mythologique de OSIRIS qui après sa mort et grâce à l’amour de sa femme ISIS , celle‐ci rassemble les morceaux de son cadavre dépecé, les rassemble pour reformer un corps entier et lui redonner vie en l’asseyant avec précaution sur elle ainsi comme le tableau FYI il y a destruction pour reconstruire un homme nouveau
La mythologie est bien présente dans les œuvres de MIRO .
L’écrivain CIRICI a exploré le mythe méditerranéen lié à une prédominance d’une vision de la nature et d’une tradition culturelle spécifique avec une racine grecque et MIRO a maintenu ses fondements mythiques de la méditerranée qu’il incarnera tout au long de sa vie.
C’est bien le cas dans FYI où nous trouvons un paysage volcanique méditerranéen, L’ETNA qui sert de théâtre à la légende mythique d’EMPEDOCLE, personnage présocratique grec qui a choisi une première mort par le feu du volcan pour renaître l’âme purifié.
Néanmoins la définition intellectuelle du mythologique chez MIRO est toujours resté vague jusqu’à la fin de sa vie lorsqu’il déclarait « l’œil c’est pour moi de la mythologie » car il est vu comme un lieu commun du vocabulaire magique et religieux. L’œil des figures mythologique dans les images de MIRO est rond et cosmique Dans un entretien il disait :
« Qu’est ce que j’entends par mythologie ? »« Par mythologie, j’entends quelque chose qui est doté d’un caractère sacré comme une civilisation antique. Même un arbre est mythologique…? Un arbre ce n’est pas un objet végétal, c’est quelque chose d’humain, un bel arbre qui respire et qui t’entend qui est amoureux de ses bourgeons… de ses fleurs…. Qui lutte contre le vent et qui t’aime, Cette sorte de présence humaine dans les choses , c’est ça pour moi la mythologie. C’est ce qui fait qu’un caillou, un rocher, je ne le considère pas comme des choses mortes. »
Et donc dans FYI le volcan peut être d’autant plus considéré comme mythologique car il est en mouvement, MIRO le considère comme un demiurge il crée du feu, il parle, il crie ( le bruit d’un volcan en éruption), il est en colère et exprime la terreur ( quand il est en éruption) ou bienveillant quand il apporte la fertilité , comme un être vivant
FYI est aussi pour MIRO , sa création du mythe de l’éternel retour selon lequel la terre a vécu des cycles successifs de destruction et de recréation liée à une modification des orbites planétaires et donc MIRO se veut le chantre de ce phénomène de l’éternel retour en utilisant l’allégorie de la légende d’EMPEDOCLE pour un retour à l’époque paléolithique des cavernes rupestres.
Si dans FYI le volet 2‐Etna, nous avons vu que MIRO est un faiseur de MYTHE en revanche dans le volet 1‐Bestiaire, MIRO est un faiseur de fables car de cette civilisation préhistorique , l’écriture n’existant pas en dehors de dessins et des objets trouvé,, aucun MYTHE n’a pu nous être transmis et n’a pu être formulé hormis des fables, ou l’imagination des peintres a permis de créer des images de la préhistoire dans l’optique de ce qu’ils voulaient montrer ou faire passer au spectateur loin de la réalité vécue
. En ce qui concerne MIRO et FYI , Il a voulu nous faire passer dans son tableau le message de l’homme idéal, originel comme un enfant qui vient de naître , non pollué par des siècles de guerre, de catastrophe de terreur de matérialisme etc , c’est‐à‐dire tout ce que la terre a subi de négatif depuis l’origine des temps. Pour créer sa fable sur la préhistoire il a occulté tout ce qui pouvait se passer en dehors de l’art pariétal de la grotte qui représente pour lui quelque chose comme le tableau de la joie de Vivre de MATISSE
D47 ‐SUGGESTIONS et MOUVEMENT dans FYI
Les tableaux de MIRO ont la particularité de suggérer plutôt que de signifier . Ce qui intéresse MIRO dans la compréhension de ses tableaux ce ne sont pas de faciles reconnaissances et identifications.
Pierre LOEB son marchand lui demande un jour pour la compréhension d’un tableau de son peintre
‐ C’est un cheval n’est ce pas ?
Miro‐ oui‐oui
PL ‐ mais non c’est un oiseau
Miro‐ oui oui
Pour MIRO ; un tableau doit féconder l’imagination, il doit être fécond , il doit faire naître un monde , qu’on y voit un cheval, un oiseau peu importe pourvu qu’il révélé un monde quelque chose de vivant. Pour le peintre toutes les interprétations sont bonnes à prendre et complémentaires les unes des autres,elles ne sont pas contradictoires , elles peuvent être fonction d’une époque, d’une pensée en vigueur, d’une idéologie…., chacun peut y trouver sa réponse, Pour MIRO le principal c’est qu’il laisse des germes
Il fait parfois lui‐même des découvertes en peignant. Quand il part d’un point, d’une touche, il ne sait pas ce qu’il y aura en finalité
Ce qui compte ce sont les inventions plastiques propre à MIRO et toutes les significations faites par le regardeur sont bonnes que ce soit abstrait, figuratif ou des combinaisons figuratives imprévues.
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Dans FYI‐ volet 1‐bestiaire ,on peut donc associer la masse centrale à un bovin préhistorique, dans le volet 2, on peut associer la tête de l’oiseau à une femme, à MIRO ou à un être humain en général et même à un sexe masculin , le bec de l’oiseau à un sexe féminin,la masse centrale au volcan ETNA , le personnage à un paysan catalan et le serpent à un monstre qui vient des entrailles de la terre
Dans ses tableaux , même l’immobilité suggère le mouvement. I dit dans un entretien à Yvon TAILLANDIER à ce sujet « le spectateur serait comme un acteur lisant un poème qui lui paraitrait un non sens absolu s’il ne sentait pas ces mouvements dans mes tableaux,. Mais il pourrait ne pas le sentir car , pour lui, dans mes tableaux, comme , pour moi, le galet n’est que suggéré ( il dit en ce qui concerne la galet qu’il est un objet fini et immobile qui suggère non seulement des mouvements mais des mouvements sans fins). Ce que je cherche c’est un mouvement immobile. … Les formes sont à la fois immobiles et mobiles dans mes travaux. Elles sont immobiles parce que la toile est un support immobile, elles sont immobiles à cause de la netteté de leurs contours et de cette sorte d’encadrement ou elles sont situées parfois, Mais c’est précisément par ce qu’elles sont immobiles qu’elles suggèrent le mouvement. »
Dans FYI tout est suggéré. Ce que j’y ai vu et ressenti après de très longues observations comme je l’ai indiqué c’est deux tableaux , le volet 1 suggérant l’art pariétal avec un retour à l’enfance de l’art et 1 deuxième volet qui met en image la légende d’EMPEDOCLE que MIRO retranscrit à sa façon sous forme de parabole, d’allégorie. Ces deux volets étant superposés pour faire FYI.
Mais connaissant l’œuvre de MIRO on pourrait y voir aussi tout autre chose comme une femme derrière un mur , le corps étant en forme de cône renversé , sans pieds et avec une tête d’oiseau ( la femme et l’oiseau étant souvent associés) ou aussi un totem avec une tête d’animal derrière un mur qui fait penser à une sculpture située à SAINT PAUL DE VENCE qui s’appelle « la fourche » de 1963 » ( FIGURE32 page 56 )
D48‐VALEURS ET MOTIVATION DE L’ART DE MIRO A TRAVERS FYI
A la lumière de FYI et selon CIRICI, Les œuvres de MIRO sont loin des tendances de certains peintres qui cherchent à faire du beau, du décoratif, à faire toujours la même chose comme leurs marchands et collectionneurs leur demandent..
Même s’il l’obtient sans le chercher, MIRO n’est pas guidé par le succès . Il est en quête d’un idéalisme et croyait encore au génie personnel pour y arriver et au rôle de l’artiste comme révélateur d’entités supérieures mais en travaillant modestement comme un artisan comme il le dit lui‐même
MIRO situe ses œuvres dans la zone idéale des valeurs les plus élevées, c’est‐à‐dire les éléments incorruptibles de la vision cosmique , l’univers intangible loin des motivations de production et de la consommation.
Ses œuvres sont dans l’ensemble orientées du bas vers le haut, dans un ample courant ascendant qui fait monter l’énergie de la terre vers les anthropoïdes et celles des anthropoïdes vers le ciel.
Ce que nous dit CIRCI correspond tout a fait au tableau FYI . Si ce tableau est minuscule par sa taille, il est immense par la perception qu’il laisse entrevoir. Il déroule l’histoire de l’humanité de la préhistoire à notre époque contemporaine ou il en fait un bilan négatif et propose un monde meilleur en utilisant l’allégorie, le mythe du retour à l’homme originel comme réponse à ce nouveau monde purifié et comme le dit CIRICI pour cela il utilise l’énergie de la terre concentré dans le tableau par l’anthropoïde ETNA pour recréer vers le haut cet homme nouveau pour le nouveau monde
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D49 ‐ LES ŒUVRES ET FYI
Pour ses tableaux MIRO dans les années 30 « part de la mémoire, de la fantaisie, de l’irrationnel pour créer des œuvres qui soient des transpositions visuelles de la poésie surréaliste. ces visions de rêve contiennent souvent des images déformées d’animaux jouant de formes organiques tordues et d’étranges constructions géométriques. Les œuvres sont faites avec une gamme limitée de couleurs, en particulier le bleu , le jaune, rouge , jaune vert et le noir.
L’art de MIRO est le résultat d’un processus de simplification qui tend à présenter les formes en éléments essentiels qui n’apparaissent pas tels qu’ils sont dans la nature mais comme des signes très simples, qui reflètent l’univers intérieur de MIRO. Ces objets et figures réduits à leurs formes essentielles se rapprochent de l’innocence des enfants et de leur façon de s’exprimer. »
MIRO dit par ailleurs dans un entretien « Les idées sont les seules choses qui m’occupent, cela conduit à des comportements extrêmes. Dès que j’ai terminé une chose, je téléphone aussitôt à mon marchand pour qu’il vienne la chercher car je ne peux plus supporter de la voir devant moi, je la trouve horrible. Je veux dire que quand j’ai terminé une œuvre je vois en elle le point de départ d’une œuvre suivante, mais rien de plus qu’un point de départ pour aller dans une direction diamétralement opposée., je la trouve vieille, déjà sortie de ma vie.
Un simple point de départ, je pourrais repeindre dessus. Loin de moi de voir une œuvre achevée, je la vois comme un commencement, le terreau d’une idée à développer, a faire fructifier. Et déjà vous rappeler que ce que je déteste le plus c’est la permanence. »
Dans FYI l’avantage de ce tableau c’est qu’on peut se rendre compte de ce que dit MIRO ci‐dessus en se concentrant sur une seule œuvre double.
Les animaux du tableau ( bovin, oiseau, serpent) sont faits avec des formes simplifiées et déformées : Le corps du serpent est fait d’une une ligne et la tête est faite de la lettre M tronquée. L’oiseau rassemble 2 yeux indépendants,1 oreille , 1 bec déformé en sexe féminin,Le bovin est fait d’ une masse informe sans contours précis.
Les couleurs des peintures utilisées sont réduites au vert, au bleu, blanc, noir. Ces formes qui se rapprochent de l’innocence des enfants, c’est aussi l’innocence des hommes des cavernes rupestres dont MIRO se posent dans les mêmes conditions d’innocences et vierges de tout acquis artistique des premiers hommes
Et pour créer ce tableau FYI , le peintre est sans doute parti d’un point de départ qui pourrait être un point noir, une saleté ou une tache d’essence sur le support de papier cartonné Sali ( figure 5 page11). L’idée lui est venu de créer une image du plafond de la grotte D’ALTAMIRA dans l’état d’esprit d’un enfant afin de se mettre dans les mêmes conditions de vide pictural qu’un enfant qui ne sait rien de la peinture. Il n’avait pas fini son tableau que probablement les idées sont venues bousculer son tableau préhistorique.
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La forme du Bovin et le mur d’entrée de la caverne rupestre lui a probablement fait penser à la montagne ETNA et la légende de EMPEDOCLE, .Cette nouvelle idée ,il l’a mis en pratique sur le même tableau en créant un nouveau point de départ qui permet de faire la transmutation d’un tableau à l’autre sans supprimer quoi que ce soit du premier tableau, ils se superposent de manière naturelles sans qu’à priori il y ait des ressemblances d’un tableau à l’autre dans l’instant mais au cours de création ce rapport va se construire .
MIRO a réalisé de grandes œuvres que l’on trouvent dans les plus grands musées et qui circulent dans le monde par l’intermédiaire d’expositions mais il a fait aussi énormément d’œuvres sur des supports de toutes sortes que ce soit sur du carton lisse ou ondulé , sur masonite, sur papier de verre etc , sans chercher à faire beau ou a être commercial ou bien dans l’esprit du temps .
Au contraire il a toujours cherché la rupture sur ses œuvres passées et la rupture par rapport aux peintres de son temps . Ses œuvres qui pouvaient passer pour secondaires au moment où il les a faites sont aussi essentielles que ses œuvres phares par les idées qu’elles émergent et qui seules comptent pour MIRO. Il disait à ce sujet de « ne pas mépriser la réalisation dite secondaire de mon œuvre, les papiers trouvés ,les cartons ,les chiffons sur lesquels je nettoie un pinceau, c’est quelque chose que Dieu met sur le chemin de ma vie et qui sert à enrichir ma vie, ce qui compte n’est pas une œuvre , c’est la trajectoire de l’esprit durant la totalité de la vie, non pas ce qu’on a fait au cours de celle-ci mais ce qu’elle permettra aux autres de faire à une date plus ou moins lointaine » En ce sens MIRO a été exaucé car il est à la base de la peinture de beaucoup de peintres américains qui sont réunis sous l’appellation « peinture expressionniste abstraite « dont les têtes de ponts étaient GORKI, POLLOCK,GOTLIEB,HANS HOFFMAN, ROTKO, DE KOONING etc
Dans son carnet CATALAN à la date du 15 janvier 1941 il écrit au sujet de la série de « femmes »
"maintenant , je termine la série de « femmes »,. Il est possible que si je les regarde dans quelques temps , certaines me paraissent infantiles :ne pas accorder d’importance à cette impression, les regarder encore plus tard et certainement elles m’apparaitrons d’une grande valeur comme point de départ spirituel, finalité très logique de mes recherches actuelles- il semble, en voila tous les indices , que je veuille faire maintenant d’une façon solide mon œuvre antérieure qui actuellement n’a que l’aspect d’une ébauche "
L’essentiel donc pour MIRO ce n’est pas de finir une œuvre mais de permettre d’entrevoir qu’elle permette un jour de commencer quelque chose., il dit : « L’état actuel des œuvres doit servir uniquement de point de départ pour qu’elles s’enrichissent lorsque je réaliserais des trouvailles postérieures » .
Dans ce sens la sculpture « la fourche » de 1963 ( FIGURE )n’aurait t’elle pas été inspiré par FYI, on y trouve une forme d’entonnoir renversé ( dans FYI‐ETNA) une plaque avec un trou central ( dans FYI le cratère) une fourche orientée vers le ciel ( dans FYI l’oiseau) et devant la sculpture un mur de pierre ( dans FYI , la ruine de de la tour du philosophe)
Selon CIRICI « Après cette analyse de vocabulaire ( les éléments du tableau, les formes, le langage pictural) il convient aussi d’analyser la syntaxe qui régit l’utilisation des éléments dans le cadre des ensembles que sont les œuvres »
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« A partir de 1932 ,les tableaux de MIRO jouent sur quelques registres fondamentaux, le ciel inaccessible, des organismes plus ou moins anthropomorphes et une terre sustentatrice et source d’énergie…. La terre sert de support pour insuffler de l’énergie aux groupes de caractères biologiques montés sur elle…Les véritables protagonistes des tableaux sont des êtres en général anthropoïdes qui occupent la partie centrale de l’ensemble du tableau et sont souvent d’un format tel, que se trouve presque complètement supprimé l’espace qu’on pourrait considérer comme un fond »
"Ces personnages, êtres, sont en général larges à leur base et très étroit vers le haut ce qui leur donne la forme extérieure d’un entonnoir renversé. Compte tenu du rôle de source d’énergie ,dévolu à la terre, il faut comprendre que cet entonnoir, recueille quelque chose dans sa partie évasée et le transmet à sa partie étroite. Leur morphologie et leur rapport avec le support terrestre portent à penser et font sentir directement que tous ces personnages sont visités ,parcourus et enflammés par un courant ascendant qui va de la terre vers le ciel."
Quand on lit ces quelques phrases ci‐dessus de CIRICI, on pourrait presque dire que CIRCI s’est basé sur le tableau FYI inédit pour les écrire tellement cela semble calqué sur ce tableau FYI
En effet, dans FYI , le personnage central dont parle CIRICI c’est le volcan ETNA en forme d’entonnoir renversé considéré par le peintre comme un être vivant anthropoïde et même un demiurge, Sa base source d’énergie évasée permet à la lave de remonter en courant ascendant jusqu’au sommet. Dans FYI cette source d’énergie permet la purification de l’âme du nouvel être qui sortira du volcan pour s’élever vers la félicité
Ce petit tableau FYI foisonne d’images relatant l’histoire de l’humanité ( la préhistoire, la civilisation grecque ancienne et ses mythes ,la civilisation chinoise ancienne , la période contemporaine, la vie terrestre et souterraine ), le ciel et ses mystères et l’idée de la création d’un nouveau monde, plein d’idées et de sujets que MIRO développera tout au long de sa vie.
Ce qui est essentiel pour MIRO avant tout en tant qu’homme et en tant que peintre ,son souhait le plus cher c’est « de voir le monde changer » et il veut l’exprimer dans ses peintures , c’est le dénominateur commun de toutes ses œuvres et FYI en fait partie comme aspiration à un nouveau monde pour de nouveaux êtres humains purifié dans l’esprit des hommes du paléolithique de l’art pariétal, rêve utopique mais c’est dans ses rêves que MIRO s’affirme et c’est ce qui l’a conquis chez les Dada et les Surréalistes, c’était de pouvoir faire vivre les rêves les plus fous
D50 ‐SIMPLICITE
Après sa période détailliste du début des années 20, MIRO choisit la simplicité
Dans FYI le peintre n’emploi qu’un petit nombre de couleurs, le vert, le bleu, le blanc, le noir, le brun‐ vert car sa tendance est la simplification.
A ce sujet miro dit : « Peu à peu je suis arrivé à ne plus employer qu’un petit nombre de couleurs , Ce n’est pas la première fois que l’on peint avec un petit nombre de formes et de couleurs, les fresques du Xème siècle sont peints ainsi. Pour moi, ce sont des choses magnifiques »
Ses personnages ont subi la même simplification que les couleurs, simplifiés ils sont plus humains et plus vivants que s’ils étaient représentés avec tous les détails, ils leur manqueraient cette vie imaginaire qui agrandit tout.
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Dans FYI le serpent est limitée à une ligne, 1 point et une lettre calligraphique M, la tête du paysan catalan à une ombre diffuse et l’oiseau à quelques éléments, œil, sexe et oreille . « Les choses les plus simples me donnent des idées » affirme MIRO et il concentre sa réflexion sur un monde pictural ancré dans la simplicité mais jamais dans la simplification.
Miro retourne ainsi à une puissance primitive qui lui permet d’échapper à toute emphase et à une trop glorieuse reconnaissance qu’il ne souhaite pas. La simplicité du geste prévaut désormais à la boulimie d’accumulation de ses peintures détailliste du début des années20 .
Il ne subira pas la voie de l’art du capitalisme d’accumulation, il n’aime pas l’emphase ni la rhétorique, il n’aime pas la préciosité. La vision de MIRO demeure intacte et forgé sur sa terre catalane peuplée de paysans et la culture méditerranéenne . Dans FYI on remarque la présence du paysan avec son bonnet catalan,( figure 36 page 160) et la méditerranée avec le volcan ETNA, la grotte d’ALTAMIRA ( figure 2 page 3)et la philosophie de EMPEDOCLE
D51 ‐LE PASSE, LE FUTUR , LE TEMPS et FYI
MIRO disait ; « je regarde le passé et je travaille en pensant au futur tout aussi bien » mais le présent lui échappe , il en dit : « Nous sommes dans une époque qui elle-même ne sait pas où elle va …. »
Le temps n’a pas de prise sur sa peinture, dans son carnet catalan « une femme » de 1941 il dit : « ne pas s’occuper de quand seront réalisés ces œuvres, faire abstraction des années et du temps, qu’elles travaillent dans mon esprit » et » ne pas s’occuper de savoir si je pourrai ou non finir une œuvre pendant la durée de ma vie, ce serait une faiblesse, ce qui est important n’est pas de finir une œuvre mais de permettre d’entrevoir qu’elle permettra un jour de commencer quelque chose. »
« L’état actuel de ces œuvres » dit‐il dans son carnet catalan « doit servir uniquement du point de départ , qu’elles s’enrichissent , lorsque je les réaliserai, de trouvailles postérieures. La question de la date est purement anecdotique , ce qui est important c’est l’ensemble de l’œuvre de toute ma vie , quand je ne pourrai plus la continuer, ce sera une âme mis à nu »
A la vue de FYI on peut se demander s’il aurait pu avoir une influence sur certains tableaux des« constellations » de 1940‐1941 ( figure 56 page 96) .La peinture de la forme centrale du tableau FYI est très similaire au fond des constellations non pour les couleurs mais les matières ( peinture avec gouache eau et essence , les dégradés , l’intégration des différentes teintes de couleur et les zones plus ou moins fluides selon les pourcentages d’eau et d’essence appliqués.)
Autre ressemblance cette fois dans la composition et les formes entre FYI et la sculpture « la fourche (figure 46 page 160)» de 1964 comme indiqué à plusieurs reprise dans cette étude
On retrouve un corps en forme de cône renversé , un cratère( partie métallique avec un trou rond percé) , une tête ( la fourche)et le mur devant ,Les têtes par leur direction respectives aspirées vers le ciel
FYI est aussi significatif par son intemporalité. On passe du volet 1‐ bestiaire du tableau au volet 2 ‐ Etna dans l’instantanéité comme si il ne s’était pas passé plusieurs siècles siécles entre les deux volets, et le message du tableau marque le retour à l’homme originel des cavernes rupestres tout cela sans tenir compte de l’élément temps qui n’a pas d’importance aux yeux du peintre .
La vision intérieure de Miro est fixée vers le futur de l’univers ou il propose la naissance d’un nouveau monde en se référant à la naissance de la préhistoire.
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Le tableau FYI représente d’une part la préhistoire et d’autre part la création d’un nouvel être pur à l’image de l’homme des cavernes rupestres et de l’art pariétal pour un nouveau monde mais cette transformation se fait dans la violence et la mort
FYI est délimitée en 3 parties , la terre en bas du tableau avec le serpent qui représente le monde qui selon MIRO a pris un chemin contrenature, le ciel avec l’oiseau symbole de pureté et de liberté pour un monde purifié et entre les deux L’ETNA qui en demiurge permet la transmutation de l’ancien vers le nouveau monde.
MIRO fait le pari sur le mouvement, le changement, étranger à ce qui caractérise le contexte occidental moderne dont il prévoit toutes les perversités de la science et de la technique avant qu’ils apparaissent. Sa clairvoyance sans doute il l’a doit à son propre salut grâce à sa convalescence passée MONT ROIG auprès des choses simples, au cœur d’un monde préindustriel, anti ‐urbain ,anti‐ bourgeois et il ne veut pas envisager le sort d’un monde dans une optique de déclin
MIRO prône donc par ce tableau le retour aux sources de la préhistoire, à l’état naturel de l’homme avant la grande industrialisation pour retrouver le sens perdu de l’authenticité. L’ETNA prépare cet avenir radieux pour l’homme par son retour à l’originel .
A l’image de ce monde nouveau dont aspire MIRO, il fait que chaque œuvre peinte ou dessinée soit une nouvelle naissance en ouvrant de nouvelles portes sur un autre avenir contre toutes les idées fausses et tous les fanatismes . il dit qu’il y est arrivé quand s’est débarrassé des choses qui alourdissent sa marche, ses idées préconçues et reçues .
D51‐LES PARADIGMES MIRO et FYI
Pour CIRICI ,Les personnages plus ou moins anthropomorphes de MIRO de FYI du volet2‐Etna ( l’oiseau, l’ETNA, le serpent,) sont des paradigmes d’une culture solidement enracinés que MIRO assimile en vue de les transformer dans un projet expansif alors que le système de valeur choisi demeure impassible ou impossible et rend impossible l’entreprise créatrice.
L’œuvre de MIRO est la conséquence de caractères fondamentaux d’un genre particulier de révolte, la révolte poétique . Ces anthropomorphes expriment un désir d’action mais au lieu de considérer que l’action peut être réalisé dans le monde matériel même , les modèles sont considérés comme spirituels, désincarnés et mènent leur action qui est un combat pour la justice , le bonheur
Dans FYI, les personnages indiqués ci‐dessus mènent un combat pour purifier les âmes, sauf l’obstacle du serpent qui veut empêcher le processus.
D’autre part l’art de MIRO est essentiellement tourné vers le changement et le changement semble un projet irréalisable dans les rapports établis de production , il y a paradoxe à travailler selon une dynamique de générosité qui est le sens exactement inverse à la civilisation de profit. mais ces contradictions chez MIRO n’annule pas la valeur de l’œuvre, au contraire c’est un espoir.
En ce qui concerne FYI , ces personnages anthropomorphes sont dans l’action pour faire naître un nouveau monde, meilleur que l’ancien grâce à la purification des âmes et il n’y a pas les contradictions avec la civilisation de profit
.Dans ce cas précis de FYI , il semble que cette œuvre aurait été offerte
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‐D52 – HUMILITE ET ORGEUIL
Comme dans beaucoup de domaines la dichotomie est présente dans l’œuvre de MIRO et certaines ambivalences ont été évoquées dans cette étude ;
Dans FYI on ressent un double sentiment d’orgueil et d’humilité dont lui-même , MIRO dit a sébastian GASH , critique d’art, « De l’orgueil dans la conception d’une œuvre et de l’extrême humilité dans sa réalisation »
Orgueil car Miro se veut créateur d’un ordre supérieur, il se met dans la position d’un DIEU qui détruit , qui crée une nouvelle humanité pour un monde nouveau Il se veut aussi d’une certaine façon un aristocrate, il se sent investi de dons célestes que le travail et l’argent ne peuvent conférer
Dans FYI , C’est le créateur au- dessus du demiurge l’ETNA dont la mission est de détruire l’homme contemporain pour le reconstruire avec âme et un esprit purifié à l’exemple de l’homme originel du temps des cavernes rupestres et l’orienter sur des chemins nouveaux dans un monde nouveau à reconstruire
Humilité car MIRO nous dit souvent dans ses entretiens qu’il veut travailler avec l’humilité d’un ouvrier,
CONCLUSION
La création de ce tableau est conforme a cette phrase de MIRO
« Ce qui commande chez moi c’est le fait plastique et poétique, ce sont les associations de formes et d’idées , une forme me donne une idée, une idée une autre forme et le tout aboutit a des personnages , a des animaux , a je ne sais quoi que je n’ai pas prévu.
Comme le tableau « Photo » FYI a été crée avec peu de moyens mais beaucoup de possibilités pour le spectateur de rêver devant et de suivre ses propres songes.
Ce tableau FYI ou il commence un sujet Volet 1-bestiaire et sur le même tableau en fait un autre nouveau FYI-ETNA sans rien supprimer au premier cela va bien dans l’esprit de MIRO qui nous dit « ce qui est important ce n’est pas de finir une œuvre mais d’entrevoir qu’elle permettra un jour d’en commencer une autre.
Miro ne regarde pas en arrière, ne s’arrête pas à l’œuvre finie , il se contente de lancer des germes, d’allumer des feux de jeter des ponts sur l’abime et de fortifier le vide qui nous soutient. C’est un peintre des commencements, de la naissance et de la métamorphose du signe
Pour DUPIN Tout ce qu’il fait est de lui et ne se rapporte à rien d’autre d’imitable, c’est inimitable que ce soit dans le figuratif dans l’abstraction ou les deux réunis. Il disait
« il sera impossible désormais de rapprocher MIRO d’aucun autre peintre , impossible au spectateur le moins attentif de le confondre avec quiconque, impossible de l’imiter de le suivre ou de le plagier, ….. »
Je pense que dans chaque trait, chaque coup de pinceau, la présence de MIRO transpire dans ce tableau FYI et comme dit GIACOMETTI de MIRO « MIRO ne pouvait pas poser un point sans le faire tomber juste. Il était si véritablement peintre qui lui suffisait de laisser tomber 3 taches de couleurs sur la toile pour qu’elle existe et soit un tableau »
Que pensez aujourd’hui en 2023 des messages de ce tableau, de la pensée de MIRO à travers ce tableau ?
« Voici il y bientôt un siècle, des poètes, des philosophes, ethnologues, des personnalités comme Georges Henri RIVIERE , RUDOLF OTTO et MIRO, idéologues voulaient jeter les bases d’une société qui reposent sur l’inclusif, le non lucratif, le nihilisme, le mysticisme ,la magie en développant un monde intérieur sans relations avec les lois , l’évolutionnisme et le rationalisme ambiant mais les sciences modernistes et la société contemporaine autocentrée sur l’individualisme , ont tout emporté d’où le rêve de MIRO d’un retour aux sources de l’art pariétal, l’Arcadie
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Miro est doté d’une grande intelligence intuitive, la conception et l’exécution de ses compositions ne sont jamais le fruit du hasard sauf le 1er geste de départ comme disait GIACOMETTI ci-dessus mais aussitôt l’intelligence intuitive de MIRO trouve une construction très rigoureuse et pensée
Le tableau FYI fait ressortir l’origine de l’humanité, la préhistoire des cavernes rupestres et de l’art pariétal, la civilisation Grecque ancienne ( présocratique) la civilisation chinoise , notre civilisation contemporaine comme un puit de pétrole qui fait ressortir ce qui aurait du être la richesse depuis le début de l’humanité mais qui pour MIRO s’est transformé en désastre d’où le désir de renaissance d’un être pur pour changer l’humanité
En résumé si au premier coup d’œil FYI nous montre une représentation à l’intérieur d’une caverne rupestre d’un bovin‐ à la manière d’un peintre des cavernes et dans le même esprit qu’un enfant n’ayant pas de mémoire , vierge de culture picturale , le mur étant l’entrée de la grotte .Ce tableau semble vierge d’intériorité du peintre jusqu’au moment ou l’on découvre un oiseau sortant du crane du bovin, il y a alors un basculement dans un autre tableau ( volet 2) qui se superpose au premier (volet1) et qui permet de découvrir de manière discursive la richesse intérieure de la peinture sortie de l’imagination débordante et hallucinatoire du peintre
Le but de ce tableau : Miro voudrait apporter ce qu’aucune civilisation n’a plus dans sa vieillesse et dont notre usure finit par s’emparer d’un monde pervertit. Pour Miro il n’y a pas d’autres solutions que de retrouver la pureté de l’âme et de l’esprit à l’exemple des hommes des cavernes rupestres avec leur art pariétal qu’il nous illustre par l’exemple la légende du philosophe EMPEDOCLE en généralisant sa régénérescence d’une âme purifiée à l’humanité toute entière par métempsychose.
La difficulté de lecture de cette œuvre est que la diversité des nuances de couleurs très proches les une des autres sans transitions et contours précis joue sur les seuils d’invisibilité qui oblige le spectateur à écarteler son regard entre la vue de loin et la complète myopie ce qui malheureusement rendent le reproduction photographique tout à fait destructrice.
Le but de MRO , laisser à travers ses œuvres des germes pour le futur Ce tableau qui a été crée il y a près de 90 ans est toujours d’actualité, Aujourd’hui avec la pandémie du COVID , Miro nous montre les même peurs monstrueuses sur la terre des hommes ( paysan catalan) symbolisé par le serpent (virus) , les mêmes peurs de la mondialisation que la matérialisation à l’époque de MIRO et le désir de purification
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‐E ‐ COMPARATIF FYI AVEC D’AUTRES TABLEAUX DE MIRO
E1 ‐ DESSIN , « il était une fois une petite pie »
E2 ‐PAYSAGE AU SERPENT DE 1927
Dans ce tableau on retrouve tous les éléments principaux de FYI volet 2 à savoir le volcan au ciel ocre foncé avec au sommet les flammes qui sortent du cratère un peu plus bas un serpent sort du volcan ; Au pied du volcan bien délimité se trouve la terre avec à gauche ( comme au tableau FYI) une tour ( a rapprocher de la tour du philosophe de FYI)
Une différence de position du serpent par rapport à FYI ou celui‐ci sort des ténèbres souterrains
Dans FYI, c’est un oiseau ( symbole de l’être humain purifié) qui sort sur le point de s’envoler vers le ciel, vers la félicité, vers la pureté alors que le serpent du paysage au serpent ( symbole de l’être du péché originel) lui regarde vers la terre ,vers les ténèbres , son domaine. ou il retourne
Le volcan considéré comme démiurge , crée ici un être maléfique symbolisé par le serpent malgré l’aspect plaisant du serpent alors que dans FYI le volcan crée un oiseau encore inquiétant en cours de purification qui s’élèvera pour trouver « le bonheur de vivre » comme la toile de MATISSE le suggère
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E3 ‐PERSONNAGE DEVANT LA NATURE (1935, STOCK MATISSE)
Ce tableau appartenant au Philadelphia Museum de la collection Walter ARENSBERG provient du stock de Pierre MATISSE vendu en juin 1935 au collectionneur et propriétaire de galerie STANLEY ROSE, HOWARD PUTZEL qui le vendit à Louise et Walter ARENSBERG en décembre 1935 . l’œuvre fait partie aujourd’hui de la collection ARENBERG au musée de Philadelphie. Elle porte le même numéro de stock que FYI qui est 362 pour des raisons indiquées dans le paragraphe sur Pierre MATISSE
Ce tableau est à rapprocher non seulement pour la date ( 1935), pour le numéro de stock ( 362) mais aussi et surtout pour le paysage et les protagoniste qui animent ce paysage.
Au même endroit FYI volet2‐Etna que le personnage , tête de paysan catalan menacé d’être dévoré par un serpent dans FYI on trouve dans « personnage devant nature » un gnome grotesque menacé lui‐même par un serpent avec un corps de chèvre dans un paysage de montagne volcanique.
Ce tableau aurait été crée en 1935 c’est‐à‐dire au début de la période sauvage qui a débuté en octobre 1934 avec le retour des monstres de la terreur FYI date de la même période 1935 On retrouve le serpent symbole de terreur , l’oiseau à la tête inquiétante.
Ces deux tableaux noté par MATISSE 362 ont du arriver probablement en même temps dans le stock de MATISSE l’un a été vendu et l’autre 362 offert (FYI).
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E4‐ LA FOURCHE ( sculpture)
Cette sculpture gigantesque placée à Saint Paul de Vence depuis 1963 qui pourrait être vue comme un totem est tout à fait construite dans l’esprit du petit tableau FYI . Sa description se compose d’un long corps en forme d’entonnoir ou cône renversé surmonté d’une plaque de bronze dont le centre est percé d’un large trou , elle‐même coiffé d’une fourche orienté vers le ciel qui semble vouloir prendre son essor. Devant cette sculpture un mur fait avec les pierres anciennes du pays.
Cela fait donc penser à FYI :
La partie conique et la plaque trouée c’est l’ETNA de FYI avec son cratère
La fourche , c’est l’oiseau qui veut prendre son essor dans FYI
Le muret devant la fourche , c’est la ruine de la tour du philosophe de FYI Quand au message il est aussi dans la même lignée.
Le cercle , (cratère d’un volcan),selon sa position devient source des ténèbres ou de la lumière Dans FYI les ténèbres de l’ETNA c’est la destruction des corps, la lumière c’est la création d’un nouvel être purifié par le feu du volcan
Le cercle c’est aussi la surface convexe d’une coquille d’œuf qui contient un embryon de vie qui en y ajoutant la couleur du ciel et des indice de mouvement donne la transparence de l’aube source de création tout comme FYI qui crée un nouvel être pour un nouveau monde .
On peut donc mettre ces deux œuvres en parallèle dont le message est identique , créer un nouvel être pour un nouveau monde
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E5 ‐LA FORNARINA
FYI ne serait pas la seule peinture ou l’image qui semble la plus évidente ,possèderait des sens cachés
Une autre peinture très connue de MIRO, FORNARINA qui a été inspiré de la FORNARINA de RAPHAEL ou il en a fait la représentation simplifiée mais fidèle au tableau de RAPHAEL sur fond de terre brulée. Le personnage se détache mollement en 3 masses très librement silhouettées vagues et fantomatiques comme un édifice du hasard
Ce tableau FORNARINA qui semble simple est pourtant d’une grande complexité et très mystérieux car il vient de l’imagination du peintre tout comme FYI.
Tout comme FYI , « les motifs empruntés ne reflètent pas la situation narrative ou la psychologie originale des personnages mais sont alternativement convertis et investis d’une nouvelle signification » ( victoria Noel‐JOHSON)
Comme FYI, il y une lecture simple ou l’on voit la robe ,de la dame, la poitrine, la tête et la coiffe En ce qui concerne la tête il y a plusieurs interprétations
Pour certains spécialistes de MIRO ( jacques DUPIN) , on y voit un visage formé d’un minuscule disque noir d’où s’échappe un énigmatique poisson blanc, le même trait formant la queue du poisson et le nez de la dame
Pour d’autres cette tête c’est un cosmos en symboles. Les yeux se transforment en ce qui apparait comme une comète qui traverse une galaxie. Sa queue étroite voyageuse s’apprête à traverser un trou noir dans lequel des trainées rouges prévoient son passage tandis qu’un point blanc gravite sur le bord., c’est ce que pourrait montrer l’un des premiers croquis sur la FORNARINA fondé par son inconscient et son instinct
Il existe aussi d’autres interprétations de FORNARINA exposées par des spécialistes de MIRO interprétation proche de FYI .La première masse en entonnoir renversé ( jupe de FORNARINA) serait aussi la Montagne ETNA , la deuxième masse au dessus serait le cratère du volcan et au dessus du cratère la fumée et le feu du cratère.
Ne pourrait‐on pas y voir aussi dans FYI, le pendant de FORNARINA
La tête dans cette dernière interprétation et à la vue et interprétation de FYI pourrait être alors selon EMPEDOCLE ( voir paragraphe ci‐dessus sur EMPEDOCLE) la disposition de différents fragments d’êtres vivants ( queue de poisson, œil ) qui s’agencent pour former indifféremment des hommes, des animaux , des plantes. Les membres solitaires mélangés cherchent à s’unir, .Cela en tenant compte des 4 éléments énoncés par les présocratiques la terre ,l’eau, l’air et le feu , coordonnés avec l’amour et la haine et le passage de la mort à la vie.
L’être nouveau est symbolisé par cette tête encours de formation qui comme dans FYI qui s’échappera vers le ciel, là aussi l’ETNA aura été le vecteur de la déconstruction et la reconstruction facilité par l’énergie du volcan, le feu.
Toujours est t’il que dans FORNARINA comme FYI, MIRO cherche à susciter une sensation d’inconfort et d’agression en contradiction avec le tableau original de RAPHEAL « ou la maitresse de RAPHAEL dans son tableau , Margherita LUTI, est la parfaite incarnation de la féminité de la Renaissance.
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E6‐AUTO‐PORTRAIT 1937‐1960
MIRO a réalisé une auto portrait en 1937 par une observation visible très minutieuse des plus petites parties de son visage en projetant des détails grossis sur un horizon cosmique et d’un imaginaire intérieur faites de tensions invisibles d’un feu intérieur. En 1960 il reprend la copie de ce tableau pour en faire un nouveau qu’il superpose à l’autoportrait de 1937 comme FYI avec le volet 2 superposé sur le volet 1
E7‐ L’HIRONDELLE EBLOUIE PAR L’ECLAT DELA PRUNELLE ROUGE , de 1925 etcelui transformé en 1960
en noir et en couleur représentent l'œuvre telle que peinte en 1925 et la même après les enrichissements réalisés par l'artiste en 1960, L’un superpose l’autre comme FYI avec ( Bestiaire et ETNA)
‐
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SOURCES
LIVRES
REMI LABRUSSE, « un feu dans les ruines », « préhistoire une énigme moderne », « Préhistoire l’envers du temps »ROLAND PENROSE, « JOAN MIRO » GAETAN PICON « les carnets Catalans », ELISA SCLAUNICK« Pierre MATISSE §Joan MIRO » MARGRITT ROWELL « Ecrits et Entretiens»,Joan PUNYET MIRO « MIRO »,Caroline EDDE « Dictionnaire MIRO»,CAROLYN LANCHNER « Joan MIRO »,EXPOSITION RENE CHAR,FONDATION MAEGHT,Georges RAILLARD » Ceci est la couleur de mes rêves», Geoges LIMBOUR « écrits sur la peinture »,Adrie GOETZ « Les constellations de VARENGEVILLE », Michel LEIRIS « Ecrits sur L’art » John RUSSEL« MATISSE père et fils », Jacques DUPIN » MIRO », Jean‐louis PRAT « Joan MIRO rétrospective de l’œuvre peint », « MIRO les couleurs de la poésie» « Métamorphoses des formes » « MIRO,la couleur de mes rêves », CENTRE GEORGES POMIDOU « Dation Pierre MATISSE »,Alexandre CIRICI « MIRO et son temps », Pierre SCNEIDER « Pierre MATISSE , passeur passionné », Sabine REWALD « The American MATISSE, the Dealer , his artists, his collection », ROSA MARIA MALET » MIRO au‐ delà de la peinture », Walter ERBEN « Joan MIRO », YvonTAILLANDIER « MIRO poésie et lumière, Musee national des beaux arts QUEBEC « MIRO à MAJORQUE , un esprit libre », MUSEE ZERVOS« Cahiers d’arts »,Charles W MILLARD « MIRO »,Rosalind KRAUSS‐ MargrittROWELL « Magnetic Fields », « L’essence des choses passées et présente » Musee des beaux arts de MONS, Les cahiers du musée d’art moderne « Dossier GeorgesDUTHUIT »Galerie d’art du conseil général des bouches du RHONE « Autour de Georges DUTHUIT, PIERRE MATISSE Musée MATISSE de NICE « un marchand d’art à NEW YORK »
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Sébalia GASH, GiuseppeMARCHIORI, Joan TEIXIDOR, Pierre GUEGEN,Julien CLAY,Heni MATARASSO, Patrick WALBERG,Alain JOUFFROY André Pieyse De MANDIARGUES,Maria Lluisa BORRAS, Joaquim GONIS, Sam LAZZARO, Antonio BOIX, Pierre LOEB, Aimé MAEGHT, Raymond QUENAU,TAL COAT,TERIADE,Tristan TZARA,André VERDET, Christian ZERVOS,ASHTON DORE,Alexander CALDER,GALLATIN,ROBERT S LUBAR,Clement GREENBERG,MAN RAY,HENRI MC BRIDE,James T SOBY,Mark TOBEY,CY TWOMBLY,Victoria COMBALIA
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